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Les ballons de haute altitude sont enfin prêts à connecter le monde

Ballons ou drones stratosphériques, les plate-formes de haute altitude viennent d’obtenir suffisamment de bande passante pour ouvrir un nouveau marché. Elles pourront apporter une connectivité locale et saisonnière.

A l’automne 2017, le géant américain Alphabet avait dépêché une trentaine de ballons connectés Loon au-dessus de l’île de Porto Rico dévastée par l’ouragan Maria. Ils avaient contribué à rétablir les communications téléphoniques.

Ballons ou drones stratosphériques, on appelle ces dispositifs des plates-formes de haute altitude ou plus brièvement des HAPS (High Altitude Pseudo-Satellites). Leur heure de gloire est peut-être enfin arrivée après dix ans d’expérimentations diverses.
La conférence mondiale des radiocommunications, qui s’est terminée fin novembre à Charm el-Cheikh, leur a accordé des bandes de fréquences supplémentaires. Ils vont désormais disposer de suffisamment de bande passante pour assurer leur commercialisation.

Des débits variables

Les HAPS seront reliés à Internet via des stations de base du réseau mobile ou des satellites. Ils pourront évoluer seul ou à plusieurs. Les utilisateurs ne s’y connecteront pas directement et passeront par des opérateurs pour en bénéficier. Car ces dispositifs viendront alimenter les réseaux télécom déjà existants de manière transparente pour le client final ou offriront un service ponctuel à louer, en se servant d’une antenne de réception terrestre.

Pour ce qui est des performances techniques, tout dépendra de la distance entre les HAPS et les personnes connectées.

« La latence sera bien plus faible qu’avec un satellite, les HAPS se situant à seulement 20 km au-dessus de la Terre. Cette altitude-là leur permet aussi de se situer au-dessus du couloir aérien et de subir très peu de vent », nous explique Yves Piriou, l’expert en radiocommunications qui gère le dossier à l’Agence nationale des Fréquences (ANFR).
« Pour ce qui est du débit, dans un rayon de 50 km au sol, il sera possible d’obtenir du Haut ou Très Haut Débit. Mais à 500 km, ce sera plutôt de l’ordre du Mbit/s », ajoute-t-il.

Des compléments aux satellites

Les GAFA s’échinent depuis plusieurs années à prouver l’utilité des plates-formes de haute altitude avec plus ou moins de bonheur. On se souvient, par exemple, des difficultés techniques rencontrées par Facebook qui l’ont amené à abandonner son projet de drone Aquila.
Pour les industriels du monde entier, ils représentent une opportunité de créer un nouveau segment de marché. Car ces engins vont jouer un rôle complémentaire des offres terrestres et surtout satellitaires. Ils coûteront moins chers qu’un satellite, seront plus souples à déployer, plus propres, tout en pouvant assurer une fonction de relai de télécommunications. C’est la raison pour laquelle on les appelle aussi des « pseudolites » ou « pseudosatellites ».

Les HAPS fonctionnent à l’énergie solaire et pourront rester à peu près stationnaires durant plusieurs mois. Ils pourraient être utilisés pour apporter de la couverture de façon localisée et saisonnière, lors d’une catastrophe naturelle, comme dans le cas de Loon, ou d’un événement exceptionnel type concert ou rencontre sportive.  

Le Stratobus de Thales Alenia Space.
Thales Alenia Space. – Le Stratobus de Thales Alenia Space.

Des missions d’observation et de surveillance

Mais les ONG, les gouvernements et les militaires pourront aussi s’en servir pour des missions d’observation ou de surveillance.

« Ils seraient particulièrement adaptés pour surveiller des feux de forêts en Amazonie, par exemple », suggère Yves Piriou.

Le HAPS Stratobus de Thales Alenia Space ambitionne ainsi de détecter les navires qui se livreraient à des dégazages sauvages en mer ou la présence de bateaux pirates. Ce dirigeable aux allures de Zeppelin fait 100 mètres de long. Le premier démonstrateur doit voler d’ici 2022 avec une commercialisation à l’horizon 2023.

Un autre poids lourd européen, Airbus, se positionne sur ce créneau avec Zephyr, un drone aux ailes immenses. Avec son envergure de 25 mètres, il a déjà réussi un vol continu de presque un mois exclusivement à l’énergie solaire. Un record. S’il a connu des mésaventures en s’écrasant en Australie au printemps dernier, le projet est loin d’être menacé.

Le Zephyr d'Airbus lors d'un vol.
Airbus – Le Zephyr d’Airbus lors d’un vol.

Airbus et Thales ne sont pas les seuls à se positionner. Lockheed Martin ou encore Boeing investissent le créneau.

« Il est aussi possible que des projets mis en sommeil soient réactivés partout avec ces bandes de fréquences supplémentaires », prévient Yves Piriou.

Mais il reste encore quelques défis à relever. Maintenant que les batteries solaire semblent suffisamment endurantes et que les techniques de navigation ont été perfectionnées, il va falloir passer des prototypes à la taille finale plus imposante pour ces dispositifs.

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Amélie Charnay