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Euro : les PME doivent prévoir une marge de sécurité

Peu d’entreprises sont déjà totalement passées à l’euro. Beaucoup pensent avoir suffisamment préparé le terrain. La pratique montre que l’opération n’est pas toujours si aisée.

À dix-huit mois de l’échéance, rares sont les PME fin prêtes pour le passage à la monnaie unique. Cependant, d’après une étude menée par Sage et BVA fin 1999, 39 % d’entre elles déclaraient avoir un système de gestion compatible à l’euro. Un résultat qui explique l’optimisme de ceux qui imaginent que le basculement se résumera à un clic de souris à J – 1. Pour certaines entreprises, l’euro est donc déjà une réalité. Ainsi, le fabricant de matériels hydrauliques IR Montabert (du groupe Ingersoll-Rand) a sauté le pas dès le 1er janvier 1999.

Un PGI peut simplifier la migration

Cette société de la région lyonnaise réalise 80 % de son chiffre d’affaires à l’export, dont 40 % en Europe. “Le passage à l’euro fait donc partie intégrante de notre stratégie, explique Fabrice Kilfiger, son directeur financier. Ayant renouvelé notre système d’information en 1996, nous n’avions pas de frein technologique pour basculer dès 1999.”Chez Osiatis, une SSII parisienne de 800 personnes, on préfère encore attendre : “Rien ne presse. Nous ne sommes soumis à aucune pression, car nous n’avons pas de forte activité à l’échelle européenne”, argumente Bernard-Pierre Brunier, directeur administratif d’Osiatis.
Osiatis utilise notamment le module financier du PGI Générix, compatible euro et, à la demande de certains clients, la SSII peut établir des contrats en euros. “Quand nous basculerons toute notre comptabilité, il faudra aussi adapter notre système de gestion de la relation client Selligent, qui lui est étroitement lié “, signale Bernard-Pierre Brunier. Les répercussions du passage à l’euro ne touchent pas seulement la comptabilité de l’entreprise : plus celle-ci aura un système d’information hétérogène, plus le passage sera complexe. Sur ce point, les entreprises dotées d’un PGI global sont nettement privilégiées, comme IR Montabert qui utilise le progiciel MFG/Pro. Son système d’information repose sur une base de données unique. “Nous avons dupliqué la base pour faire des simulations. Le logiciel EuroToolkit, intégré à MFG/Pro, nous a ensuite permis de définir les champs à traduire en euros et de faire la conversion automatiquement. Cinq simulations ont été nécessaires pour corriger les erreurs avant de basculer.”Le projet a été mené à bien avec l’aide de la société de services TRW ISCS. Mais un PGI ne facilite pas toujours les choses, si l’on en croit Rhodia Performance Fibres, un fabricant de textiles en polyamide basé à Arras. Utilisant à la fois un système développé en interne et le PGI de JD Edwards, l’entreprise s’est heurtée fin 1998 à l’incompatibilité euro du progiciel américain. “Un PGI européen est beaucoup mieux adapté, conseille Dario Pessina, directeur informatique de Rhodia Performance Fibres. Par exemple, nous n’avons pas pu purger nos bases de données avant de faire la conversion : il a fallu convertir tout notre historique depuis 1996. Finalement, nous avons eu moins de problèmes avec notre système développé en interne.”


L’entreprise a fait appel à IBM Global Services pour l’assister, et ne tarit pas d’éloges quant au professionnalisme de ses consultants. “Il ne faut surtout pas hésiter à s’adresser à une société de conseil”, souligne Dario Pessina. Après un mois de migration, le siège français du fabricant est passé à une période transitoire de triangulation (conversion d’une devise à une autre en passant par l’euro), sorte de répétition générale avant le tout-euro. Rhodia Performance Fibres n’a pas encore changé son système de paie. Parce qu’elle touche directement la vie quotidienne des salariés, la paie est généralement la dernière partie concernée. “L’aspect humain ne doit pas être négligé lors de l’opération, renchérit Fabrice Kilfiger d’IR Montabert. Nous avons donné une formation générale à l’euro à tous les salariés, afin de les impliquer totalement. Leurs fiches de paie sont en euros depuis le premier semestre 1999.”Bernard-Pierre Brunier, d’Osiatis, pense en revanche que tout doit se faire d’un seul coup, pour éviter les erreurs dues aux conversions entre systèmes communicants.

Profiter des corrections éditeurs

Reste à savoir quand basculer. “C’est une véritable décision politique, assure Bernard-Pierre Brunier. Même si nous n’avons pas encore fixé de date, nous prévoyons un projet sur six mois. Le mieux serait de le faire au démarrage de l’année fiscale, pour ne pas avoir d’historique en francs sur le même bilan.”Un avis que conteste Dario Pessina : “On peut tout à fait basculer en cours d’année. Il faut juste être sûr de son système de conversion. Je conseillerais quand même aux entreprises dont le système n’est pas un grand standard d’attendre encore un peu, pour profiter des expériences des autres et des corrections des éditeurs.”Passer à l’euro ne semble pas nécessiter un investissement trop important : les analystes parlent de 2 à 3 % du chiffre d’affaires.

Le passage à l’euro n’est pas trop coûteux

IR Montabert a largement bénéficié de sa position de précurseur, puisque l’entreprise a fait office de bêta testeur pour EuroToolkit ! Le basculement ne lui a donc pratiquement rien coûté. Outre le coût d’une prestation de conseil, l’opération n’implique généralement pas de dépenses logicielles puisqu’elle coïncide avec le changement de version du système de l’entreprise. “On peut considérer un projet euro comme un plan de passage à l’an 2000, l’investissement matériel en moins”, estime le directeur administratif d’Osiatis. “Un basculement bien préparé peut être l’occasion de dépoussiérer les procédures de l’entreprise : tout doit être passé au crible, y compris des aspects annexes comme la gestion des notes de frais”, conclut Fabrice Kilfiger.

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JULIE DE MESLON