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L’anonymat aux oubliettes

Les bases de données sont comme des carafes à mouches. Chaque trace laissée par un internaute, un utilisateur de téléphone mobile, un détenteur de carte de…

Les bases de données sont comme des carafes à mouches. Chaque trace laissée par un internaute, un utilisateur de téléphone mobile, un détenteur de carte de crédit, ou par un banal immatriculé à la Sécurité sociale, est une petite parcelle reconnaissable de son identité, abandonnée pour une durée à géométrie variable. L’exploitation de ces bases, en général privées, n’est pas encore centralisée. Tout savoir sur quelqu’un requiert encore du ministère public une infrastructure qu’il n’a pas. Vercingétorix, dont on ne sait pratiquement rien, n’aurait plus grand-chose à cacher aux historiens s’il avait eu le comportement de l’actuel “homo data“, toujours prêt à donner sa position, consciemment ou non. Il n’y aurait pas non plus de polémique sur l’emplacement de la bataille d’Alésia. Et les bases de données, si elles avaient existé à l’époque, auraient donné le pedigree de chaque combattant, de l’acquittement ou non de sa redevance télé à son bilan de santé. Le multiple attentat aux Etats-Unis va sans doute donner un formidable coup d’accélérateur à cette ultra-connaissance de tout un chacun. Car les technologies sont là, il n’y a qu’à les mettre en musique.Gageons dans ces conditions que l’anonymat et le concept même de discrétion vont connaître, de leur côté, une forme d’engouement. Utiliser un mobile avec des cartes prépayées laisse peu de traces. Il existe des systèmes permettant de surfer sur internet sans décliner son identité. L’utilisation d’un pseudo sur le terminal d’un cyber-café ne donne encore que le profil de l’internaute anonyme moyen. Mais pour combien de temps ? Les événements récents peuvent déboucher sur une législation très stricte qui contraindrait à montrer patte blanche pour les actes modernes les plus ordinaires, comme téléphoner ou envoyer un e-mail. Une révolution qui passerait sans doute par l’usage obligatoire d’une carte d’identité, élément toujours absent des législations anglo-saxonnes. Si la carte d’identité , dotée d’une carte à puce à forte mémoire, devient un sésame pour le citoyen de demain, la liberté individuelle, dont le droit à l’anonymat ou la présomption d’innocence sont des valeurs fondatrices, a ses beaux jours derrière elle.

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Philippe Bonnet