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La fibre optique plastique, bientôt dans les réseaux locaux ?

Ses caractéristiques mécaniques et sa facilité de connexion font de la fibre optique plastique un média susceptible de se développer dans les réseaux locaux courte distance, qu’ils soient d’entreprise (LAN) ou domestiques.

” La première fibre optique plastique (FOP) a été fabriquée par Du Pont de Nemours, vers la fin des années 60. Le concept était intéressant : profiter des caractéristiques mécaniques des polymères et de leur mise en ?”uvre simple pour réaliser une fibre optique dont le c?”ur affiche des dimensions bien plus importantes (1 000 µm) que celles des fibres silice (9 µm). Du fait de la pureté insuffisante du matériau utilisé à l’époque, le polyméthacrylate de méthyle (PMMA), ou Plexiglas, l’atténuation se situait alors aux alentours de 1 000 dB/km.Au cours des années 80, il a été possible de réduire cette atténuation à la valeur intrinsèque du matériau : 125 dB/km pour une longueur d’onde de 650 nm. Mais, hormis pour certaines applications de niches, la fibre optique plastique n’avait que peu d’avantages à offrir.À la même époque, au Japon, le ministère de la Recherche anticipe un développement de cette technologie. Un consortium constitué de chimistes (Toray, Mitsubishi Rayon et Asahi Chemical), d’universitaires (laboratoire du Pr Koike, université de Keio) et d’utilisateurs potentiels (tels Sony et Matsushita) apporte alors une contribution majeure au développement industriel et à la commercialisation de fibres optiques plastiques à saut d’indice, composées en général d’un c?”ur de PMMA (980 µm) et d’une gaine de polymère fluoré, d’un indice de réfraction plus faible que celui du PMMA.

Une transmission record de 1 GHz

L’équipe du Pr Koike met ainsi au point la première fibre plastique à gradient d’indice. L’introduction de profils à gradient d’indice de réfraction dans le c?”ur permet d’augmenter considérablement la bande passante, comparativement à la fibre à saut d’indice. Pour de tels profils, l’indice de réfraction diminue continuellement en suivant, si possible, une loi parabolique depuis le centre du c?”ur jusqu’à la gaine. La lumière ne se propage plus en ligne droite, mais est constamment réfractée le long de l’axe de la fibre. En théorie, la dispersion de mode disparaît, et la bande passante augmente : les chercheurs japonais obtiennent une performance de transmission record de 1 GHz au kilomètre (valeur obtenue sur 50 m de fibre).

Anticiper l’évolution des standards

L’étape suivante a constitué à coupler le profil d’indice à un matériau de faible atténuation pour augmenter encore les performances. En 1995, le Pr Koike et son équipe, qui est maintenant propriétaire des principaux brevets de base pour la fabrication de FOP à gradient d’indice, et l’industriel Asahi Glass mettent au point ensemble une fibre optique plastique à gradient d’indice perfluorée, commercialisée aujourd’hui au Japon sous le nom de Lucina. Les performances de celle-ci sont impressionnantes : 1 Gbit/s sur 500 m à 850 nm, en 1998 ; 2,5 Gbit/s sur 300 m aux trois longueurs d’onde 650, 850 et 1 300 nm, en 1999 ; et 10 Gbit/s sur 100 m à 1 300 nm, en 2000. L’intérêt supplémentaire de cette fibre est la possibilité de réaliser des liaisons par multiplexage en longueurs d’onde sur un large domaine (de 650 à 1 300 nm). Ses caractéristiques mécaniques et sa facilité de connexion en font un média susceptible de se développer dans les applications réseaux locaux courte distance à hauts débits.Si l’on fait référence au Gigabit Ethernet, les applications LAN d’aujourd’hui demandent au câblage d’être toujours plus performant. Pour être considérée dans ce domaine, la fibre plastique doit anticiper l’évolution des standards. Les démonstrations système à 10 Gbit/s sur 100 m ont été présentées à l’automne 2000, ce qui la rendrait compatible avec le futur standard 10 Gigabit Ethernet. Ces performances sont susceptibles d’interpeller les intégrateurs de réseaux locaux. Au Japon, plusieurs immeubles sont maintenant câblés en FOP, supportant un réseau Gigabit Ethernet.

Des avantages multiples

Pour certaines architectures de réseau nécessitant de plus longues distances, le besoin d’anticiper l’augmentation des débits peut rendre la fibre plus attrayante. Pour ces applications, la fibre plastique doit fonctionner dans la première fenêtre de longueurs d’onde à 850 nm pour bénéficier d’une réduction des coûts d’équipements actifs, comme les lasers VCSEL, qui investissent les LAN. C’est pourquoi, seule la fibre à gradient d’indice perfluorée ayant une faible atténuation à 850 nm, mais aussi à 1 300 nm (seconde fenêtre), peut être une solution pour les réseaux locaux.Des démonstrations récentes (2,5 Gbit/s sur 550 m de Lucina à 850 nm) rendent cette fibre compatible avec les spécifications Gigabit Ethernet. Les avantages potentiels de la fibre plastique à gradient d’indice, par rapport à la fibre multimode silice, sont multiples. Dans la mesure où la fibre plastique ne nécessite pas un centrage parfait, puisqu’elle est constituée d’un c?”ur de dimension supérieure à 200 µm, la connexion est facilitée. Les bandes passantes peuvent, également, être plus importantes pour deux raisons principales : un profil parabolique quasi sans défaut et, en particulier, sans dépression centrale de l’indice de réfraction ; et un mélange de modes lié aux matériaux. Techniquement, la démonstration des atouts de cette fibre est concluante, mais il sera intéressant de comparer le compromis coût-performances, non pas de la fibre, mais du système, à celui des câbles de cuivre, fibre silice ou réseau sans fil. “* directeur du centre international de recherche de Nexans

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Gilles Widawski*