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2- LA VEILLE PROSPECTIVE

La veille prospective repose avant tout sur la personnalité du veilleur, qui doit être visionnaire, curieux, mais aussi autonome. Il doit savoir conserver une bonne dose de recul afin de ne pas succomber aux vogues médiatiques.

Trouver le visionnaire qui anticipera l’informatique de demain

Quel visage l’informatique arborera-t-elle dans trois ans ? Le CRM et le SCM seront-ils toujours de mise ? Les projets actuels des entreprises ne seront-ils pas déjà dépassés ? Autant de questions cruciales, qui exigent une certaine visibilité – parfois même une vision – sur le moyen terme, et auxquelles les responsables informatiques doivent trouver des réponses. Pour ce faire, il est essentiel de mettre en place une veille prospective. Cette appro- che fournit également des indications fort utiles pour planifier les achats et prévoir les déploiements ou les développements de nouveaux projets.
Au c?”ur de la démarche, la personnalité du veilleur. Outre sa curiosité naturelle et sa maîtrise de l’anglais, il doit faire preuve d’auto- nomie. En effet, à la différence des autres, dans sa phase initiale, la veille prospective ne s’accompagne pas de l’élaboration d’un plan de veille. Et aucune source d’information n’est recensée en amont. Au démarrage, il s’agit d’une veille tous azimuts. ‘ Notre cas, celui d’un laboratoire de recherche, est un peu particulier, commente Olivier Dedieu, chercheur pour l’Inria. Tout chercheur ou ingénieur doit effectuer une veille permanente sur son domaine. Et, en général, les échanges se font de façon assez informelle : auprès du distributeur de café, à la cantine, etc. ‘ Et, de fait, le partage d’informations se situe au c?”ur de la veille prospective. Des clubs de veille comme l’Atelier de BNP-Paribas ou le Réservoir sont des points de passage obligés. Là, le veilleur découvre de nouvelles technologies, et il peut les commenter à loisir avec d’autres technophiles. ‘ Le modèle de pépinière d’idées que propose Jean-Michel Billaut, le responsable de l’Atelier, est particulièrement intéressant. Il profite beaucoup à notre entreprise… mais tout autant à nos concurrents ‘, regrette cependant Jean-Pierre Le Goas, veilleur technologique à la Société Générale. Ainsi, les veilleurs prospectifs doivent échanger avec leurs pairs, avec des experts, etc. Mais ils doivent également lire beaucoup. Incontournable, un magazine comme Wired, par exemple, offre un panorama intéressant des nouvelles technologies informatiques. Plus techniques, les revues issues des grands laboratoires (ATR, Media Lab, Xerox Parc, etc. ) esquissent aussi le portrait de l’informatique de demain. Dans tous les cas, ils ne doivent aucunement se priver d’interroger l’auteur d’un article pour en savoir plus ou en débattre sur les forums de discussion.

Découvrir les nouvelles tendances

Pour ce travail de défrichage, le veilleur prospectif s’appuie sur des outils d’analyse de texte, comme Leximine, de Lexiquest. Ils facilitent la découverte de nouvelles tendances noyées dans une masse de données pour les confirmer par d’autres faits connexes. Une bonne capacité d’analyse et un bon esprit de synthèse se révèlent indispensables. ‘ Toute la difficulté de l’exercice se situe dans la justesse de l’interprétation des phénomènes, convient Jean-Pierre Le Goas. Il ne faut ni les sous-estimer ni les surestimer. ‘ Là encore, c’est la personnalité du veilleur qui fera la différence. L’idéal étant de trouver le savant dosage entre imagination et réalisme.

‘ J’ai l’espoir, plus que la conviction, que les systèmes d’information collaboratifs se développeront, confie Olivier Dedieu. Plusieurs signaux sont déjà visibles : l’engouement pour les communautés (eGroup, Yahoo!, Excite, etc. ), le partage de tableau blanc et l’usage de référentiels comme CVS (Concurrent Version System, référentiel en code source libre qui permet à plusieurs personnes de travailler sur le même document) dans le monde du code source libre. ‘ Et ce chercheur de l’Inria n’a pas plus la tête dans les étoiles qu’il ne s’enferme dans sa tour d’ivoire. Comme tout veilleur prospectif, il garde un pied dans l’entreprise, car c’est l’environnement professionnel qui fournit les lignes directrices des recherches. La veille doit réaliser la jonction entre les besoins actuels de l’entreprise et les der- niers développements en matière d’informatique. Une sorte d’aller-retour perpétuel entre le présent et l’avenir. . .
Une autre tactique consiste à surveiller les standards émergents pour dégager les tendances. A l’usage, un moyen simple d’évaluer le degré de maturité d’une nouvelle technologie. Enfin, il est parfois judicieux d’aller chercher dans le passé les réponses aux questions d’aujourd’hui. Pour preuve, l’actuel retour à la centralisation ou l’intérêt grandissant pour les terminaux et les clients allégés. Dans tous les cas, le veilleur prospectif se méfiera des engouements médiatiques, qui masquent souvent les grandes tendances de fond. Prendre du recul est la condition sine qua non de toute bonne analyse.

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Emmanuel Chanial