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Plongée au coeur d’Internet, cinq chiffres pour tout savoir des câbles sous-marins

Ces lignes en fibres optiques longues de milliers de kilomètres enfouies au fond des mers permettent d’interconnecter tous les pays de la planète. Bienvenue au sein de la toile qui sous-tend le Web !

Lorsque vous vous connectez à Internet, les données que vous envoyez et recevez peuvent traverser de multiples pays sans que vous ne vous en rendiez compte. La majeure partie d’entre elles ne passe pas par le satellite ou des antennes radio mais par des infrastructures en fibre optique très discrètes, voire totalement invisibles aux yeux du grand public. Les plus critiques parcourent les océans, afin de relier les continents les uns aux autres. Voici cinq chiffres qui révèlent la démesure de ce réseau.

1) 95 % des communications mondiales

Téléphone, SMS, mail, 95% des communications mondiales transiteraient par des câbles sous-marins en fibre optique d’après Camille Morel, auteure de l’article Le réseau mondial de câbles sous-marins : une toile dans la Toile. Ces mêmes câbles sous-marins assureraient 99% des flux intercontinentaux. Le tracé de ce réseau est ancien, reprenant les mêmes routes empruntées au XIXe siècle par le télégraphe, puis au XXe siècle par le téléphone. Depuis les années 80, les câbles en fibre optique ont pris le relai et sous-tendent maintenant le trafic Internet.

La carte mondiale du réseau de câbles sous-marins en fibre optique.
TeleGeography – La carte mondiale du réseau de câbles sous-marins en fibre optique.

2) 448 câbles sous-marins en service dans le monde

Le nombre de câbles sous-marins augmente en permanence. Selon le dernier relevé effectué par la société de conseils en télécommunications TeleGeography, ils seraient actuellement 448 et s’étendraient sur 1,2 million de kilomètres. Parmi eux, on peut citer les célèbres câbles transatlantiques. Ils sont particulièrement critiques puisqu’ils interconnectent les Etats-Unis, pourvoyeur des grandes plates-formes Web des GAFAM, avec des millions d’Européens très connectés.
Certaines zones du globe longtemps isolées ou mal desservies commencent enfin à voir déployer des câbles sous-marins spécifiques. A l’image du câble Kanawa d’Orange qui va relier la Guyane à la Martinique et dont les premiers jalons ont été posés cet été.

Les câbles sous-marins dans lesquels Google a investi.
Google – Les câbles sous-marins dans lesquels Google a investi.

3) 50% des investissements réalisés par les GAFAM

Après plusieurs dizaines d’années très cycliques, le marché semble ne plus connaître la crise. « La croissance est soutenue, alimentée par les demandes des GAFAM qui réalisent aujourd’hui 50% des investissements », nous précise Paul Gabla, vice-président marketing et vente d’Alcatel Submarine Networks. Google est l’un des plus actifs, investissant dans pas moins de 13 câbles sous-marins via des consortiums. Il va aussi déployer son premier câble privé baptisé Curie à destination du Chili. Il en projette un autre, Dunant, entre la France et les Etats-Unis.

4) Jusqu’à 700 millions d’euros pour un câble

Il existe différents types de câbles. « Les petits mesurent entre 50 et 100 km et coûtent autour de 30 millions d’euros », nous explique Jean-Luc Vuillemin, directeur général d’Orange International Networks. Ils sont dits non répétés, c’est-à-dire qu’ils ne comportent pas de répéteurs pour amplifier le signal. Les plus longs s’étendent sur plusieurs milliers, voire dizaines de milliers de km et sont dits répétés. Ils disposent de répéteurs tous les 80 à 100 km.

Un répéteur.
ASN – Un répéteur.

Ces derniers peuvent coûter jusqu’à 600 ou 700 millions d’euros. Le diamètre de la fibre optique n’excède généralement pas 1,4 cm de diamètre et est recouverte d’une épaisse armature métallique d’environ 10 cm de diamètre.

De la fibre optique.
ASN – De la fibre optique.

« Les câbles sont la plupart du temps ensouillés (enfouis sous le sol marin entre 1 et 3 mètres de profondeur), sauf dans les zones sismiques où ils risqueraient d’être rompus par les secousses », nous indique Paul Gabla d’ASN. Ils peuvent être commandités par des acteurs privés qui en ont seuls l’usage ou qui louent une partie de leurs capacités. Mais aussi par des consortiums rassemblant différents acteurs copropriétaires. On compte quatre principaux fournisseurs de câbles sous-marins dans le monde : TE SubCom, issu de l’opérateur américain historique AT&T, ASN (Alcatel Submarine Networks) ancien joyau français d’Alcatel, Nec Submarine System au Japon et, enfin le Chinois Huawei Marine. Au niveau de la pose et de la maintenance, ASN est là encore l’un des leaders comme Orange Marine, filiale du groupe français Orange.

Un navire câblier d'Orange.
Orange – Un navire câblier d’Orange.

5) Vers des capacités de 12 Pétabit/s

La durée de vie théorique des câbles est de 25 ans. Ils sont parfois remplacés avant cette durée lorsqu’ils sont considérés comme obsolètes technologiquement et que l’on veut doper leurs capacités. Les câbles transatlantiques ont ainsi déjà tous été renouvelés depuis leur pose à la fin des années 80. Face au défi posé par l’explosion du trafic internet mondial, la solution ne sera pas forcément de multiplier sans limite le nombre de câble mais plutôt celui des paires à l’intérieur. « Un câble peut contenir aujourd’hui entre 4 et 8 paires de fibres. Le câble Dunant de Google est prévu pour en contenir 12, par exemple », nous rapporte Jean-Luc Vuillemin. Ce qui devrait lui permettre d’atteindre une capacité située entre 26 et 30 Tbit/s. « On parle déjà à l’avenir de câbles embarquant 16 paires de fibres et de capacités de 12 Pétabit/s d’ici 2024 », évoque encore le porte-parole d’Orange.

Ces câbles sous-marins restent très vulnérables aux ancres des chalutiers. On compte ainsi des incidents tous les jours dans le monde. Certains seraient même dus à des sabotages commandités par des Etats. On a vu aussi récemment des navires câbliers se faire accoster par des pirates. Sans parler des écoutes que certains pays n’hésitent pas à réaliser près de ces infrastructures. Mais ça, c’est une autre histoire… géopolitique.

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Amélie CHARNAY