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Amanda Palmer fait une révolution musicale sur Kickstarter

Cette artiste américaine iconoclaste est parvenue à réunir plus de 900 000 dollars sur le Web pour distribuer son nouvel album, sous des dizaines de formats différents, à ses fans. Le crowdfunding, une seconde voie pour les musiciens ?

Plus de 900 000 dollars en moins d’un mois : voilà la somme récoltée par la musicienne Amanda Palmer via le site de crowdfunding Kickstarter. Fin avril, cette artiste prolifique, diva du groupe cabaret-punk Dresden Dolls et auteure d’un premier album solo salué par la critique, se lance dans une aventure un peu folle : vendre l’album qu’elle vient d’achever directement à ses fans, via Kickstarter, sans aucun intermédiaire.

Amanda Palmer présente son projet aux internautes : « voici le futur de la musique »

Cette plateforme de financement de projets créatifs par les internautes (similaire au site français Kiss Kiss Bank Bank) connaît un succès grandissant outre-Atlantique. Il s’est déjà illustré par quelques success stories, comme le financement massif de la Pebble Watch (plus de 10 millions de dollars) une montre intelligente à écran e-ink.

A notre connaissance, jamais un musicien n’avait cependant généré un tel engouement sur un site de ce genre. A tel point que même Amanda Palmer n’en revient pas : alors qu’elle avait pour objectif de réunir 100 000 $, elle en a accumulé huit fois plus et vise désormais le million de dollars avant le bouclage du financement, qui aura lieu jeudi. « Nous faisons quelque chose de bien plus important que ce que nous imaginions au départ. Cela nous dépasse, vous, moi et le disque. Nous sommes en train de montrer au monde ce qu’est le crowdfunding et ses possibilités et putain, c’est incroyable ! » écrit-elle dans un style très… personnel sur Kickstarter.

Une vente à la carte

Il faut dire qu’Amanda Palmer a des fans fidèles et qu’elle a su rondement mener son affaire, en permettant à chacun d’entre eux, quel que soit ses moyens, de participer. Chaque internaute peut en effet contribuer au financement de l’album à partir de 1 $ : contre cette somme, il reçoit simplement l’album en version numérique. A partir de 25 $, il reçoit une version limitée du CD, à 50 $ le vinyl et et une collection de bonus. Amanda Palmer s’est par ailleurs associée avec une trentaine d’artistes pour proposer un livre d’art inspiré par ses compositions aux plus généreux (à partir de 100 $).

Mais Palmer propose également des choses plus étonnantes lorsqu’on y met le prix : contre 300 €, elle offre par exemple des concerts privés, réservés aux internautes qui l’ont financée, dans plusieurs villes américaines et européennes. Encore plus fou : pour la somme rondelette de 5000 $, elle fait un concert… dans votre propre maison. Cette proposition a d’ailleurs connu un grand succès, puisqu’elle a séduit 35 personnes et est désormais « sold out ». Un internaute a par ailleurs déboursé par moins de 10 000 $ pour… partager un repas en tête à tête avec l’artiste déjantée !

Le fruit d’une rébellion contre l’industrie musicale

Avec ce projet, Amanda Palmer tient aussi une belle revanche contre son ancien label, Roadrunner Records, contre qui elle s’est battue afin de retrouver son indépendance… Un directeur artistique chez Roadrunner la trouvait en effet un peu trop enveloppée dans un de ses clips ! Un motif suffisant de divorce pour cet esprit libre : « Je suis désolée pour eux. Ils tentent de vendre des bouts de plastique dans un monde numérique, mais ils se trompent s’ils pensent qu’ils peuvent me transformer en Katy Perry ou Avril Lavigne pour tous les Walmarts du monde » disait-elle à l’époque. « Plutôt que de signer sur un label, prendre leur avance et m’asservir pour un contrat, j’ai eu l’argent moi-même ! Putain, j’ai utilisé Kickstarter ! » s’écrie-t-elle maintenant.  

Runs in the Family : Amanda Palmer à l’époque de Roadrunner 

« L’industrie de la musique a regardé les fans pendant des années comme une bande de consommateurs sans visage qui devaient être piégés pour donner leur argent, alors que je les vois comme des gens qui aiment l’art et veulent aider », écrit-elle sur son blog. Des fans à qui elle ne reproche même pas de pirater sa musique : « Je pense que la musique devrait être partagée. Tout le temps. Par tout le monde. Je pense que c’est une pure folie de rendre le partage de fichiers illégal. Et j’ai encouragé pendant mes années mes fans à graver, télécharger et partager toute ma musique. »

Gagner de l’argent sans maison de disque, en demandant l’aide des internautes : le futur de la musique ? Pour Amanda Palmer, sans doute… Mais peut-être pas pour tout le monde. Car il est clairement difficile pour un groupe débutant de financer un album de la sorte. Ce qu’avoue d’ailleurs bien volontiers notre artiste : « Si vous n’avez pas une petite base de fans au départ, le crowdfunding ne fonctionnera pas […] Vous devez faire un paquet de tonnes de spectacles, vous devez jouer gratuitement, beaucoup, vous devez vous asservir […] Personne ne fournira des fonds à un groupe dont il n’a rien à foutre. » Musiciens, à vos guitares !

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Eric le Bourlout