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L’éclatement de la famille TMT

Les valeurs des technologies, médias et télécoms connaissent des évolutions boursières divergentes. Désormais, courtiers et analystes américains privilégient une approche par métier.

Tirer les enseignements des attentats du 11 septembre dans le domaine des TMT est un véritable casse-tête. Le premier constat possible consiste à voir dans cette folie meurtrière le coup de grâce pour un secteur qui avait perdu de sa superbe depuis plus d’un an. Du 10 septembre en clôture au 12 octobre au soir, malgré la bonne tenue globale du marché, le cours de l’action Amazon a abandonné 6,25 %, Doubleclick a perdu 1,3 %, Microsoft chuté de 2,1 %, Compaq reculé de 4,2 %, Disney dégringolé de 16,8 %, et AT & T, le leader américain des télécoms, se languissait toujours à moins de 20 dollars (22 euros). Autrement dit, du monde de l’internet à celui des logiciels jusqu’au télécoms en passant par les médias et l’industrie du PC, on touche le fond.

La fin d’une illusion ?

Mais un constat inverse est aussi possible : les TMT ont bien résisté au choc du 11 septembre. Le secteur et la plupart de ses composantes ont même regagné du terrain. C’est vrai du monde de l’internet (Yahoo a repris en un mois près de 3 %), de l’industrie du PC (Dell est remonté de 6,9 %) comme des télécoms (Verizon a ga-gné 3,15 %). Et malgré l’effondrement de leurs ressources publicitaires, les géants américains de la communication s’en tirent dignement : AOL -Time Warner n’a cédé que 3,5 %, et Viacom 2,7 %. En réalité, ces constats n’ont pas plus de sens l’un que l’autre. La seule observation qui vaille est plus brutale : les TMT, en tant que catégorie homogène, n’existent plus. Les événements du 11 septembre ont confirmé un phénomène perceptible depuis des mois : l’évolution boursière des valeurs de la TMT est devenue à ce point divergente que leur “chapeau” commun a perdu toute signification.Le sigle a toujours été plus en vogue en Europe qu’aux États-Unis. Mais il est évident que les investisseurs ont été fondés à regrouper les entreprises de ces secteurs à la fin des années 1990. Acheter des TMT de manière indiscriminée, c’était prendre sa place à bord du train qui allait propulser le Nasdaq composite à un plus de 5048 points en mars 2000. De la même manière, la dégringolade aura été uniforme au cours des mois qui ont suivi, sinon dans son ampleur, du moins dans les facteurs qui l’ont précipité : coup d’arrêt brutal à la croissance économique, survalorisation boursière injustifiable, surinvestissement, rentabilité insuffisante étaient autant de caractéristiques presque omniprésentes.Le cru 2001 a consacré la “discrimination” d’un secteur à l’autre, souvent même d’une entreprise à l’autre, en fonction de circonstances particulières. Si Compaq baisse en Bourse alors que Dell continue de grimper, c’est que l’on s’inquiète du projet de mariage du premier avec Hewlett-Packard. Si le titre Disney chute plus vite que celui de ses concurrents AOL-Time Warner et Viacom, c’est que le groupe de Michael Eisner s’est mal remis du désengagement massif et précipité de l’un de ses actionnaires de référence, la famille Bass, contrainte de céder près de 7 % du capital de Disney pour honorer une dette.

Un impact mineur

De ce point de vue, l’impact du 11 septembre apparaît assez marginal. Pour l’essentiel, les cartes avaient été redistribuées au cours des 12 à 18 mois précédents. Depuis le 1er janvier, traders et analystes raisonnent de moins en moins par secteur. Ils passent les valeurs, ou à défaut les métiers, au peigne fin. L’industrie des télé- coms fournit un bon exemple. Les opérateurs AT &T et Verizon se sont bien tenus. En revanche, c’est la débâcle chez les équipementiers. Nortel Networks a supprimé plus de la moitié de son effectif en un an. Depuis le 1er janvier, les quatre cinquièmes de sa valeur en Bourse sont partis en fumée. Si l’approche est plus fine, cela n’empêche pas le résultat d’être sanglant. La capitalisation d’Amazon a fondu presque de moitié depuis le début 2001 (moins de 3 milliards de dollars). Le cours de l’action Yahoo a été divisé par trois. Le titre EMC a démarré 2001 à 66,5 dollars, et il en valait moins de 13 à la mi-octobre.Deux semaines après les attentats, les analystes de la banque d’affaires new-yorkaise Bear Stearns ont publié une brochure intitulée “Perspectives d’un monde changé”. Les entreprises du monde des TMT y étaient réparties en 17 catégories aux perspectives divergentes. L’avenir des opérateurs de téléphonie mobile comme Sprint continue selon eux d’être coloré de rose. Les perspectives sont plus sombres pour les spécialistes des technologies et les télécoms. Du côté de la communication, la palette des scénarios est tout aussi large et dépendante de l’importance des recettes publicitaires, dont la contraction s’est brutalement accélérée. Bref, la sélectivité, mot clé de l’année 2001, est plus importante que jamais.

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Thomas Maurice à New York