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L’EDI à la croisée des chemins

L’EDI a enfin fait son entrée dans le XXIe siècle ! Annoncé par les places de marché internet comme mort à la fin des années 90, ce réseau, né il y a 10 ans déjà, prend aujourd’hui sa revanche via le web et XML.

Balayés, d’un point de vue technique, par les technologies IP, les grands réseaux EDI (X.25, messageries X.400…) sont pourtant toujours présents. Ces RVA se sont même développés, alors que les places de marché, qui les donnaient pour morts dès la fin des années 90,se trouvent aujourd’hui en difficulté.Considérées comme longues à mettre en place et coûteuses à développer, les architectures EDI (échange de données informatisées) cristallisaient tous les reproches que l’on pouvait faire, à l’époque, à l’informatique centralisée, réservée aux seules grandes entreprises, contrairement aux technologies internet, aisées à mettre en ?”uvre et rapides à déployer…Nul doute, alors, que la vague XML (eXtensible Markup Language) allait balayer des années de travail en quelques mois… Jean-Marc Dufour, président de NYC, explique l’échec de l’EDI auprès des petites entreprises. “Nous commercialisons nos solutions EDI depuis 1996. Aujourd’hui, nous constatons que la rentabilité n’est pas au rendez-vous pour les petites structures. La prestation de service que cela implique n’est pas supportable pour un client dont les flux de données restent faibles.”Les entreprises qui avaient mis en place des solutions EDI, typiquement les enseignes de la grande distribution ou des industriels de tout premier plan, n’ont pas opté pour une politique de terre brûlée. Certes, la grande majorité d’entre elles a joué le jeu des places de marché, généralement en participant à des alliances sectorielles de type Covisint (automobile), CPGmarket et Transora (agroalimentaire) ou WWRE (distribution). Mais aujourd’hui encore, aucune n’a brusquement basculé ses flux EDI au profit des marketplaces, en dépit des annonces faites.

Le retard de la normalisation XML profite aux EDI

Paradoxalement, l’effort déjà consenti par les grands donneurs d’ordres sur les réseaux EDI a sauvé les RVA. L’argent, et surtout le temps consacré à mettre en place les liaisons avec leurs principaux partenaires, ont plaidé en leur faveur. De plus, les technologies les plus modernes mettent du temps à se diffuser dans le monde des entreprises. Tous les fournisseurs ne disposent pas forcément de la dernière version de l’ERP actuellement leader du marché, par exemple.Quant aux nouveaux standards XML, leur processus de normalisation a pris du retard, malgré la mobilisation des éditeurs américains (réunis au sein du consortium Oasis) et des Nations unies (au travers de l’UN/CEFACT) autour d’ebXML (electronic business XML). Chargé du développement des normes Edifact, l’EWG soutient les travaux consacrés à XML afin, notamment, de pérenniser les acquis de l’EDI dans les composants ebXML. Mais force est de constater que, même en s’appuyant sur les standards des services web (UDDI, Soap de Microsoft), le niveau de complexité de l’architecture proposée devient si élevé qu’il risque d’être plus compliqué, pour une petite entreprise, d’adhérer à une communauté ebXML qu’à un réseau EDI !“Aujourd’hui, aucune des nouvelles normes se révèle stable; elles doivent encore évoluer. Garantie de bon acheminement du message, store&forward et traçabilité constituent autant de fonctions à ajouter à ces nouvelles normes pour les faire tendre vers X.400 ! Nous basculerons uniquement lorsque cela deviendra intéressant pour nos clients”, ironise André Vital, directeur général de Seres.

XML, de la menace à l’alliance

Pendant ce temps, les RVA ne sont pas restés passifs. Considéré d’abord comme une menace, internet devient par la suite un allié de taille. Ainsi, le langage XML, largement utilisé sur le Net, est de plus en plus employé comme vecteur d’information sur les plates-formes de ces revendeurs ; en outre, l’accès à celles-ci s’effectue fréquemment au moyen de réseaux IP, éventuellement sécurisés par VPN (Virtual Private Network ou réseau privé virtuel).Alors que la messagerie internet (SMTP) se révèle inadaptée ?” en natif ?” aux échanges e-business (manque de fonctions de notarisation des échanges), l’émergence des solutions webEDI autorise enfin les petites entreprises à accéder à leurs réseaux à peu de frais. Plus besoin de station EDI ou de boîte aux lettres X.400 ; un simple navigateur suffit pour consulter ses commandes ou générer ses factures. L’EFI, ou EDI light, est né.Pour Maël Barraud, p-dg du prestataire de service Influe, la baisse des coûts est drastique. “Auparavant, il fallait investir de 7 à 12 000 ? pour se connecter à un réseau EDI. Aujourd’hui, la mutualisation des moyens permet d’abaisser ce coût à 500/600 ?. Le problème des 80 % de fournisseurs qui ne pouvaient participer se résout !” André Vital de Seres confirme le succès de ces nouvelles plates-formes : “Nous disposons d’une offre internet depuis 1998. Nous n’avons pas attendu les services web ! Aujourd’hui, les petits fournisseurs représentent 80 % de nos clients : 13 000 de nos 15 000 utilisateurs accèdent à notre plate-forme via le web.”Christophe Malaterre, directeur de SupplyOn France (place de marché des équipementiers automobiles), recadre le rôle du webEDI, qui “n’a pas remplacé l’EDI traditionnel. Le webEDI vise à mettre de l’EDI là où il n’y en avait pas, là où l’on utilise encore le papier et les télécopies. Le déploiement auprès des fournisseurs de rang 2 requiert toutefois beaucoup de temps et d’énergie. Il ne s’agit pas tellement d’un problème lié aux coûts des logiciels, mais plutôt à la formation et à l’assistance aux fournisseurs.”À terme, les RVA seront-ils supplantés par les marketplaces ? Rien n’est moins sûr, car les premiers parviennent enfin à élargir leur marché, alors que les seconds sont pris à la gorge par les investisseurs financiers. Selon Christophe Malaterre, de SupplyOn France, le débat n’est pas tranché. “Il n’est pas du tout certain que les places de marché du type de SupplyOn se substituent un jour aux RVA. Certes, l’intérêt d’une plate-forme telle que SupplyOn, déployée par les donneurs d’ordres, réside dans la possibilité de mutualiser les coûts, notamment ceux de licences, de maintenance et d’hébergement.”

EDI ou XML, même combat ?

Si, jusqu’à l’avènement d’ebXML, le domaine du transactionnel pur semble voué à EDI, le langage XML complète avantageusement ce dernier là où il a échoué, c’est-à-dire dans les applications collaboratives. “Les entreprises qui recourent à l’EDI ont fait le plus facile ! Dans 75 % des cas, seule la commande est mise en place, affirme Maël Barraud d’Influe. Le plus difficile reste à faire. Les projets de GPA et de CPFR peinent à démarrer dans les sociétés. Autre axe de développement : la conception de produits. Mais là encore, nous sommes sur le plat de la courbe.”Christophe Malaterre joue sur la complémentarité avec les réseaux EDI. “Nous travaillons avec les éditeurs d’ERP sur des solutions collaboratives. Objectif : visualiser d’autres types d’informations que celles véhiculées par les réseaux EDI. Ces projets se révèlent toutefois longs à mettre en ?”uvre ; les concepts prototypes sur lesquels nous travaillons actuellement n’aboutiront en effet qu’en 2002/2003, pour une commercialisation ultérieure. Avant de proposer ce type de services, il convient de disposer de réelles mesures de retour sur investissement opérationnelles et de ne pas s’appuyer uniquement sur des arguments de discours marketing.”La recherche de fournisseurs est l’une de ces applications collaboratives où les choses bougent, notamment en France, à l’image du projet eannet.fr. Dévoilé récemment par Gencod-EAN France, il a été développé et est hébergé par… Seres. Son directeur, André Vital, souligne ce paradoxe. “Du point de vue technologique, lorsque le CGI a publié ses standards en septembre 2001, ces derniers devaient révolutionner le monde… Hormis quelques pilotes, le service EANnet que nous avons développé pour Gencod-EAN France représente la première implémentation mondiale des nouveaux standards.”

Le collaboratif au service du XML

Paradoxalement, l’essor de XML ne passe pas uniquement par son adoption dans les transactions interentreprises. Ce sont les projets de refonte de l’informatique interne qui autorisent, ensuite, l’échange de données avec les partenaires en XML “L’arrivée de XML sur le marché a montré que les besoins n’avaient pas changé. Les échanges de web à web représentent la vraie cible de ce langage. De tous nos clients, Lapeyre semble le plus en avance en matière de stratégie XML, à l’occasion de la refonte de son architecture interne. Sur de tels projets, XML et les services web facilitent la mise en place d’outils collaboratifs : préciser la taille d’une fenêtre pour une commande sur mesure, échanger des données techniques… Pour ce type d’échange, XML et Soap prennent d’ailleurs le relais de l’EDI classique. Toutefois, ce dernier reste la solution idéale pour des échanges de type commande/facture, d’autant que la marge de développement avec l’EDI reste importante”, souligne Jean-Marc Dufour, de NYC.Si des pilotes ebXML fonctionnent déjà, ils sont surtout promus par des entreprises ou des groupements pionniers. La société lambda reste frileuse à investir dans des technologies encore peu stabilisées, comme le constate Jean-Marc Dufour de NYC : “ebXML représente un enjeu commercial pour les entreprises. Mais en ce moment, leur priorité reste la rentabilité des projets. La technologie pour la technologie ne constitue plus un enjeu pour nos clients.”

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Alain Clapaud