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SSD, un challenger pour le disque dur

Dépourvus de parties mécaniques et réputés performants, les SSD viennent chasser sur les terres des disques durs.

À sa sortie en 2007, l’Asus Eee PC 701 était original à plus d’un titre. Non seulement c’était l’un des tout premiers netbooks, mais c’était aussi l’un des tout premiers ordinateurs à destination du grand public à être équipé d’un SSD en lieu et place d’un disque dur. Le SSD est, à la manière des clés USB, une unité de stockage entièrement électronique, dont les éléments électromagnétiques sont remplacés par de la mémoire flash. Longtemps réservés au monde de l’informatique professionnelle, ces équipements sont aujourd’hui de plus en plus prisés du grand public : ils équipent non seulement les netbooks, mais aussi certains portables comme le Mac-Book Air. Et ils sont recherchés par les amateurs de performances, attirés par les gains de rapidité promis par les fabricants de SSD. Sont-ils pour autant une menace pour les disques durs ? Vous le verrez en lisant ces lignes, l’écart entre ces rivaux demeure au niveau des capacités de stockage et des prix. Et en ce qui concerne les performances des SSD, les gains ne sont réellement visibles que sur certains modèles. Le disque dur a donc encore de beaux jours devant lui… Les fabricants de disques semblent, toutefois, accorder de plus en plus d’attention aux SSD : Samsung propose déjà une gamme, Western Digital vient de racheter la société Silicon-Systems pour s’offrir des compétences dans ce domaine, et Seagate promet l’arrivée de SSD à son catalogue avant la fin de l’année.

Qu’est-ce qu’un SSD ?

SSD est le sigle de Solid State Drive, soit littéralement en français “ lecteur à l’état solide ”, ce qui n’a pas grand sens… à moins de connaître un peu le principe d’une telle unité de stockage. En effet, contrairement aux disques durs traditionnels, un SSD ne comporte aucune partie mécanique, aucun plateau, aucune tête de lecture : le stockage est intégralement électronique, réalisé, dans la majorité des cas, à l’aide de mémoire non volatile de type flash adossée à d’autres puces électroniques (notamment un contrôleur). Or, en anglais, tous les composants électroniques, tels que les puces et les microprocesseurs, sont rassemblés sous l’appellation “ solid state ”. La boucle est bouclée. On voit parfois passer l’expression “ disque SSD ” ou “ disque dur à mémoire flash ”, mais mieux vaut les bannir car elles sont trompeuses : il n’y a en effet pas le moindre disque dans un SSD !

À quoi ressemblent ces unités de stockage ?

Il existe plusieurs formes de SSD. Les plus courants actuellement reprennent les dimensions standards des disques durs pour PC de bureau ou pour portables, au format 2,5 ou 3,5 pouces : ils peuvent donc y être installés en remplacement (ou, dans certains cas, en complément) d’un disque traditionnel, sans recourir à des astuces sophistiquées. C’est bien simple, les pas de vis sont situés aux mêmes endroits que sur un disque dur standard ! De plus, il existe des adaptateurs bon marché pour installer les SSD 2,5 pouces (les mieux référencés sur Internet et dans les magasins spécialisés) dans une baie au format 3,5 pouces d’un PC de bureau. Sur le plan de leur interface de connexion, ils singent les disques durs en étant dotés des mêmes connecteurs, à savoir IDE (alias Parallel ATA ou Pata) ou Sata. Pour autant, ce ne sont pas les seuls formats de SSD actuellement proposés. Maxell et Transcend proposent par exemple des unités prenant la forme d’une grosse clé USB ou d’un disque externe. Plusieurs fabricants (parmi lesquels Crucial et Patriot) commercialisent aussi des modèles conçus pour les netbooks, sous forme d’une carte électronique sans boîtier de protection ? ce qui permet d’accroître la capacité de stockage souvent faible de ces petits portables. Il existe aussi des SSD au format ExpressCard, s’enfichant dans l’emplacement du même nom d’un ordinateur portable, ainsi que des cartes à installer sur un port PCI Express d’un PC de bureau. Plus exotique encore, quelques petites sociétés ont mis au point des boîtiers spéciaux mariant Flash et mémoire volatile DDR-SDRam !

Quelles capacités de stockage sont proposées ?

À l’heure actuelle, les SSD commercialisés restent très en deçà des disques durs. Les modèles disponibles actuellement en magasin ou sur les sites de vente en ligne affichent, au mieux, une capacité de 256 Go. Pas mal, certes, mais, en face, les plus gros disques durs atteignent 2 To ! Pour autant, l’écart entre disque et SSD devrait très vite se réduire. En décembre 2008, Toshiba a annoncé un SSD de 512 Go ; quelques semaines plus tard, le fabricant américain pure Silicon présentait son modèle au format 2,5 pouces d’une capacité de 1 To, qui devrait être commercialisé à l’automne prochain… Et la surenchère est venue d’une autre société américaine, Super Talent, qui a annoncé fin mars l’arrivée prochaine d’une gamme de SSD sur carte PCI Express pouvant accueillir jusqu’à 2 To de stockage ! En revanche, côté prix, l’écart est encore très important : les SSD de 256 Go ne se négocient pas à moins de 550 euros, tandis que le tout récent disque de 2 To Caviar Green de Western Digital est proposé à 300 euros. Gageons que les prix se tasseront petit à petit : les SSD d’entrée de gamme se trouvent aujourd’hui à moins de 100 euros pour une capacité de 32 Go.

Quelles technologies emploient-ils ?

Les SSD grand public stockent donc les données dans des puces de mémoire flash, ce qui leur permet de conserver les fichiers lorsque l’appareil qui les héberge n’est pas alimenté. Mais tous les modèles n’emploient pas le même type de flash. Deux types de mémoire sont utilisés par les constructeurs : SLC (Single-Level Cell) et MLC (Multi-Level Cell). Leur nom fait référence au mode de fonctionnement de la mémoire flash où les données sont stockées dans des cellules au sein d’une matrice. La flash de type SLC ne stocke qu’un bit dans chaque cellule, tandis que la MLC peut en stocker plusieurs (actuellement 2 ou 4 bits). Si la SLC ne fonctionne qu’avec deux états par cellule (1 pour effacé et 0 pour programmé), la MLC 2 bits peut prendre quatre états par cellule : 11 lorsque la cellule est vide ou effacée, 10 lorsqu’elle est écrite aux deux tiers, 01 lorsqu’elle est écrite au tiers et 00 lorsqu’elle est écrite entièrement (on dit qu’elle est “ programmée ”).

SLC, MLC : leurs avantages et leurs inconvénients

La flash SLC, dont la production est bien maîtrisée, est considérée comme moins sujette aux erreurs de par son fonctionnement plus simple. De plus, les SSD qui l’emploient mettent en œuvre des procédés pour limiter l’usure des cellules (le nombre de cycles de lecture/écriture par cellule est en effet estimé à 100 000 pour la SLC), procédés qui ne sont pas toujours utilisés dans la flash MLC. La SLC est aussi considérée comme plus rapide que la MLC ? même si, en pratique, ce n’est pas toujours le cas (vous pourrez le constater un peu plus loin dans cet article). Revers de la médaille, les SSD SLC sont plus chers que les MLC et sont très souvent destinés au marché de l’informatique professionnelle. La Flash MLC, quant à elle, met en œuvre des processus de correction d’erreur qui, sur certains modèles, grèvent nettement les performances. Et le nombre de cycles de lecture/écriture est 10 fois plus faible que celui de la SLC (10 000). Mais elle est moins chère à produire et permet d’atteindre des capacités de stockage confortables.

Quelles performances peut-on en attendre ?

Pour de nombreux amateurs de technologie, le SSD est vu comme une véritable “ bombe de stockage ”, l’élément idéal pour donner un bon coup d’accélérateur à son ordinateur, qu’il soit portable ou de bureau. Ce n’est pas faux, mais la réalité est sensiblement plus contrastée.Nous avons demandé à notre laboratoire de tester les performances de quelques modèles signés Imation, Intel, Memoright et Transcend. Nous les avons comparés à deux disques durs traditionnels de Westen Digital, un VelociRaptor (un des modèles les plus rapides du marché) et un Caviar de 640 Go. Bilan ? Le SSD X25-M d’Intel a souvent devancé tous ses adversaires, avec des pointes à 243 Mo/s en lecture (160 Mo/s en moyenne) et une vitesse moyenne d’écriture sous FC-test (un logiciel de mesure qui simule une utilisation réelle) d’environ 74 Mo/s, similaire à celle du VelociRaptor. Et pourtant, c’est un SSD à flash MLC ! Sauf qu’Intel a développé une architecture multicanal qui s’avère vraiment efficace. D’une manière générale, les temps d’accès sont extrêmement faibles ? 0,1 à 0,2 ms, contre 7,3 ms pour le VelociRaptor. Quant aux différences de rapidité entre SLC et MLC, il serait difficile de trancher avec un si petit nombre de modèles testés. En mettant de côté l’ovni d’Intel, les SLC semblent prendre l’avantage en écriture, tandis qu’en lecture les MLC paraissent plus performants.Nous avons aussi demandé à notre laboratoire de réaliser une mesure de la rapidité de démarrage de Windows Vista. Et là, surprise : que le SSD soit de type SLC ou MLC, la durée est similaire d’une unité à une autre, autour de 45 secondes. C’est cependant un peu mieux qu’avec un VelociRaptor, avec lequel le démarrage de l’OS atteint 55 secondes sur la même configuration de test.

Les systèmes d’exploitation et les logiciels sont-ils optimisés pour les SSD ?

Rares sont ceux qui le sont vraiment. Parmi les systèmes d’exploitation, ni Windows XP ni Windows Vista ne sont véritablement adaptés à ce type d’unité de stockage et ont tendance à les user rapidement du fait d’accès disques répétés. Cela peut cependant s’améliorer à l’aide de quelques modifications de paramètres système ? la même remarque est d’ailleurs valable pour Linux. Microsoft a promis que Windows 7 serait plus tendre avec les SSD, en diminuant par exemple les opérations d’écriture et en optimisant les effacements.

Quelle est la durée de vie des SSD ?

C’est une question piège, car les SSD sont des produits émergents. Certains fabricants annoncent des chiffres de MTBF (Mean Time Before Failure, autrement dit la durée d’utilisation avant une panne) de 1 à 1,2 million d’heures. Ce qui semble extravagant, puisque cela représente… plus d’une centaine d’années ! En revanche, comme nous vous l’indiquions précédemment, le nombre de cycles de lecture/écriture pour une cellule est limité ; il est de l’ordre de 100 000 cycles pour la flash SLC, et de seulement 10 000 pour la MLC. C’est pour cela que de plus en plus de fabricants ont recours à des procédés pour contourner ces limitations propres à la flash, avec en particulier le système du “ wear levelling ”. En résumé, il s’agit de répartir les écritures de données de manière à ce que toutes les zones disponibles de la mémoire flash soient équitablement utilisées, en évitant par exemple de réécrire immédiatement dans des cellules qui viennent d’être effacées.

Ont-ils d’autres avantages ?

Oui. D’abord, ils sont plus légers que les disques traditionnels : autour de 80 g pour un SSD au format 2,5 pouces, environ 150 g pour un disque de même taille. Ces quelques grammes en moins sont appréciables pour les machines légères comme les netbooks. Ensuite, ils consomment peu. À titre indicatif, lors de notre récent comparatif de netbooks (voir l’OI n° 211 de décembre 2008), nous avions testé deux Aspire One d’Acer quasiment identiques, l’un avec un SSD de 8 Go, l’autre avec un disque dur de 120 Go. Résultat : la consommation en charge du premier était de 19 W, contre 24 W pour le deuxième. Et l’autonomie était meilleure sur le modèle à SSD (2 h 09 contre 1 h 52). Enfin, comme ils sont dépourvus de parties mécaniques, les SSD fonctionnent dans un silence total, contrairement aux disques durs qu’on peut entendre occasionnellement “ gratter ” ou tourner.

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Christophe Gauthier