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L’art de vendre de l’illégal

Pour convaincre le chaland de se convertir au haut débit, les fournisseurs d’accès incitent l’internaute à tomber du côté obscur de la loi.

C’est une publicité que vous n’avez pas pu manquer. Elle s’affiche en quatre par trois (comme on dit) un peu partout. Wanadoo y vante son offre Xtense, l’Internet à haut débit par l’ADSL. Et pour mieux vendre Xtense, le premier fournisseur d’accès français a trouvé un argument choc. “Téléchargez plus de 1500 musiques en 24 heures.”Mais où l’internaute va-t-il les trouver, ces 1500 musiques ? Avez-vous déjà essayé de chercher 1500 musiques ” légales ” à télécharger sur Internet ?Prenons par exemple le site d’Universal France, e-compil. On y trouve 1700 titres téléchargeables, à raison de 18 euros pour vingt titres. Le calcul est vite fait : si l’on voulait télécharger 1500 musiques sur e-compil, il faudrait télécharger l’ensemble du catalogue d’Universal et payer… 1350 euros. Soit près de 9 000 francs (pour ceux qui ne travaillent pas au ministère des Finances). Ce qui revient un peu cher quand même !Le Wanadien aura donc deux solutions : soit se diriger vers un site comme PeopleSound, qui propose des téléchargements gratuits d’artistes plus ou moins connus, soit aller sur Kazaa ou AudioGalaxy. Ces derniers leur donneront la possibilité, eux, de télécharger 1500 musiques, mais uniquement des musiques piratées.Au-delà de cette anecdote plutôt amusante, la campagne de Wanadoo représente bien la problématique des sociétés Internet : elles n’ont rien à vendre. Wanadoo vend un accès. Très bien, et alors ? Dès qu’il s’agit de trouver un intérêt à cet accès, l’internaute est plus ou moins prié de se débrouiller tout seul, quitte à tomber dans l’illégalité.En dehors dune utilisation basique (envoyer un mail à mémé), à quoi sert véritablement un accès à Internet ? Ben, à pas grand-chose, au fond, quand on y réfléchit bien… Car, à force de vendre un accès toujours plus rapide, les FAI n’ont pas cherché à développer le contenu, AOL mis à part, en pariant que quelqu’un le ferait bien pour eux.Et quand certains fournisseurs de contenus s’y sont essayé, ils ont été traités comme des moins que rien par nos fournisseurs d’accès. Qui leur demandaient en retour des sommes exorbitantes pour amener un peu de trafic sur leurs sites.Le ” développement durable ” d’Internet en tant que média passera donc obligatoirement par une alliance entre les fournisseurs d’accès et les grands groupes de contenus.Reste à savoir quand ! Car il commence à se faire tard…Prochaine chronique vendredi 5 juillet* Grand reporter au Nouvel hebdo

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Alain Steinmann*