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Ils apportent Internet et le téléphone dans les zones sinistrées

L’ONG Télécoms Sans Frontières intervient en moins de 24 heures pour rétablir les communications chaque fois que survient une crise majeure. Avant même l’arrivée de nourriture ou de médicaments.

Vukovar, novembre 1991. Le Français Jean-François Cazenave se trouve en mission humanitaire en Croatie pour tenter de venir en aide aux populations qui fuient la ville tombée aux mains des Serbes, en pleine guerre de Yougoslavie. Inlassablement, la même scène se répète. « Les gens viennent me voir avec un morceau de papier sur lequel est inscrit un numéro de téléphone. Ils me demandent de prévenir leurs proches qu’ils sont vivants ». Jean-François prend alors conscience du besoin urgent de communiquer des personnes déplacées.

Aujourd’hui, les migrants qui parviennent jusqu’en Grèce ou en Turquie ont parfois des téléphones portables mais toujours besoin de réseau. Pour appeler leur famille et se tenir informés sur Internet. Télécoms Sans Frontières, l’ONG que notre humanitaire a fondé en 1998 lors de la crise du Kosovo, offre l’accès à des téléphones et à une connexion Wi-Fi grâce à des antennes satellites.

Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’organisation est efficace. Avec seulement vingt salariés, TSF réussit à intervenir sur toutes les crises majeures qui interviennent chaque année dans le monde, en moins de 24 heures. Il peut s’agir aussi bien d’une catastrophe naturelle que d’une zone de conflit. « Les télécommunications, c’est la première urgence. Avant l’eau, la nourriture ou les médicaments », martèle Jean-François Cazenave.

Des migrants qui se connectent en Serbie au réseau Wi-Fi déployé par TSF.
Télécoms Sans Frontière – Des migrants qui se connectent en Serbie au réseau Wi-Fi déployé par TSF.

L’ONG compte son siège à Pau et deux autres bureaux au Mexique et en Thaïlande. Elle commence généralement par dépêcher 3 à 4 personnes qui font un état des lieux et installent du matériel dans l’aéroport le plus proche de la zone affectée, permettant ainsi aux équipes de secours de s’organiser. L’équipe pénètre ensuite plus loin sur le territoire et s’étoffe, renforcée par des volontaires ou des partenaires locaux comme les scouts à Haïti que TSF a formé.

« Nous restons en moyenne entre 3 semaines et 2 mois. Exception faite de certaines zones de conflit comme la Syrie où nous sommes depuis 5 ans et auparavant de l’Irak et des Balkans où nous avons passé plusieurs années », détaille encore le président de TSF. Des interventions ont même déjà eu lieu en France, pendant la catastrophe d’AZF à Toulouse en 2001 ou encore lors de la tempête Klaus en 2009 qui avait dévasté les Landes.

TSF développe aussi des mission ponctuelles d'aide à l'éducation et de désenclavement numérique. Ici deux petites filles syriennes ont accès à une tablette avec une connexion Internet.
TSF – TSF développe aussi des mission ponctuelles d’aide à l’éducation et de désenclavement numérique. Ici deux petites filles syriennes ont accès à une tablette avec une connexion Internet.

Des kits d’urgence high-tech

Reconnu par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), soutenu financièrement au cas par cas par l’Union Européenne, TSF s’est imposé comme un acteur humanitaire majeur et unique en son genre.

Au fil des ans, l’ONG a tissé des liens forts avec des entreprises comme Vodafone, AT&T ou Inmarsat. L’un d’eux, Eutelsat, a d’ailleurs développé de véritables kits d’urgence standardisés qui sont aussi utilisés directement par l’UNHCR. « Il fallait mettre au point un matériel intuitif, simple et solide », nous explique Simon Gray, vice-président en charge des affaires humanitaires chez Eutelsat. Le mat, 140 euros, se déplie en quelques minutes. L’antenne satellite, environ 300 euros, est la même que celle utilisée par les abonnés de services internet par satellite. Des tutoriaux vidéo dans toutes les langues sont disponibles sur Youtube, ainsi que des applications mobiles. Il ne reste alors plus qu’à brancher un modem pour créer un réseau Wi-Fi.

L'un des kits mis au point par Eutelsat pour déployer rapidement du réseau.
TSF – L’un des kits mis au point par Eutelsat pour déployer rapidement du réseau.

Chaque antenne doit pouvoir supporter les connexions simultanées de plusieurs centaines de personnes. Comme la bande passante n’est pas illimitée, certains usages comme la vidéo peuvent être bridés. « L’idée, c’est que les gens puissent faire de la voix, utiliser des messageries de type Whatsapp et se connecter aux réseaux sociaux. Pas qu’ils aillent regarder des vidéos sur Youtube », précise le président de TSF. Dans les lieux de transit où 2000 personnes peuvent affluer et ne rester que quelques heures, l’organisation est amenée à renforcer la portée de ses antennes sur un périmètre réduit.

On compte aujourd’hui plus de 65 millions de personnes déplacées dans le monde, selon le Haut-commissariat de l’ONU pour les réfugiés. La situation est pire qu’en 1945. Télécoms Sans Frontières ne risque malheureusement pas de ralentir son activité.

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Amélie CHARNAY