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Jacques Attali : ‘Dans dix ans, le PNB du continent Internet sera comparable à celui des Etats-Unis.’

Economiste reconnu et conseiller d’Etat, Jacques Attali nous expose sa vision de la Net-économie, dont la conquête s’apparente, selon lui, à celle d’un nouveau continent.

Le nouveau modèle économique engendré, baptisé ‘ fraternel ‘, repose sur les échanges et la gratuité des informations disponibles.Il exerce aussi, depuis fin 1998, la fonction de président du Conseil d’administration de PlaNet Finance. Cette association internationale a pour ambition d’utiliser Internet pour lutter contre la pauvreté.01net. : Nous abordons le 21e siècle munis d’un nouvel outil, Internet, qui promet, selon certains, de devenir le vecteur d’une économie totalement nouvelle : la Net-économie. S’agit-il d’un épiphénomène ou d’une rupture majeure qui bouleversera l’économie mondiale ? Jacques Attali : Je compare fréquemment la Net-économie à la conquête d’un nouveau continent. La conquête de ce septième continent est en effet semblable à celle de l’ouest américain : les pionniers de ce nouveau monde s’établissent sur une terre vaste et inconnue, y installent des moyens de transport et de communication, définissent des règles et créent des lois. Certains s’y enrichissent, rarement grâce à l’or qu’ils parviennent à trouver, mais plutôt grâce à leur rapidité d’implantation et aux promesses de fortune que bon nombre d’aventuriers prennent pour argent comptant.Comment expliquez-vous que cette nouvelle économie puisse reposer en grande partie sur la gratuité des services et des informations proposés à l’internaute ? Internet donne naissance à un modèle que je qualifie d’économie fraternelle et qui s’appuie sur la communication ou l’échange d’informations. Lorsque nous partageons des informations avec d’autres internautes, nous n’en perdons pas la possession et le droit d’utilisation. Au contraire, nous créons une communauté fraternelle dont la richesse trouve sa source dans le partage.A l’avenir, le Net appartiendra-t-il aux grandes entreprises ? Je ne crois pas à l’avenir des mastodontes sur le Net. Les grandes entreprises bureaucratiques font preuve d’une trop grande inertie pour s’adapter à un environnement qui impose rapidité et réactivité forte. La création de liens opportunistes entre des entreprises plus légères, capables de se réorganiser rapidement, constituera sans doute la clé du succès sur le continent virtuel. Les accords de partenariats seront légion entre sociétés spécialisées s’adressant à des niches spécifiques.L’accord entre AOL et Time Warner semble pourtant vous donner tort…L’acquisition de Time Warner par AOL est un exemple intéressant d’abolition des frontières entre les deux univers : le réel et le virtuel. Remarquons que cette opération s’est faite à la moitié de la valeur boursière d’AOL. A croire que le marché commence à douter de la valeur des entreprises qui détiennent aujourd’hui les clés de la Net-économie !Lassociation PlaNet Finance, que vous avez créée et dont vous êtes le président, veut utiliser Internet pour lutter contre la pauvreté grâce au développement du micro-crédit. Quelles ressources tirez-vous du réseau des réseaux ? Nous travaillons avec 7 000 banques, réparties dans le monde entier, et dont la mission est d’apporter des crédits sans garantie aux personnes les plus démunies pour leur offrir la possibilité de se créer un emploi.Internet peut-il contribuer à réduire les inégalités sociales ? Toute évolution technique creuse au départ des inégalités sociales. Ces dernières tendent à disparaître lorsque les technologies deviennent matures. Le monde virtuel n’échappe pas à la règle.

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Propos recueillis par Juliette Fauchet, Internet Professionnel