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En Russie, une nouvelle loi s’attaque au Web, mettant à mal le pseudonymat en ligne

Obligation pour les internautes de s’identifier avec leur vrai nom, mise en place de processus de vérification pour les plateformes… Le Kremlin vient d’adopter une nouvelle loi qui verrouille encore plus le Web russe.

L’étau du Kremlin sur Internet se resserre encore en Russie. Le 31 juillet dernier, une loi fédérale (406-FZ) a fait du Web russe un espace encore plus surveillé et verrouillé.  Approuvée par Vladimir Poutine, cette nouvelle législation comporte plusieurs dispositions qui menacent la liberté d’expression et le pseudonymat en ligne dans le pays.

À compter du 31 décembre 2023, les internautes devront passer par un système gouvernemental de vérification d’identité pour accéder aux plateformes en ligne, rapporte TorrentFreak, le 1ᵉʳ août dernier. Ces dernières devront elles-mêmes s’enregistrer pour figurer sur un registre contrôlé par l’administration russe. 

L’exclusion des acteurs étrangers

L’objectif, écrivent nos confrères, est de faire d’Internet un terrain hostile, où la liberté d’expression appartient au passé, et où il n’y a plus que trois choix : renoncer au Web, quitter purement et simplement la Russie, ou suivre les nouvelles consignes du gouvernement russe. En quoi consistent-elles ?

D’abord, certaines mesures sont destinées à exclure les acteurs étrangers. Pour s’inscrire sur les plateformes en ligne russes, les utilisateurs ne pourront plus utiliser des messageries étrangères comme Gmail. Côté services en ligne, ces derniers devront être détenus par des entités russes, contrôlées par un citoyen russe, qui n’a pas d’autres nationalités. Les mêmes règles s’appliquent aux médias en ligne et aux sites d’informations, qui, en plus, fonctionneront sous le contrôle ultime du gouvernement russe.

Des sociétés VPN « conformes »

Ces sociétés devront aussi mettre en place à compter de décembre 2023 un processus de vérification, approuvé par le gouvernement. Il s’agira de contrôler l’identité des nouveaux utilisateurs avant de leur donner accès au service en question – ce qui signifie concrètement la fin de l’anonymat, ou plutôt du pseudonymat en ligne dans le pays. 

Si les VPN ne sont pas formellement interdits en Russie, précisent nos confrères, les citoyens russes ne pourront en souscrire qu’auprès de « sociétés VPN conformes » – comprenez, enregistrées auprès de l’État russe. Celles qui ont été estampillées par le Kremlin sont-elles sûres ? Aucune preuve n’a été apportée sur une possible compromission, mais croire le contraire reviendrait à jouer à la roulette russe avec les autorités, souligne TorrentFreak.

Ce qui veut dire qu’en pratique, les internautes russes ne pourront plus passer par un VPN pour accéder à Instagram, YouTube et toutes les autres plateformes en ligne déjà bloquées en Russie. D’ailleurs, publier des informations sur les VPN, Tor ou des services similaires reste un délit – ce qui était déjà le cas avant cette loi. 

Une inscription sur un registre, des activités interdites…

Un autre volet concerne les sociétés d’hébergement et les plateformes en ligne, qui devront, en plus d’identifier leurs utilisateurs, obtenir pour certaines l’approbation de l’État russe. Elles pourraient avoir une plus grande responsabilité quant aux contenus publiés sur leurs sites. Elles devront dans tous les cas s’inscrire sur un registre et obtenir une autorisation pour proposer leur service dans le pays, à compter du 1ᵉʳ février 2024.

L’entité en charge de ce registre leur adressera alors une liste d’activités, de contenus et de comportements interdits. Les plateformes devront se conformer à cette liste, « éliminer les violations identifiées », et communiquer les résultats aux autorités. En cas négatif, elles seront exclues du registre et ne pourront donc plus exercer leur activité en Russie. 

Une censure qui s’est accélérée depuis le début de la guerre en Ukraine

Cette loi constitue un degré supplémentaire dans le durcissement des règles du jeu qui s’opère sur le numérique russe depuis les années 2010. Les autorités se sont d’abord attaquées aux infrastructures numériques russes, qui ont été mises sous contrôle. Elles se sont ensuite concentrées sur le contrôle des contenus diffusés sur le Web, en particulier depuis la guerre en Ukraine. En 2022, une réglementation a par exemple prévu qu’en cas de diffusion de « fausses nouvelles » – comprenez, toute critique de « l’opération spéciale » menée en Ukraine, le mot guerre étant interdit – les auteurs de la publication risquaient jusqu’à 15 ans de prison.

La mesure avait bloqué et bâillonné de nombreux médias et sites Web dans le pays, y compris les réseaux sociaux étrangers comme Twitter, Facebook ou encore la BBC. Certains s’étaient alors tournés vers les VPN et Tor pour contourner la censure. Ces étroites fenêtres, qui permettaient encore d’accéder à certains médias et plateformes étrangers, pourraient désormais se refermer.

À lire aussi : Les Russes se ruent sur les VPN pour échapper à la censure

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Source : TorrentFreak


Stéphanie Bascou
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