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Petit état des lieux de la téléphonie mobile en France (4/4)

Six semaines environ après le lancement du quatrième opérateur français, Free Mobile, la rédaction se livre à une rapide analyse sur ce qui était, ce qui a changé et ce qu’il reste à faire dans le domaine de la téléphonie mobile en France.

Le prix « plancher » du tout illimité déjà atteint ?

Comme nous l’a fait remarquer un professionnel du secteur, que ce soit il y a quelques années pour la voix ou, plus récemment, pour la Data : « En matière d’infrastructure réseau, ce ne sont pas tant les antennes qui coûtent cher, ce sont surtout les opérations de génie civil qui en découlent : le grutage, la pose de dalle de béton, l’intégration paysagère… En revanche, une fois que les antennes sont déployées, c’est tout bénéfice ou presque car, pour la 3G, hormis l’entretien, la plupart des améliorations se font de manière logicielle ». Les baisses de tarifs pratiquées par les trois « gros » sur les offres low cost depuis l’arrivée du « trublion » – et frôlant parfois les 50 % avec des prestations supérieures au passé – sont la preuve que, oui, définitivement, les opérateurs de téléphonie mobile ont réalisé d’énormes marges pendant cette longue période.

Néanmoins, les opérateurs « historiques » – SFR en tête – avancent que l’évolution des infrastructures, en particulier, pour le futur réseau très haut débit baptisé 4G requiert de très lourds investissements. Ils émettent donc des doutes quant à la viabilité du modèle économique de Free Mobile et du financement par le quatrième opérateur des réseaux 3G et 4G. Dans de récentes déclarations, Stéphane Richard indique qu’Orange ne baissera pas le prix de ses abonnements classiques, mettant également en avant que la qualité de service de ses forfaits classiques et surtout pros ne sera jamais comparable avec celle des offres Free mobile qu’il qualifie de low cost.

Ce n’est pas l’avis de Cédric Hélias, le directeur du réseau de distribution de l’enseigne The Phone House qui nous confiait attendre une baisse des tarifs des forfaits classiques de Bouygues Telecom. Et toujours selon ses dires : « si Bouygues Telecom baisse les prix, il y a toutes les chances pour que SFR et Orange lui emboîtent le pas… C’est en tout cas ce que l’on a quasiment observé à chaque fois dans le passé. »

Ce que tout le monde – analystes, opérateurs, distributeurs, fabricants de téléphones et équipementiers – s’accorde à dire, c’est que la demande d’Internet mobile va exploser. Car, à terme, hormis les grosses stations de travail, tous les appareils (smartphones, tablettes et même PC portables) ont vocation à être utilisé qu’en situation de mobilité : dans un même lieu (appartement, bureau…) ou lors de véritables déplacements (automobiles, transports en commun…). La seconde quasi-certitude, c’est que les prix des forfaits mobiles « tout illimité » ne baisseront pas plus bas.

 

Quel Internet mobile pour demain ?

Alors, une nouvelle fois, qui croire ? Il est certain que Free a plus que surpris ces concurrents avec ses tarifs extrêmement agressifs et Xavier Niel semble assez serein sur son modèle économique. A ce sujet, on doute que le quatrième entrant vise les gros profits dès les premiers mois ou même les premières années : il n’en a pas les moyens. C’est certainement ce qui explique la multiplication et la virulence des « réactions » des trois opérateurs historiques. Leurs marges bénéficiaires vont être réduites, d’autant que la crise n’arrange rien.

Si l’on dresse le « classement » des opérateurs, du moins lésé au plus menacé par l’arrivée de Free Mobile, on obtient à peu près cela : Orange, bien qu’étant certainement l’opérateur qui déplore la plus grosse perte d’abonnés, caracole bien évidemment en tête avec sa solide base de clients (tous services confondus) et la manne financière que va lui apporter l’accord d’itinérance. Viennent ensuite SFR et enfin Bouygues qui a peut-être le plus à craindre. La carte à jouer de ces trois opérateurs se situe certainement au niveau des offres quadruple play avec mobile subventionné. C’est, en effet, sur ce type de forfaits « tout-en-un » que les opérateurs sont le plus compétitifs, Free n’ayant pas de réelle stratégie en la matière. Et pour le consommateur, le fait de tout regrouper chez le même opérateur est perçu comme un gage de confort et de sérénité. Chez The Phone House, ce type d’offres a fait un bond de 10 à 30 % des ventes. Enfin, la catégorie qui souffre certainement le plus de l’arrivée de Free est sans conteste celle des petits opérateurs virtuels qui louent les infrastructures aux trois gros du secteur. Leur marge de profit est de plus en plus réduite et certains jettent même l’éponge.

Qui voudra encore, d’ici quelques mois, payer 50, 60, 80 € – ou même bien plus – pour un forfait mobile « tout illimité » ? Vu que l’on relève déjà des forfaits quadruple play à des tarifs avoisinant la soixantaine d’euros, il y aura certainement peu de monde au portillon… Hormis peut-être les professionnels qui ont des impératifs de connexion permanente à des débits très élevés où qu’ils se trouvent… et qui sont prêts à payer le prix fort. A ce sujet, Xavier Niel a promis de dévoiler prochainement des offres Data Only (c’est-à-dire sans usage de la voix).

L’avenir de l’Internet mobile se dessine peut-être ainsi, avec un réseau accessible de trois manières. D’abord, au moyen de forfaits facturés au prix fort et permettant de surfer avec de gros débits et une connexion quel que soit le lieu. Ensuite, on disposerait de forfaits plus abordables – sur le modèle de ce que commercialise Free actuellement – proposant des vitesses « classiques ». Enfin, une dernière catégorie d’offres pour le coup réellement low cost pour des séances de surf très ponctuelles avec une bande passante limitée. Un tel modèle, même s’il est critiquable sur de nombreux points, semble en tout cas le meilleur compromis pour que tous les acteurs présents continuent de travailler ensemble… Et que tout un chacun puisse finalement accéder au Web.

 

Lire la première, la deuxième et la troisième parties de notre dossier.

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Benjamin Gourdet