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Microsoft persiste en terrain hostile

La guerre des prix n’y a encore rien fait : la X-Box peine à concurrencer les consoles de Sony et de Nintendo. Seule issue : déplacer le conflit en ligne, un terrain où Microsoft pense pouvoir gagner.

“Play more.” Le slogan de la X-Box n’a peut-être jamais aussi bien collé à la marque. Malgré un lancement un peu raté, Microsoft n’a pas dit son dernier mot et veut “jouer encore “. Pourtant, les pertes qu’il concède pour entrer dans le jeu vidéo donnent le vertige. Selon les analystes, Microsoft perdrait 150 dollars (152 euros) sur chaque console. Sur cette base, l’Américain ayant écoulé 3,9 millions de machines au 31 juin, il aurait lâché au passage 585 millions de dollars dans la guerre des consoles. Mais l’enjeu est de taille.La banque d’affaires Goldman Sachs anticipe pour l’année en cours un chiffre d’affaires mondial sur le secteur de 17,5 milliards de dollars. Et Microsoft entend bien laisser ses concurrents sur place. La firme de Bill Gates dispose pour cela d’une confortable réserve financière estimée à une quarantaine de milliards de dollars pour acquérir des éditeurs de jeux vidéo et déployer sa stratégie mondiale de jeu en ligne. Et lorsqu’on demande s’il y a de la place pour trois constructeurs dans le monde, la réponse est cinglante : “Nous sommes là pour encore très longtemps, que ça plaise ou non !”, lance Sandy Duncan, vice-président de X-Box Europe.La concurrence historique est âpre et sûre de son fait. Sony, qui a fait ses premiers pas sur ce marché en 1994 avec la Playstation I, dit avoir vendu 40 millions de Playstation 2 (PS2) à travers le monde et pense pouvoir distribuer encore 20 millions de pièces dans les rayonnages d’ici à mars 2003. Quant à Nintendo, parmi les pionniers du jeu sur console au début des années quatre-vingt, il s’est fixé un objectif commercial de 16 millions de Game Cube vendues à la même date, dont 4 millions en Europe. Aujourd’hui, 3,8 millions d’unités ont trouvé acquéreur.Et Microsoft ? “C’est public : nous nous fixons un objectif de 9 à 11 millions de pièces vendues d’ici à fin juin 2003”, précise Thierry Chabrol, le directeur de la division grand public de Microsoft France. Mais, les débuts de la X-Box restent poussifs, si l’on se réfère aux rares chiffres accessibles. Au Japon, le journal spécialisé Famitsu croit savoir que la console de Microsoft n’a séduit que 274 000 joueurs depuis son lancement le 22 février 2002. Parallèlement, Nintendo revendique 1,56 million de Game Cube distribuées sur l’archipel depuis sa sortie il y a un an.

Un flop en France ?

En France, troisième marché européen, les mauvaises langues, parmi lesquelles le patron de Sony Playstation France, Georges Fornay, estime que seules 60 000 X-Box auraient trouvé un foyer depuis leur lancement en mars. De sources internes à Microsoft, désirant conserver l’anonymat, 120 000 pièces auraient été vendues à ce jour. Mais le destin de la console devrait être scellé à Noël. En effet, selon le cabinet Screen Digest, sur la seule période de Noël 2002, les trois constructeurs vendront 14,2 millions de consoles à travers le monde. Des prévisions qui expliquent la guerre des prix que se sont livrés Sony et Microsoft cet été. La PS2 est passée de 299 à 259 euros, talonnée par la X-Box (249 euros), dont le prix approchait 480 euros six mois plus tôt.Microsoft a livré à Séville, fin septembre, sa stratégie de déploiement. Au programme, l’acquisition de Rare, éditeur mythique de jeux vidéo à succès (Donkey Kong, Golden Eye 007, Banjo & Kazooie, etc.). La firme aurait déboursé 375 millions de dollars pour s’offrir l’éditeur britannique, qui a vendu 90 millions de jeux depuis 1985, et dont Nintendo était l’actionnaire principal il y a encore quinze jours. Après Rare, pourquoi pas Infogrames (Alone in the Dark) et Eidos (Tomb Raider), suivis par une vingtaine de studios de développement, rien qu’à l’échelle européenne ?Car la difficulté aujourd’hui pour Microsoft est de parvenir à produire des jeux attractifs, offline mais aussi online. Pour cela, le mieux est encore de les produire. Septembre marque ainsi le début des hostilités entre Sony et Microsoft en matière de jeux en ligne sur console. À terme, il s’agit de transformer un joueur en abonné.Une manière de casser le schéma commercial classique par la distribution sans intermédiaires, comme en ont rêvé les industriels du disque avec les juke-box virtuels. “À compter du mois de novembre, les 3 000 premiers béta-testeurs essaieront notre service de jeu en ligne X-Box Live en, en France et en Allemagne, dont la version commerciale définitive sera lancée en mars dans huit pays européens”, précise Jon Thomason, chef de projet de la plateforme X-Box Live. “En Grande-Bretagne, nos partenaires pour la fourniture d’accès sont BT, Telewest et NTL et en France, nous avons choisi Noos et Wanadoo”, ajoute Michel Cassius, directeur de l’édition de jeux X-Box en Europe.

Des “telcos” et des kits

Si les accords ne sont pas encore signés, Tiscali et Deutsche Telekom sont fortement pressentis dans les rôles de partenaires “telco” italien et allemand. Avant même son lancement, quelques doutes quant à la viabilité du projet semblent se profiler.Le joueur achète à 59,99 euros un “starter kit” comprenant un micro-casque, deux jeux (Moto GP et Whacked) et 12 mois d’abonnement. Il lui revient alors de s’abonner à un FAI, avec une préférence pour le câble. Car si la console dispose d’une carte réseau, elle est dépourvue de port USB pour la raccorder à un modem ADSL ! Un comble puisque, Wanadoo propose uniquement de l’ADSL sur le marché français, où il est leader. “Il faut à ce moment-là acheter un modem ADSL-réseau ou un routeur pour raccorder la X-Box”, précise-t-on chez Microsoft… Quoi qu’il en soit, gare aux connexions inférieures à 256 kilobits par seconde, puisque le système est optimisé pour ce débit.Reste les prévisions optimistes de Datamonitor pour réconcilier tout le monde. Le cabinet estime que plus de 111 millions d’Américains et d’Européens joueront en ligne, moyennant un chiffre d’affaires total de 5,6 milliards de dollars en 2005, lorsque la PS3 pourrait faire son entrée et initier un nouveau cycle…* envoyé spécial à Séville

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Amaury Mestre de Laroque*