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Les équipementiers, en quête de relais de croissance

Face à des opérateurs condamnés à réduire leurs investissements, les équipementiers cherchent de nouveaux relais de croissance. L’UMTS étant passé de mode, le sursis pourrait venir des entreprises ou des applications sous IP.

Dans un univers tourmenté, où trouver des relais de croissance pour les constructeurs télécoms ? Identifier la bonne réponse équivaut à chercher une aiguille dans une botte de foin, tant la déprime est grande pour l’ensemble des acteurs du secteur. Au-delà de la débâcle boursière, la cause des déboires des constructeurs sonne aujourd’hui comme une évidence : la réduction drastique des investissements des opérateurs, confrontés à une dette astronomique.

UMTS : la douche froide

Après avoir tiré des plans tant sur la comète UMTS que sur la bulle Internet, les opérateurs ont brusquement fermé le robinet en termes de Capex (Capital expenditures), acronyme anglo-saxon désignant les investissements.Premier secteur touché en raison des surcapacités dans les infrastructures longue distance : l’optique. “Il n’y a plus un seul opérateur longue distance qui achète de l’optique”, confiait récemment Hugh Martin, président d’ONI Systems (récemment racheté par Ciena). Même constat chez Alcatel Optronics et pour l’ensemble des acteurs de ce marché (Marconi, Corning, JDS Uniphase et Optical Highway), dont les commandes ont littéralement dévissé depuis l’an dernier. Un secteur où l’on a du mal à imaginer une quelconque reprise avant 2005.Exception à la règle : l’optique pour réseaux métropolitains. En Europe, ce marché pourrait doubler, à 6,3 milliards de dollars d’ici à 2006, selon Infonetics Research, épousant en cela la même dynamique qu’aux États-Unis. Ces nouvelles infrastructures contribueraient à tirer vers le haut les ventes de routeurs et de commutateurs destinés aux fournisseurs de services, puisque le même institut pronostique un quasi-triplement de ce marché, à 4,5 milliards de dollars, toujours d’ici à 2006. À condition de transformer l’essai dans un univers en manque de visibilité. Manque de visibilité qui a sans doute joué dans la décision de plusieurs nouveaux entrants – à l’instar de Siris – de ne plus investir dans l’Hexagone.Quant au cellulaire, souvent présenté comme “le” relais de croissance par excellence, il marque également le pas. Les terminaux, d’abord, où les constructeurs, à l’exception de Samsung, déchantent face à la relative saturation du marché. Côté UMTS, c’est aussi la douche froide compte tenu de la nécessité pour les opérateurs de réduire leur Capex. À telle enseigne que France Télécom freine désormais des quatre fers en Allemagne, bien que sa filiale MobilCom se soit lourdement engagée auprès de Nokia (en échange d’une commande de 800 millions d’euros, Nokia a consenti à MobilCom un prêt non garanti de 760 millions d’euros, qu’il vient d’ailleurs de passer, pour partie, par pertes et profits).

DSL : la compétition bat son plein !

L’exemple de MobilCom pourrait bien faire tache d’huile avec le risque, pour les principaux fournisseurs d’infrastructures UMTS, de se retrouver le bec dans l’eau. Le revers de la médaille, en quelque sorte, pour ceux (Nokia et Ericsson) qui auraient trop tiré sur la corde du crédit vendeur, même si le procédé leur a permis de tenir la dragée haute à leurs concurrents (Nortel Networks, Alcatel, Lucent Technologies et Siemens). Aux dernières nouvelles, seul Hutchison Whampoa, le conglomérat de Hongkong (qui a notamment sélectionné NEC, pour les terminaux ; et Nokia, pour l’infrastructure radio) semble prêt à investir significativement dans l’UMTS en Europe…Restent les accès DSL et les télécommunications par satellite. Côté DSL, ce marché est effectivement en forte croissance malgré l’absence d’une véritable ouverture de la boucle locale. Il n’empêche, la compétition est forte entre les différents acteurs (Siemens, ECI, Lucent, Cisco Systems, Nokia et Zhone Technologies), dominés par Alcatel. Difficile de prédire si les marges pourront être longtemps préservées. À moins de parvenir à relancer le marché avec les applications de type vidéo sur DSL, pour lesquelles militent ardemment Alcatel et Lucent. Côté satellites, après l’échec des projets de constellation en orbite basse, les principaux constructeurs se sont recentrés, l’an dernier, sur le marché des satellites géostationnaires. Un domaine pour lequel Alcatel prédisait une croissance supérieure à la moyenne, de l’ordre de 15 à 20 %. Manque de chance ou de discernement, ce segment a été quasi divisé par deux depuis !Au-delà des équipements pour réseaux publics, fixes ou mobiles, reste le créneau des entreprises. À l’heure où plusieurs constructeurs généralistes, à l’instar de Lucent, ont pris leurs distances avec ce marché, certains semblent réaliser – quoique tardivement – tout l’intérêt d’y rester présents. Un créneau où les différents acteurs spécialisés (Avaya et Tenovis) marquent le pas en Europe, mais où les perspectives ne sont peut-être pas aussi sombres qu’il y paraît. Témoin Alcatel, qui a failli abandonner cette activité, mise à nouveau sur la commutation privée pour se refaire une santé. Olivier Houssin, président de la division E-business, pronostique une croissance de son activité auprès des entreprises en 2002. Sur un marché mondial évalué à une cinquantaine de milliards d’euros, Alcatel y pèse de l’ordre de 2 milliards de dollars.

La téléphonie sous IP, encore balbutiante en Europe

Mais, c’est le potentiel de croissance qu’Olivier Houssin met désormais en avant : “L’activité entreprise tirera, à terme, celle des opérateurs.” Pourquoi un tel revirement stratégique ? “Il nous a fallu restructurer en profondeur notre activité entreprise, dans laquelle nous avons investi 4 milliards de dollars au cours des trois dernières années”, répond Olivier Houssin. À l’heure où la forte présence de Cisco auprès des entreprises lui a plutôt permis de limiter les dégâts, Alcatel n’hésite plus à attaquer de nouveau ce créneau.Pour ce faire, l’entreprise parie essentiellement sur la convergence de la téléphonie commutée et du monde IP. “Ce qui va tirer la convergence, ce sont les services applicatifs”, poursuit Olivier Houssin. Véritable fer de lance de cette stratégie, sa nouvelle génération de PABX-IP. “Aux États-Unis, 10 % des lignes actuelles sont vendues pour fonctionner sous IP ; cette proportion passera de 40 à 50 % d’ici à 2005”, prédit Olivier Houssin.Reste à connaître la taille réelle de ce fameux marché de la téléphonie sous IP : 1 milliard de dollars en 2001 et de l’ordre de 3 milliards en 2005, répond-on chez Alcatel. Encore plus enthousiaste, Avaya table sur 9,7 milliards de dollars en 2004. Le potentiel est donc important. Reste à convaincre les entreprises européennes : l’ensemble des acteurs considère, en effet, que la téléphonie sous IP est encore balbutiante sur le Vieux Continent.

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Henri Bessières