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Marché des Télécoms Des acteurs en quête de stabilité

Le processus de restructuration industrielle n’a guère connu d’accalmie cet été. Côté opérateurs, la concentration se poursuit ; les spécialistes des mobiles comptent sur les opérateurs virtuels pour relancer le marché.

Dans une conjoncture fortement dégradée, le processus de restructuration industrielle ne s’est pas interrompu, malgré la torpeur estivale. Alcatel, CS Telecom, Lucent Technologies, Flextronics, la Sagem et Cisco Systems ?” pour ne citer qu’eux ?” ont marqué l’actualité de ces dernières semaines. Et ce n’est vraisemblablement pas terminé.Témoin Alcatel, qui aura supprimé vingt mille emplois dans le monde (sur un total de 110 000 salariés) d’ici à la fin de l’année. L’Hexagone est jusque-là épargné, dans la mesure où le groupe s’est, pour l’instant, contenté d’externaliser auprès de Flextronics son site de productionde Laval. Une démarche qui devrait logiquement s’accélérer, compte tenu de la volonté d’Alcatel de devenir progressivement une ” entreprise sans usine “. Une incertitude supplémentaire, avec le départ inattendu de Krish Prabhu, est à accrocher à ce tableau. Très apprécié des analystes nord-américains, le numéro deux d’Alcatel était l’un de ses rares dirigeants à disposer d’une véritable expertise technologique.Autre entreprise du secteur sous les projecteurs : la Sagem, avec un outil industriel largement surdimensionné dans la production de téléphones portables (avec un objectif de 6 millions d’unités cette année, pour une capacité industrielle d’une vingtaine de millions de terminaux). Pas question, pour autant, de sortir de cette activité, a récemment indiqué Grégoire Olivier, le nouveau président du groupe. Moins bien lotis, les trois cent cinquante salariés de CS Telecom ont assisté, cet été, à la liquidation judiciaire de leur entreprise, faute de repreneur.

Les opérateurs n’échappent pas à la crise

Mais c’est chez Lucent France que la facture sociale est la plus lourde, avec l’annonce de la suppression de cinq cent cinquante emplois (sur 1 300 salariés) et la fermeture de plusieurs sites. De même, Cisco France n’échappe pas au phénomène et devrait tailler dans ses effectifs en supprimant plusieurs dizaines de postes sur un total de six cents employés. Difficile, dans ce contexte, de spéculer sur une amélioration de la conjoncture à court terme. Et ce, d’autant que les opérateurs, autrement dit les principaux clients des industriels, sont également en délicate posture. La crise des équipementiers télécoms ne doit pas estomper l’agitation qui règne chez les opérateurs. De fait, le processus de consolidation, parmi la centaine d’opérateurs intervenant sur le marché français, se poursuit à marche forcée.

Les opérateurs se serrent les coudes

Parmi les opérateurs ayant jeté l’éponge au cours de ces dernières semaines, citons Subiteo, un spécialiste de l’ADSL ; Mangoosta, autre spécialiste de l’ADSL en liquidation, judiciaire finalement racheté par Nérim ; RSL Com, repris par Kaptech ; et Western Telecom, en redressement judiciaire. Au-delà des problèmes de financement propres à ces opérateurs, c’est également le modèle économique reposant sur l’écart entre les coûts d’interconnexion avec France Télécom et les tarifs de détails de l’opérateur public (là où se situe la marge) qui est en cause. Ce que René Russo, vice-président de Bouygues Telecom, dénonce, depuis plusieurs années, comme “le couloir de la mort”…Mêmes incertitudes du côté de la boucle locale radio, où FirstMark France ne doit sa survie qu’à sa future prise de contrôle par Suez. À cours de financements, Lynn Forester et Michael Price, les deux fondateurs de FirstMark, ne pouvaient plus suivre. Situation préoccupante également pour Landtel : titulaire de sept licences régionales (dont l’Île-de-France), on ne connaît toujours pas grand-chose de ses intentions dans l’Hexagone. Reste l’inconnue BLR Services (11 licences régionales), dont le projet est encore assez flou, malgré le récent rachat par LDCom, sa maison mère, de son concurrent Fortel (titulaire d’une licence nationale). Seule certitude : l’examen, fin 2001, par l’Autorité de régulation des télécommunications (ART) du respect des engagements des titulaires de licences de BLR promet d’être assez savoureux.Un contexte dans lequel les opérateurs survivants ont décidé, tous types de services confondus, de se serrer les coudes en fusionnant leurs deux associations (Aost et Afopt) au sein d’Afors Telecom. Objectif de ce fonds commun face à France Télécom et aux comportements anticoncurrentiels prêtés à l’opérateur public : la ” tolérance zéro “. Avec à sa tête François Maire, président du directoire de Deutsche Telekom France et figure emblématique de Siris, Afors Telecom aura fort à faire dans les mois qui viennent. Surtout avec la dernière trouvaille de France Télécom consistant à demander des ” sursis à exécution ” en cas de condamnation définitive. Il suffisait d’y penser…

Vivendi prêt à… devenir son propre MVNO !

Dans les mobiles, enfin, l’heure est plus que jamais au contrôle des coûts. C’est, du moins, la mission confiée à Gilles Pélisson, un transfuge du groupe Suez, qui remplace Patrick Leleu à la direction générale de Bouygues Telecom. Avec le limogeage de Patrick Leleu, c’est assurément une page de l’histoire de Bouygues Telecom qui se tourne. Quant à SFR et à Orange, les deux autres opérateurs cellulaires, la priorité est désormais à la réussite du lancement du GPRS, en principe cet automne. Avec, cerise sur le gâteau, l’irruption de Vivendi Universal dans l’univers des MVNO. Et pas de n’importe quelle manière puisqu’Universal Mobile sera opérateur virtuel sur le réseau de SFR, filiale de Cegetel, lui-même contrôlé par Vivendi. Devenir son propre MVNO, là encore, il suffisait d’y penser… Un registre dans lequel, Richard Branson, le président de Virgin Mobile, a assuré, lors d’un récent passage à Paris, qu’il lancerait Virgin Mobile dans l’Hexagone en 2002. Sur quel réseau ? “Nous sommes en discussion avec deux opérateurs “, répond évasivement Richard Branson.Difficile de prédire la tournure que prendront les événements d’ici à la fin de l’année. Comme le reconnaissait, fin juin, Jean-Michel Hubert, président de l’ART, lors de la traditionnelle conférence télécoms organisée par Les Échos, ” la visibilité du secteur est nulle”. Autant dire que, à l’heure où les différents acteurs retombent sur terre, l’atmosphère n’est plus aux annonces mirobolantes. De là à rapprocher l’UMTS du château de la Belle au bois dormant, on est nécessairement tenté…

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Henri Bessières