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Marc Giget : « Nous vivons une période de poussée technologique considérable »

Le meilleur des nouvelles technologies serait à venir. L’économiste et spécialiste de l’innovation Marc Giget table sur des créations massives d’emploi d’ici 20 ans.

Marc Giget est docteur en économie et Président de l’European Institute for Creative Strategies and Innovation. Depuis 1999, il anime les conférences des Mardis de l’Innovation à la Sorbonne. Diffusé dans une centaine de pays, c’est le cours sur l’innovation le plus suivi dans le monde.

01net : Vivons-nous une période d’innovation particulièrement intense ?

Marc Giget : Nous connaissons actuellement un paradoxe. Nous vivons une période de poussée technologique considérable : on a dépassé les 12 millions de chercheurs dans le monde, deux millions de brevets déposés l’an dernier et 110 000 revues scientifiques. Mais dans le même temps, les progrès des nouvelles technologies ont des conséquences redoutables sur les emplois en les détruisant massivement. Comme les caissières de supermarché qui sont remplacées progressivement par des systèmes de paiements automatiques.

Mais les nouvelles technologies créent aussi des emplois….

Pour le moment, les pertes ne sont pas compensées par des créations de postes en volume suffisant. Comme on a pu le connaître avec l’arrivée de l’électricité ou du téléphone, par exemple. C’est donc une période assez tendue parce que nous sommes au cœur du phénomène de destruction créative.

Comment envisagez-vous notre société en 2033 ?

Il y a deux scénarios possibles pour les années à venir. Certains ont une vision désespérée du monde : nous allons connaître une croissance sans emplois. Car la révolution technologique actuelle touche pour la première fois l’intelligence humaine. Traduction, intelligence artificielle, interprétation, analyse, mémoire, logique, stockage, classement, évaluation, les machines se substituent progressivement à l’intelligence humaine. Que va-t-on faire des gens ? Quelle formation leur donner ? Peut-être que ne subsisteront que des emplois très qualifiés et d’autres sous-qualifiés comme dans le modèle d’Amazon, une société qui utilise beaucoup de manutentionnaires.

Et le deuxième scénario ?

L’hypothèse optimiste, que je partage, voudrait que cela aille mieux d’ici vingt ans. On a étudié une douzaine de périodes d’innovations qui ont eu lieu par le passé. Cela permet de modéliser la phase suivante : la crise passera et nous connaîtrons de nouveau une phase créative et massive d’emplois. Pour le moment la révolution touche surtout les technologies de l’information. Demain elle aura gagné l’énergie, les transports, le vivant (biologie moléculaire et génétique), les matériaux. L’enjeu est d’améliorer ces technologies et de mailler ses progrès avec les métiers de la santé, de l’éducation et des transports pour arriver à délivrer des applications vraiment utiles. La gadgétisation technologique n’a aucun intérêt. Les gens ne vont pas tomber en pamoison pace que leur frigo discute avec leur four ! Ils ne vont pas non plus descendre dans la rue pour réclamer du haut débit. En revanche, ils sont prêts à manifester pour la santé, l’éducation, le travail. Nous disposons d’une multitude de briques technologiques hyper efficaces mais maintenant il faut construire une nouvelle cathédrale. Les premiers progrès réalisés sont porteurs d’espoir : aujourd’hui on fait marcher des paralytiques avec des exosquelettes ! C’est une véritable révolution copernicienne !

Pour en savoir plus sur le futur des nouvelles technologies, voir le numéro 778 du magazine 01net avec un dossier spécial “Comment nous vivrons dans 20 ans” :

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Amélie Charnay