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L’industrie du grand public vend trop de rêves aux consommateurs

Le milieu de l’électronique grand public sait très bien que, d’ici un an, l’arrivée de la TVHD et du MPEG-4 va rendre quasi obsolète presque tout ce qui se vend aujourd’hui en matière d’audiovisuel. Mais…

Tous ceux qui ont vu côte à côte un récepteur TV normal et un téléviseur affichant une vraie image 1 080 lignes de 1 920 pixels savent ce qu’apporte la TVHD en matière de définition. Il s’agit d’une rupture dans le plaisir de
regarder une image, et ceux qui adhéreront à ce plaisir ne pourront plus jamais revenir en arrière.Or les premières émissions TVHD seront émises en France entre octobre et Noël de cette année par les principales chaînes non publiques (par satellite dans un premier temps). Coïncidence ou pas, un début de concurrence (entre Sony et
JVC) va par ailleurs apparaître à la même époque en matière de caméscopes TVHD grand public, ce qui ne manquera pas de faire tomber leur prix en dessous de 2 500 euros. Enfin, les premiers lecteurs de DVD compatibles TVHD seront proposés avant
la fin de l’année. Ils seront suivis de lecteurs-enregistreurs l’année suivante.Nous ne pouvons donc qu’être dépités de constater que les ventes d’écrans plasma n’affichant que 480 lignes (donc moins que les 576 lignes du vieux standard analogique Secam) se vendent mieux que prévu en France, comme dans le
monde, d’ailleurs. Certes, les acheteurs sont heureux de pouvoir s’offrir “un plasma” pour moins de 1 500 euros dès aujourd’hui. Mais, vu le montant de la dépense, ces acheteurs appartiennent
normalement à la catégorie des téléspectateurs potentiellement intéressés par les futures émissions TVHD (payantes).Ils risquent donc d’être profondément déçus lorsqu’ils se rendront compte qu’ils ne pourront pas profiter de la qualité de ces dernières. Il serait possible de nous rétorquer que, d’ici la fin de l’année, il n’existera pas, de toute
façon, de récepteur TVHD pleine définition à grand écran d’un coût acceptable. Cela est exact pour les écrans LCD et plasma(*), mais pas pour les rétroprojecteurs à puce à micromiroirs.En définition 720 lignes, le prix de ces rétroprojecteurs est tombé en Europe à 2 500 euros. Or TI produit déjà une puce à micromiroirs 1 080 lignes dont le prix est appelé à rejoindre celui de la puce
720 lignes. Les rétroprojecteurs n’étant pas d’une complexité liée à la définition (jusqu’à une certaine limite), leur prix est donc aussi appelé à tomber vers 2 500 euros à échéance de quelques mois.Le seul véritable inconvénient de ces récepteurs est leur profondeur, de l’ordre de 30 cm en version bas coût (20 cm en haut de gamme). Mais, de toute façon, les écrans plasma s’avèrent tellement lourds que les acheteurs
préfèrent les poser sur un meuble plutôt que les suspendre et prendre le risque d’une casse… Cet inconvénient apparent n’en est donc pas un.

Le consommateur est mal informé, par omission volontaire

Comment, parallèlement, ne pas déplorer que la majorité des vendeurs de téléviseurs portant le logo “prêt pour la TVHD” arrivent à convaincre si facilement leurs clients de faire un effort
financier pour l’acquisition de ces produits ? Certes, ces téléviseurs pourront recevoir les images émises en TVHD, certains même avec une qualité correcte ; mais en aucun cas l’affichage ne pourra se faire sur les 1 080 lignes
de 1 920 pixels du standard qui devrait être unanimement adopté en Europe par les diffuseurs : ces clients devront se contenter de voir ces images sur les 720 lignes de 1 000 à 1 200 pixels des récepteurs
concernés.Apparemment, aucun vendeur n’annonce cette faiblesse, sauf si la question est précisément posée. Mais quasiment aucun client ne la pose, simplement par ignorance du problème. Les technophiles ont l’habitude d’acheter un PC en sachant
que ce dernier sera démodé d’ici 6 mois. Mais au moins, en informatique, les utilisateurs sont informés bien à l’avance du planning des améliorations des performances des PC.En grand public, c’est le “silence radio”. Sans doute cette situation est-elle la rançon du fait que notre industrie ait entièrement ou presque abandonné ce marché entre les mains
d’importateurs. L’intérêt de ces derniers, bien entendu, est de vendre deux fois un écran plat, à deux ou trois ans d’intervalle. Il y a donc de la malhonnêteté dans l’air.(*) Les écrans LCD dépassant un 1,1 m de diagonale ­ minimum nécessaire pour apprécier les ” plus ” des images TVHD – resteront trop coûteux en version TVHD pleine définition pour de
nombreuses années encore ; parallèlement, les écrans plasma grand public peinent aussi, techniquement, à pouvoir visualiser une ” pleine ” définition TVHD à un coût acceptable.

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Jean-Pierre Della Mussia*