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Les neurones au vestiaire

Nous étions tranquillement installés dans une bulle de bonheur économique sans précédent : chômage en baisse, 35 heures, indicateurs au vert à tous les étages… Et voilà que tout est chamboulé. Bien fait pour vous ! C’est de votre faute.

Après avoir symbolisé la réussite technologique européenne, Nokia et Ericsson, deux grands du GSM, licencient à tour de bras. Idem pour quantité de fabricants de PC américains. La faute aux mathématiques, expliquent les spécialistes du marketing : quand les gens possèdent un portable ou un ordinateur, voyez-vous, il est rare qu’ils en veuillent deux.La limite du marché est donc celle de la population solvable. Une fois qu’on l’a saturée, il est temps d’inventer autre chose1. Ainsi, l’économie continue à tourner, le Nasdaq à grimper, et tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes riches.Au lieu de quoi, le consommateur boude ! Il ne veut pas changer son GSM pour un WAP, son Pentium III pour un Pentium IV ; il refuse de plaquer sa supérette pour acheter sur Internet, sous prétexte qu’il n’est pas si bête ou qu’il n’en a pas besoin (ce qui revient souvent au même). Et voilà, les valeurs technologiques se cassent la figure, la croissance est en panne, les fonds de pensions périclitent.Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, vous m’avez compris : l’intelligence, la clairvoyance, le bon sens du consommateur le mènent tout droit à la ruine. Au nom de la nouvelle économie qui me nourrit, je vous prie donc instamment de déposer vos neurones à la consigne et de vous remettre à consommer sans discernement pour faire tourner les usines.Considérez ça comme un investissement ! Vous serez plus con, c’est vrai, mais aussi plus riche. Est-ce que le sacrifice de quelques cellules grises n’en vaut pas la peine ? Réfléchissez.1.
Autre solution : donner à d’autres populations les moyens d’acheter. Mais le profit est à plus long terme, donc il nintéresse pas Wall Street.

Prochaine chronique le 21 avril 2001

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Pierre Grumberg