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La notation des salariés : mécanisme d’évaluation ou de licenciement ?

Créé initialement pour permettre de juger des performances d’un salarié, le système d’évaluation, mis en place par des constructeurs informatiques, tend à devenir un outil de gestion des ressources humaines. Et, parfois, une preuve d’insuffisance professionnelle.

IBM a mis en ?”uvre depuis de nombreuses années un système d’évaluation du personnel, le PBC (Personal Business Commitment), destiné à apprécier le travail des salariés au regard des engagements de performance qu’ils prennent chaque année, lors de leur entretien individuel. Cette évaluation donne lieu à une notation qui peut influer sur la part variable de la rémunération à venir, mais aussi mener à un licenciement pour insuffisance professionnelle.Créé pour permettre à chacun de s’améliorer, ce système tend à devenir ?” dans la mesure où des consignes pour la notation sont données aux managers ?” un outil de gestion des ressources humaines au regard des licenciements à prévoir. Une enquête réalisée par Le Monde révèle, en effet, que des fourchettes de notation à respecter “sur des groupes de trois cents à quatre cents personnes” ont été fixées par la direction : la meilleure note devait concerner “de 10 à 15 %” des salariés, la note 2 “60 %”, la note 3, “de 25 à 30 %”, et la dernière note “de 2 à 5 %”.Or, si l’employeur est totalement libre d’évaluer ses salariés, la loi du 31 décembre 1992 exige que tout salarié soit informé “des méthodes et techniques d’évaluation mises en ?”uvre à son égard” (Code du travail, article L 121-7). Doit aussi être respecté le principe de proportionnalité, selon lequel “les méthodes et techniques d’évaluation des salariés doivent être pertinentes au regard de la finalité poursuivie”. La loi ne fixe pas les conditions dans lesquelles doit être effectuée l’information préalable du salarié. Toutefois, la rédaction d’un écrit est fortement recommandée.Dans le cas d’IBM, s’il s’avère qu’il existe un système de quotas des notations, l’évaluation risque d’être faussée, de même que le motif qui donnera lieu à un éventuel licenciement pour insuffisance professionnelle. Le bien-fondé du licenciement risque non seulement d’être remis en cause, mais aussi d’être analysé comme un licenciement économique déguisé. Une enquête de l’inspection du travail est en cours afin de vérifier si des quotas ont été préalablement fixés pour attribuer des mauvaises notes aux salariés ou si l’état de santé a pu être pris en compte.L’inspection du travail aura à contrôler s’il y a eu des pratiques discriminatoires, notamment en matière d’âge ou de santé. Ce qui est interdit par la récente loi du 16 novembre 2001, destinée à lutter contre les discriminations en matière d’emploi. De même, chez HP, des syndicats ont saisi le Tribunal de grande instance de Grenoble pour protester contre l’existence de tels quotas chez le constructeur informatique.* Avocat à la cour d’appel de Paris, spécialiste en droit de linformatique

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Alain Bensoussan*