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Cinquante étudiants français partis goûter la high-tech chinoise

En novembre dernier, des élèves de l’Epitech ont débarqué à lUniversité de Dalian, en Chine. Objectif : validation du cursus et vie quotidienne à la chinoise.

‘ On a l’impression de se trouver au milieu d’un grand chantier ! ‘ Le sentiment de Rémy Saissy, 23 ans, étudiant à l’Epitech, est unanimement partagé par
tous les camarades de sa promotion. A l’image de la Chine, le campus de l’université de Dalian est en perpétuelle ébullition. Jour et nuit, des ouvriers travaillent à l’agrandir. Comme Rémy, ils sont une cinquantaine
d’élèves à avoir fait le grand saut, délaissant leur train-train pour une année de dépaysement complet dans l’Empire du Milieu.L’aventure a débuté au début de novembre dernier. L’école d’informatique française a passé un partenariat inédit avec l’université de Dalian (Institute of Light Industry), située au nord-est du pays, à une
heure et quart d’avion de Pékin. Pour la première fois, un programme d’études supérieures en informatique est enseigné dans une université chinoise.Les étudiants français suivent d’abord des cours de chinois intensifs pendant deux mois, avant de s’asseoir sur les mêmes bancs que les autochtones pour apprendre l’informatique. Dispensés en anglais, les cours
seront ceux de l’Epitech, revus à la sauce chinoise. A la fin de l’année, les élèves pourront valider leur quatrième année de formation d’ingénieur.Autre grande nouveauté : ils ne se voient pas regroupés entre étrangers sur le campus, mais partagent leurs chambres avec des Chinois. Du jamais vu ! L’an dernier, la Chine a accueilli un millier d’étudiants
français, venus suivre des cours de langue durant une courte période. Cette fois, ces jeunes garçons (une seule fille dans la promotion) n’imaginent pas se former à l’informatique sans compléter leur cursus par une solide expérience à
l’international.Pour cela, ils ont été sélectionnés sur leur capacité d’adaptation dans les stages. ‘ Je me vois bien travailler dans plusieurs pays, mais je ferai mon choix plus tard, explique Rémy Saissy. La Chine
m’a attiré parce qu’elle est en plein développement. Et puis, elle se trouve si loin de chez nous. C’est captivant de partir vers l’inconnu ! ‘
Quant à Xavier Bessouat, c’est sa mère
qui lui a transmis le virus de la Chine. ‘ J’avais déjà noué en France des relations d’amitié avec des Chinois dans le XIIIe et le XVIe arrondissements, raconte-t-il. Je
ne pouvais pas ne pas partir. ‘

Un comité d’accueil très chaleureux

Pourtant, le choix ne s’est pas révélé facile. Notamment en raison des idées reçues qui circulent sur la Chine et son régime politique. ‘ J’ai décidé de ne pas me fier à ce que l’on disait.
J’ai grandi entre deux cultures et, de toute façon, j’avais envie d’être confronté à ce choc culturel ‘
, explique Julien Oncelay, franco-turc. Tant mieux ! Car, dès leur arrivée, les élèves ont été
plongés dans le bain.Dalian est une grande ville industrielle, peu sympathique au premier abord, avec ses grands boulevards, ses édifices imposants et sa multitude d’immeubles en construction. En revanche, la découverte du campus constitue plutôt une
bonne surprise. A l’entrée de l’université, une grande banderole souhaite la bienvenue aux étudiants de l’Epitech.Et une autre ne passe pas inaperçue. On y lit : ‘ L’université des industries légères de Dalian souhaite que vous vous sentiez comme chez vous. ‘ Une trentaine
d’étudiants chinois forment un comité d’accueil dévoué. ‘ Ils sont aux petits soins pour nous, et ne veulent pas nous laisser porter les bagages, raconte, surpris, l’un des futurs ingénieurs. Leur accueil
chaleureux a tout de suite détendu l’atmosphère. ‘
Le décor reste simple, mais plutôt spacieux pour un campus : une petite cuisine, une salle d’eau, une chambre assez grande, avec un lit bien dur et une sorte de sac de riz en guise d’oreiller. Seul hic : les
toilettes à la turque et l’absence de douches. Devant l’étonnement des Français, les Chinois décident finalement d’en installer. Deux heures plus tard, elles seront en place !Le moment des présentations arrive. Les élèves font la connaissance de leurs tuteurs chinois (un ou deux par personne), qui vont les accompagner dans toutes leurs démarches. Ils les aident aussi à baragouiner leurs premiers mots de
mandarin. ‘ La communication s’est très vite installée, car ils ont tout de suite su briser la glace, assure Julien Oncelay. En plus, ils font preuve de beaucoup de patience lorsque nous sortons
notre dictionnaire. ‘

Communiquer, un vrai parcours du combattant

Il n’empêche, se faire comprendre représente souvent un véritable parcours du combattant. ‘ Avec un copain, nous avons mis quarante minutes à expliquer à nos tuteurs que nous voulions aller faire des
courses chez Carrefour ‘
, s’amuse Jérémy Joslin.Les Français sont vraiment admiratifs. Leurs colocataires déploient une énergie folle pour améliorer leur anglais afin de pouvoir établir le dialogue. ‘ Ils font des progrès fulgurants. Et le soir, quand on éteint
la lumière pour dormir, c’est encore de l’anglais dans leurs écouteurs ‘
, s’étonne Julien. De leurs chambres, ils accèdent à Internet, mais les problèmes de connexion et de censure demeurent
fréquents.Deux jours après leur arrivée, on déroule le tapis rouge aux élèves français. Pour cette journée d’accueil officielle, les directeurs des deux établissements ainsi que les grandes pointures du ministère de l’Education
chinois ont répondu à l’appel. A tour de rôle, ils font un discours devant les élèves attentifs, quoiqu’un peu sonnés par le décalage horaire.Les étudiants sont ensuite conviés à une exposition des réalisations du département design de l’université. Mais ils semblent davantage captivés par le défilé de mode des élèves de la branche stylisme, avec lesquels ils ne
manqueront pas de sympathiser quelques jours plus tard sur le campus. Le soir, pour fêter leur venue, ils sont conviés dans un restaurant local, autour d’une gigantesque table ronde dotée d’un plateau tournant, débordant de plats
traditionnels.Leur initiation aux coutumes locales doit être rapide : ici, on trinque à l’alcool de riz au début, au cours et à la fin des dîners. Du coup, la soirée dégénère assez rapidement en karaoké, le sport national ! Ce
soir-là, James Chen, le responsable qui accompagne la cinquantaine d’étudiants dans cette aventure, leur fait l’honneur d’une chanson populaire dans le pays. Elle exprime les désirs des Chinois de tisser des liens forts avec les
Français. Ces derniers se prêtent ensuite volontiers au jeu, sous l’?”il médusé, mais amusé, des serveurs.Le lendemain, changement d’ambiance avec les premiers cours de chinois, de 8 h à 22 h 40, avec quelques pauses. ‘ C’est un vrai défi, reconnaît Julien Oncelay. Les
différentes tonalités, la grammaire, tout cela s’avère très difficile. On préfère prendre ça comme un jeu pour ne pas se décourager ! ‘

Première difficulté, apprendre le mandarin

Au programme : la maîtrise des expressions courantes (‘ bonjour ‘, ‘ je m’appelle ‘, etc.). ‘ Nous sommes sortis du cours avec des premières notions
de chinois, raconte un élève. L’après-midi, nous avons étudié sur un logiciel spécialisé et communiqué avec le professeur à l’aide d’un casque et d’un micro. Il peut demander à un élève en particulier de répéter une
phrase. Nous pouvons alors entendre la voix de nos camarades. Ce qui rend la chose amusante. ‘
Fin novembre, un étudiant confiait sur son blog qu’il avait choisi de ne pas assister à tous les cours parce qu’il ne parvenait pas à assimiler autant de connaissances en une journée. En revanche, il s’est introduit
plusieurs fois dans les cours de français dispensés aux Chinois. Une façon de se réconforter. ‘ Nous ne sommes pas les seuls à en baver, et c’est plutôt rassurant ‘, écrit-il avec humour.Les étudiants ne sont sûrement pas au bout de leurs peines. Cependant, ils se montrent captivés par l’aventure qu’ils entreprennent, débordants d’énergie et soucieux de s’intégrer dans ce pays. La
personnalité de leur directeur, Nicolas Sadirac, y est pour beaucoup. Il n’hésite pas à endosser la tenue d’entraîneur pour stimuler ses troupes et accompagner leurs premiers pas en Chine.Mais sait aussi se montrer ferme sur certaines règles. Il a ainsi demandé avec insistance aux étudiants français de ne pas exclure leurs amis chinois de leurs soirées. Un détail qui veut tout dire. Vivement l’année prochaine
pour le bilan.

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Sandrine Chicaud