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L’activité constructeur IBM parvient tout doucement à limiter les dégâts

Les ventes des serveurs et d’unités de stockage conditionnent plus des deux tiers des bénéfices d’IBM. Or, le constructeur est aujourd’hui largement dépassé sur la plupart des segments.

A force de marteler les services et l’e-business, on en arriverait presque à oublier qu’IBM, numéro un mondial de l’informatique avec 88,4 milliards de dollars de chiffre d’affaires en 2000, tire toujours une petite moitié de ses revenus de la fabrication de matériel. Une activité qui pèse 37,8 milliards de dollars et qui tente, bon an mal an, d’évoluer au rythme du marché. L’activité de constructeur reste d’ailleurs l’unique point noir du bilan plus que positif de son président Lou Gerstner. IBM a su limiter les dégâts, mais l’ex-leader de la micro, du stockage et d’Unix est aujourd’hui largement dépassé sur chacun des segments : la division micro est tout juste rentable avec une part de marché battue en brèche. Côté serveurs Unix, IBM doit pédaler pour rattraper HP et Sun. Enfin, l’écart se creuse avec EMC sur le stockage, et rien ne semble pouvoir freiner une érosion des grands systèmes.Les difficultés de l’activité de constructeur pèsent aussi très lourd sur le résultat. Si l’on en croit une analyse de Sanford Bernstein & Co, 68 % des bénéfices d’IBM sont conditionnés par les ventes de serveurs au sens large.

Monopole sur un marché moribond

Depuis un peu plus d’un an, IBM tente donc activement de se relancer. Si les premiers résultats sont au rendez- vous, l’activité de constructeur n’est pas pour autant placée sur orbite comme le montre un bilan détaillé. Un bilan tiré au moment où l’abandon de la fabrication des équipements réseaux prend effet avec le retrait du catalogue de nombreux routeurs et commutateurs Ethernet au profit de ceux de Cisco.Si l’on exclut la vente de composants électroniques et d’imprimantes, l’activité constructeur d’IBM s’articule autour de trois pôles stratégiques : les serveurs, la micro et le stockage (voir page suivante). Les difficultés de l’activité serveurs – qui pèse un peu moins de 15 % du chiffre d’affaires – ont commencé il y a un peu plus de deux ans. La compagnie enregistrait en 1998 une première baisse de revenus de 6 %, qui est passée à 18 % en 1999. L’année 2000 a mal commencé, avec une baisse conjoncturelle de 30 % dans les grands systèmes, liée aux restrictions budgétaires du passage à l’an 2000. La compagnie décide alors de prendre le taureau par les cornes sur chaque segment de marché. A commencer par les grands systèmes, segment le plus rentable. Courant 2000, Amdahl et Hitachi, les deux autres fabricants de compatibles OS/390, jettent l’éponge, laissant de nouveau IBM en situation de monopole sur un marché toujours moribond. L’annonce de la gamme eServer zSeries, qui succède depuis le mois d’octobre à la gamme S/390, concrétise l’espoir d’un retour des grands systèmes sur le front des applications critiques de l’e-business et du commerce en ligne. Mais ce marché reste pour l’heure l’apanage des serveurs Unix. Les entreprises utilisatrices jugent rédhibitoires les coûts de la gam-me zSeries, malgré un rapport prix/performances a priori compétitif. D’abord, côté facture logicielle : l’addition reste très salée malgré un mode de tarification, non plus fondé sur la puissance totale de la machine, mais sur la puissance utile. Ensuite, côté exploitation : les compétences pointues étant plus difficiles à trouver pour les grands systèmes que pour les systèmes Unix.Ironie du sort, l’engouement pour Unix n’a pas profité non plus à IBM. Ces deux dernières années, la gamme RS/6000 – rebaptisée eServer pSeries – a cédé du terrain face à Sun, très prisé par les stars de la nouvelle économie. La part d’IBM sur le marché Unix, qui était de 27,4 % en 1997 selon Dataquest, est tombée aujourd’hui à 10 %. C’est le renouvellement de l’offre, notamment en haut de gamme avec le très performant modèle S80, qui permet aujour- d’hui d’inverser la tendance. Grâce à sa technologie, IBM n’a cessé de regagner du terrain courant 2000, ravissant la seconde place du marché Unix à HP sur la fin de l’année. IBM revient de loin. Mais largement derrière Sun, qui vend quatre fois plus de serveurs Unix.Le retour d’IBM dans les serveurs Windows NT/2000 est également à mettre au crédit de la technologie. La gamme Netfinity, rebaptisée eServer xSeries, a en effet été conçue avec l’aide des meilleurs experts grands systèmes. IBM, qui s’était laissé distancer, a ainsi pu reprendre du terrain à Dell, HP et Compaq. Ses revenus sur ce segment ont progressé de 60 % l’an dernier, avec une part de marché qui est remontée de 12 % à 14 % selon IDC. Mais, là encore, pas de triomphalisme : Compaq caracole toujours en tête avec plus de 20% de part de marché, et la bataille reste rude sur le terrain du prix, avec Dell notamment.Du côté de la micro, la santé de la division PC s’est globalement améliorée, mais elle reste fragile. De 1998 à 2000, les pertes dépassaient le milliard de dollars, alors que les parts de marché avaient baissé de moitié (8,1 % à 3,6 %) au profit de Dell et Compaq. La division a opéré un incroyable retour à la profitabilité, mais au prix d’une restructuration drastique. Principales mesures prises : abandon du marché grand public, recentrage sur les grands comptes, vente via internet et lancement de la marque NetVista. En misant sur le design et quelques innovations ergonomiques, IBM table sur un succès à l’image de celui de la marque ThinkPad sur les portables, segment sur lequel elle détient 14 % du marché, au coude à coude avec Toshiba. Néanmoins, la division micro n’est pas prête de regagner les parts cédées aux concurrents. En outre, le fléchissement des ventes, qui touche tous les fabricants de PC depuis l’automne dernier, n’est pas de bon augure. Avec la saturation du marché, le Gartner Group prévoit déjà qu’un des cinq fabricants de PC pourrait purement et simplement abandonner la fabrication de PC dans les cinq ans qui viennent… Segment par segment, IBM a tout de même réussi à stopper la spirale descendante. Les serveurs semblent dans la bonne direction, avec un chiffre d’affaires 2000 estimé à 13,6 milliards de dollars par IDC. Le quatrième trimestre aurait même connu une croissance de 35 % par rapport à celui de 1999. Mais les années précédentes étaient loin d’être glorieuses. Saura-t-il confirmer ces croissances dans les mois qui viennent ?

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Jo Cohen