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L’industrie du semiconducteur va droit dans le mur

Les investissements de l’industrie du semiconducteur sont notoirement insuffisants depuis 2002. Nous l’avons maintes fois évoqué dans ces colonnes. Or ils pourraient baisser en 2005. Ce qui devrait plus qu’inquiéter.

Le futur ne se prévoit pas toujours à partir de l’examen de données passées. Néanmoins, il est bon, lorsque l’écart se creuse entre évolutions passées et présentes, de trouver des explications crédibles. Or, nous sommes aujourd’hui face
à une anomalie très inquiétante dans l’histoire du semiconducteur.Anomalie mise en évidence par le graphe ci-dessous. Il reflète l’évolution du rapport des investissements de l’industrie du semiconducteur à son chiffre d’affaires, un rapport aujourd’hui anormalement bas : chacun peut le
constater, nous sommes entrés dans une quatrième année de sous-investissement.Normalement, ce rapport a toujours été de 25 %. Depuis quelques années, les fabricants de semiconducteurs admettent qu’il peut être de 23 %. Mais pas moins car il faut toujours supporter la multiplication par quatre des
performances des circuits tous les trois ans, donc moderniser en permanence son outil de production pour pouvoir vendre des produits à l’état de l’art. Comment la situation n’a-t-elle donc pas déjà craqué ? Cinq explications peuvent être
avancées :1­ Nous avons vécu, de 2002 à 2005, grâce aux surinvestissements de 2000 et 2001 ; c’est une explication incontestable mais cela ne peut pas durer éternellement.2­ L’industrie privilégie des investissements de dernier moment au détriment d’investissements de long terme ; cela permet de masquer une réduction de budget ; mais il y a alors risque de prendre du retard en technologies
avancées, donc de sacrifier le chiffre d’affaires futur ; là encore, il ne peut s’agir que d’une situation transitoire.3­ Il y a beaucoup plus de stocks de semiconducteurs dans le monde qu’on ne veut bien le dire et nous les consommons, ce qui masque les vrais besoins ; encore une fois, une éventuelle phase de réduction des stocks ne pourra pas se
prolonger indéfiniment.4­ L’industrie du semiconducteur apprend à gérer des capacités de production à un taux compris entre 90 % et 100 % alors qu’autrefois le maximum allait de 88 % à 95 % ; c’est certain mais, là encore, les arbres
de la productivité ne peuvent pas monter jusqu’au ciel.5­ Plus besoin d’investir à l’avance : le monde du semiconducteur sait maintenant monter une usine en moins de dix-huit mois ; cela fait vingt ans maintenant que nous entendons cette affirmation. En pratique, dans
les technologies avancées, produire après dix-huit mois est loin de signifier produire à pleine capacité avec de très bons rendements après cette période. Il n’y a que les fondeurs qui savent monter rapidement une nouvelle unité…
semblable à celle d’à côté. Or les fondeurs ne représentent que 15 % de la production mondiale.Concluons par une nouvelle constatation : après la période folle de 1996, année durant laquelle l’industrie du semiconducteur avait investi 33 % de son chiffre d’affaires, il a fallu attendre quatre ans avant que naisse
une pénurie. Après le pic fou de 2000, où l’industrie a investi 29 % de son chiffre d’affaires, nous en sommes à cinq années sans pénurie grave et avec des sous-investissements sans précédent…* Directeur de la rédaction d’ Electronique International HebdoProchaine chronique jeudi 14 avril

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Jean-Pierre Della Mussia*