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L’international, une affaire d’affiliés

Chez Verisign, on se passe volontiers de filiales pour privilégier un réseau de partenaires chargés de commercialiser les produits dans le monde entier. Une stratégie qui atteint vite ses limites.

”  Notre stratégie de marque est celle d’un ingrédient. Comme Intel est l’ingrédient des PC puissants et Nutrasweet celui des boissons sans sucre, nous sommes l’ingrédient de la confiance. À l’international, nous avons laissé nos affiliés bâtir leur marque en nous positionnant comme un ingrédient à leur service”, s’enthousiasme Anil Pereira, Executive Vice President et directeur général de Verisign. Avec un réseau de 48 affiliés, dont une quarantaine sont réellement opérationnels, Verisign a réussi le pari de vendre ses services à l’international sans pour autant s’engager dans une stratégie de filialisation à outrance qui a fait per- dre leur chemise à bien des start-up.

Une stratégie qui paie peu

Les affiliés ont représenté près du quart du chiffre d’affaires de la division entreprise au troisième trimestre 2001, soit un peu moins d’un huitième des revenus globaux. Contractuellement, 30 à 50 % du chiffre d’affaires de chacun des partenaires remonte directement vers Verisign. Typiquement, la société accorde une licence de sa plateforme de PKI et livre les spécifications de ses architectures à ses affiliés. Elle perçoit ensuite des royalties pour chaque certificat électronique émis. Car Verisign n’entretient de liens capitalistiques qu’avec dix de ses affiliés.

Le catalyseur Certplus

Parmi ces happy few, le Français Certplus, dont le capital est détenu par France Telecom, Gemplus, EADS et Verisign à hauteur de 15 %. Créée en novembre 1998, cette société a choisi dès le départ de se concentrer sur une activité 100 % entreprises, sur les certificats électroniques et la PKI, en ne revendant que des produits Verisign. Toutefois, Certplus n’a pas connu le succès de BT Ignite, autre affilié européen de la société de Mountain View. Aujourd’hui, le Français produit peu, et ne reverse que des royalties minimales sur l’utilisation de la plateforme. Une situation qui n’a, a priori, rien d’extraordinaire, puisque qu’elle concerne 80 % des affiliés. Seule une dizaine d’entre eux dépassent les quotas planchers fixés au siège de Mountain View.

Sac de n?”uds à la française

Mais “le contrat entre Verisign et Certplus arrive à échéance en 2003-2004”, note Sami Baghdadi, nouveau PDG de Certplus en rappelant que, de son côté, il n’a pas intérêt à changer de technolo-gie, car cela lui demanderait de réinvestir énormément en apprentissage sur une autre plateforme. La position de Veri- sign n’est pas très claire. Aux États-Unis, certains laissent entendre que si la situation capitalistique de Certplus était plus simple, le business avancerait plus vite. Quitte à suggérer sans le dire que, confrontées à un besoin de liquidités, France Telecom et Gemplus n’ont qu’à revendre leurs participations. Un scénario qui a cependant ses limites, car Certplus gère la sécurité de Cyber Comm.Or les banques de l’Hexagone, à l’origine de cette solution de commerce électronique, ne laisseraient pour rien au monde leur technologie échapper au contrôle d’un groupe franco-français.
Comme si elle n’était pas suffisamment compliquée, la situation devient carrément insondable avec l’entrée en jeu d’Euro 909. Basée au Danemark et disposant d’un bureau en France, cette société a été rachetée par Verisign au cours de l’été 2001. L’Américain écope donc d’un affilié dont les résultats ne l’enthousiasment visiblement pas et d’une filiale française cantonnée à la revente de noms de domaine et de services liés à la protection des marques sur le réseau des réseaux. C’est sans doute le seul point positif de la situation : Certplus a toujours refusé de vendre des adresses internet. La filiale et l’affilié ne se marchent donc pas sur les pieds. Mais peut-être la France, comme à son habitude, a-t-elle servi de révélateur de la stratégie d’affiliés de Verisign ? En l’occurrence, le cas Certplus démontrerait qu’il n’est pas possible pour une société réalisant près d’un milliard de dollars de chiffre d’affaires de laisser un réseau d’affiliés qu’elle ne contrôle pas gérer son image sur le Vieux Continent. “Avec Certplus, Verisign s’est payé un poste d’observation à moindre coût. De son côté, [la société française] a gagné son image de marque grâce à Verisign”, reconnaît Sami Baghdadi, tout en répétant à l’envi que l’évolution des relations entre Verisign et son affilié hexagonal devront être “gagnan- tes pour tous les deux”. Qui aurait osé penser le contraire ?

L’heure de la reprise en mains

Quoi qu’il en soit, la société de Stratton Sclavos a visiblement décidé de prendre le taureau par les cornes en Europe. Une campagne de communication vantant la marque Verisign, et non plus celle de ses affiliés, devrait démarrer entre avril et mai. Et un centre technique et commercial a été ouvert en Suisse, à Genève…

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Alain Steinmann, envoyé spécial à Mountain View