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Les télécoms, entre marché et régulation

L’UMTS est une technologie émergente et non éprouvée. Des incertitudes demeurent quant à la nature et à l’économie de ses services.

Nous assistons, depuis le début du mois de mai, aux prémices d’un retour à des conditions normales d’exploitation et de financement des grands opérateurs européens de télécommunications. Qu’il s’agisse des marchés ou de la puissance publique, les signes encourageants se multiplient. Deux exemples récents sont particulièrement significatifs.Le premier émane du numéro 1 mondial de téléphonie mobile, Vodafone. Bien que parfaitement saine sur le plan financier, la société souffre aujourd’hui de deux maux : un niveau d’endettement très important et des engagements très significatifs dans l’UMTS (qu’il s’agisse du coût des licences ou encore du déploiement du réseau). Or Vodafone a pu lever 3,5 milliards de livres sterling (5,7 milliards d’euros) sur les marchés, le mois dernier, sans difficulté particulière. D’autres signes devraient suivre. Ainsi, British Telecom, également surendetté, semble avoir décidé d’une thérapie de choc. Après avoir changé de président, l’opérateur pourrait aussi changer son périmètre d’intervention. Le néerlandais KPN devrait être amené à des conclusions voisines. Le second exemple est donné par les pouvoirs publics : face à la situation complexe de l’UMTS, le régulateur allemand vient de décider d’alléger les contraintes des opérateurs, notamment sur la mutualisation des réseaux.

La nécessaire mutualisation

La mise en commun, sous conditions, des réseaux de téléphonie mobile de troisième génération est en cours en Suède et en Allemagne. Le principe devrait largement être repris en Europe, et notamment en France, où l’ART (Autorité de régulation des télécommunications) envisage une révision des critères d’attribution des licences de boucle locale radio (BLR). Il faudra bien, enfin, relancer l’appel à candidatures pour les deux licences UMTS qui n’ont pas été attribuées.La crise des valeurs des télécommunications s’est largement cristallisée autour du ” syndrome UMTS ” : les autorités publiques européennes, fascinées par les niveaux de valorisation atteints fin 1999 par les valeurs internet et les opérateurs télécoms, auraient créé un impôt extrêmement lourd, gagé sur une technologie émergente et non éprouvée. L’explication n’est pas totalement fausse. Mais elle est incomplète. L’équité invite à rappeler que les marchés financiers avaient, à l’époque, enflé de manière déraisonnable et, d’autre part, que, dans nombre de pays européens, les licences UMTS ont été attribuées au terme d’enchères auxquelles les opérateurs ont librement choisi de participer… Enfin, des incertitudes demeurent quant à la nature et à l’économie des services UMTS.C’est donc bien un cercle vicieux qui s’est établi en 2000. Le retour à une situation saine en ce qui concerne le financement des opérateurs de télécommunications implique qu’un cercle vertueux soit rapidement rétabli. Ceci passe par la réalisation conjointe de deux conditions : d’une part, que les opérateurs prouvent que leurs business plans sont raisonnables (c’est-à-dire qu’ils envisagent de vrais abonnés et des profits récurrents…) et qu’ils sont en train d’être mis en ?”uvre ; d’autre part, que les pouvoirs publics et les régulateurs fassent preuve d’une politique pragmatique. C’est sur ces seules bases que reviendront la confiance des marchés de capitaux et celle des banques, c’est-à-dire les conditions d’un développement durable des opérateurs de télécommunications.* Directeur média et télécoms, BNP-Paribas.

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Philippe-Olivier Rousseau*