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Le Conseil constitutionnel prive l’Arcep de son bâton (MAJ)

L’instance constitutionnelle censure la loi qui donne à l’Arcep son pouvoir de sanction, en raison d’un manque d’impartialité intrinsèque. Le législateur va devoir la redéfinir.

Le Conseil constitutionnel censure le pouvoir de sanction de l'Arcep.
Le Conseil constitutionnel censure le pouvoir de sanction de l’Arcep. – Le Conseil constitutionnel censure le pouvoir de sanction de l’Arcep.

Article publié à 12h50

C’est un coup dur pour l’Arcep, l’autorité de régulation des télécoms. Le Conseil constitutionnel a censuré, ce vendredi 5 juillet, son pouvoir de sanction tel qu’il a été défini dans l’article 36-11 du code des postes des communications électroniques (CPCE). L’instance constitutionnelle estime, en effet, que le principe de séparation des pouvoirs d’instruction et de sanction n’est pas respecté. Cette décision du Conseil est applicable immédiatement à toutes les procédures en cours devant l’Arcep ainsi qu’à toutes les procédures non définitivement jugées.

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 29 avril dernier par Numéricâble, à qui l’Arcep avait infligé une sanction de 5 millions d’euros en décembre 2011, pour ne pas avoir appliqué dans les délais une de ses décisions. Celle-ci réglait un différend avec France Telecom portant sur l’installation de fibres optiques. Numéricable avait alors décidé de déposer un recours devant la cour d’Appel de Paris, qui, dans un arrêt de juin 2011, avait rejeté le recours formé par le groupe et l’avait condamné à payer à France Télécom la somme de 10.000 euros.

Remise en cause de l’organisation

Selon la loi qui vient d’être censurée, l’Arcep peut « sanctionner les manquements qu’elle constate, de la part des exploitants de réseaux ou des fournisseurs de services de communications électroniques ». Le problème, estime le Conseil constitutionnel, c’est que l’exercice des poursuites est confié de fait au directeur général de l’Arcep. Ce dernier est nommé par le président de l’Arcep. Il est placé sous son autorité et il assiste aux délibérations du régulateur.

Le Conseil en déduit que « la séparation au sein de l’Autorité entre, d’une part, les fonctions de poursuite et d’instruction des éventuels manquements et, d’autre part, les fonctions de jugement des mêmes manquements » n’est pas assurée. Par conséquent, il a décidé de censurer les douze premiers alinéas de la loi L36-11 du CPCE.

Ce jugement remet en question l’organisation interne de l’Arcep, que le législateur est prié de revoir en s’assurant, cette fois, que les fonctions de poursuite et d’instruction soient bien indépendantes des fonctions de jugement. On peut imaginer, par exemple, une redéfinition des liens hiérarchiques entre le directeur général et le président, ou la création d’un service autonome dédié aux sanctions.

Situation bancale

Reste à savoir dans combien de temps et de quelle manière cette modification se fera, car en attendant la situation est problématique. Contacté par 01net, l’Arcep explique qu’elle ouvre beaucoup de procédures à l’encontre des acteurs du marché, mais que très peu d’entre elles arrivent au stade de la sanction, qui est suffisamment dissuasive. Désormais, l’Arcep ne peut plus rien faire pour punir les manquements, mise à part une saisie du Conseil d’Etat pour des préjudices graves, une procédure très rarement utilisée. « C’est bancal. C’est comme un arbitre sans carton jaune ou carton rouge », souligne Jean-François Hernandez, responsable communication à l’Arcep.   

A cela se rajoute que le gouvernement ne porte pas l’Arcep dans son cœur. Depuis un certain temps, Arnaud Montebourg et Fleur Pellerin estiment que le gendarme des télécoms a trop de pouvoirs et qu’il faut lui en retirer. Ce sera peut-être, pour eux, l’occasion rêvée.

Lire aussi :

Bercy veut réduire les pouvoirs du gendarme des télécoms, le 15/03/2013

Source:

La décision du Conseil constitutionnel

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Gilbert Kallenborn, avec AFP