Passer au contenu

La traçabilité alimentaire stimule l’informatisation des agriculteurs

Dopé par la législation et la demande des donneurs d’ordres, le marché émergent de la traçabilité alimentaire devrait, selon les filières, connaître une croissance de 20 à 40 % par an.

D’ici à quelques années, il sera possible de retracer l’itinéraire d’un hamburger-frites, depuis l’assiette du consommateur jusqu’aux producteurs.Sous la pression des distributeurs et des industriels, les agriculteurs et les éleveurs sont contraints de jouer la transparence.Les dossiers de traçabilité, regroupant toutes les pratiques relatives à la fabrication d’un fromage ou à la culture d’un plant de pommes de terre, commencent à s’informatiser.De quoi aiguiser l’appétit d’opérateurs comme Agro Marchés Internationaux, Tracing Server ou PeopleVenture, qui se positionnent comme des ” infomédiaires “.Leur objectif : servir d’interface entre les acteurs d’une même filière – du producteur au distributeur, en passant par les coopératives et les industriels de l’agroalimentaire.

Les cahiers de charges doivent être respectés

On n’en est pas loin, puisque bon nombre de ces acteurs sont d’ores et déjà informatisés.Il faut savoir que les éleveurs et les agriculteurs sont régulièrement soumis à des audits de gestion et de production.Il s’agit, pour les donneurs d’ordres, d’écarter ou de réduire fortement les risques d’ESB (encéphalopathie spongiforme bovine), de listériose, de salmonellose ou de tout autre type d’accident alimentaire, en s’assurant que leurs cahiers des charges sont bien respectés.Ils doivent être capables à tout moment d’effectuer une traçabilité en aval et en amont jusqu’à la parcelle où le produit a été cultivé ou élevé.Il leur faut aussi indiquer quels types d’intrants agricoles (engrais, médicaments) ont été administrés et à quelle date.Des données si complexes à gérer avec de simples fiches papier que de plus en plus d’agriculteurs sont obligés de s’informatiser pour s’y retrouver.Le ministère de l’Agriculture estimait l’an dernier à quatre-vingt mille le nombre d’agriculteurs équipés de PC, soit plus de 10 % de la population agricole.Un pourcentage qui devrait croître chaque année.D’autant que les coopératives poussent dans ce sens leurs adhérents en les incitant à s’équiper d’ordinateurs portables.Certaines vont même plus loin.A l’instar de ValFrance et d’Occitan, qui ont décidé, via leur filiale commune eCop, de développer leur propre logiciel de traçabilité.Et ce avec l’appui du Cemagref, le centre français de recherche pour l’ingénierie de l’agriculture et de l’environnement.Il est vrai que, à la différence des autres secteurs économiques, les éditeurs de ce genre d’outils ne sont pas très nombreux.

Le flux des marchandises et celui des informations synchronisés

Parmi les acteurs présents sur le secteur de la traçabilité alimentaire, notons, pour la filière viande, EGC Logigroup et Challenge Technologies, dont l’offre s’adresse aux PME-PMI.Pour la filière poissons, signalons l’offre d’Agro Marchés Internationaux, qui a développé une criée électronique pour interfacer les offreurs et les acheteurs.Enfin, du côté de la filière céréalière, Quantix propose de suivre en ligne l’itinéraire du blé.Une filière sur laquelle Tracing Server (ex-Elia) compte se positionner en tant que plate-forme d’infomédiation entre les producteurs et les distributeurs.Entré depuis peu sur le Nouveau Marché, cet opérateur, créé il y a plus de dix ans, se veut entièrement tourné vers la synchronisation permanente des flux de marchandises et d’informations liées au transport.Il prévoit un chiffre d’affaires de 210 millions de francs cette année, contre 138 millions en 1999.“Notre positionnement est unique.Nous sommes les seuls à maîtriser à la fois la chaîne agroalimentaire et la chaîne logistique “, indique Eric Barbier, directeur du développement de Tracing Server, qui vient de se porter acquéreur de Tracenet, un service de traçabilité reliant trois cents entreprises de la filière pommes de terre.Une solution qu’il compte bien étendre aux fruits et légumes, ainsi qu’aux céréales destinées au bétail.Son offre vient concurrencer la plate-forme d’infomédiation créée par PeopleVenture, qui s’adresse d’abord aux producteurs de céréales et d’oléoprotéagineux (soja ou colza) au travers d’un service de type FAH (location mensuelle d’applications informatiques distantes).“Notre offre consiste à pister les produits, depuis la coopérative jusqu’aux supermarchés, au travers de notre concentrateur.Nous sommes capables de gérer notamment les taux de protéines ou d’humidité.Les flux d’information relatifs aux propriétés chimiques des produits sont organisés et traduits en XML (Extended Mark-up Language) pour être consultés par les clients moyennant un accès payant “, indique Philippe Pézout, ingénieur agronome, PDG et fondateur de PeopleVenture, une start up créée début 2000 et qui bénéficie, pour l’heure, d’un capital de 3 millions de francs.“Nous avons développé des partenariats technologiques avec KPMG et Cap Gemini qui relaieront notre offre auprès de la grande distribution et des géants de l’industrie agroalimentaire.”Son plan d’activité prévoit trois sources de rémunération : l’accès aux données, les services de tiers de confiance et l’utilisation d’outils d’aide à la décision.Aussi ambitieuse qu’une start up du commerce électronique, PeopleVenture vise un chiffre d’affaires d’environ 59 millions de francs d’ici à trois ans, et de 144 millions dans cinq ans.

Suivre les produits frais ou surgelés jusquau supermarché

Le marché de la traçabilité alimentaire attise inévitablement l’appétit des acteurs de l’identification automatique, tels T-Log ou TechniGreg, tous deux spécialisés dans l’étiquette électronique.Lauréate de la fondation Altran pour son produit TraciLog, la jeune start up TechniGreg compte s’attaquer à la chaîne du froid en proposant aux distributeurs d’équiper et de gérer leurs parcs de chariots de congélation à l’aide de pisteurs électroniques.Objectif : assurer un suivi du conditionnement des plats surgelés ou frais jusqu’au supermarché grâce à un enregistrement automatique de la température.“En cas de dérive, une alarme est automatiquement signalée à l’exploitant, qui peut ainsi retirer les seuls lots incriminés “, précise Dominique Grégoire, le fondateur de TechniGreg.La traçabilité des aliments par étiquette électronique se positionne sur un créneau déjà occupé par T-Log.Créée en 1998, cette PME revendique notamment des réalisations pour les viandes Charal, ainsi que pour les fromages et le jambon de l’Espagnol Campofrio.“Nous développons nos propres logiciels.En revanche, nous nous adressons à des fournisseurs comme Gemplus pour l’étiquette électronique, et Allibert pour les bacs et les cuves plastiques, dans lesquels la puce est scellée.Ce qui permet de restituer automatiquement toutes les opérations associées à la confection des produits jusqu’à leur sortie de l’usine “, résume Pierre Oules, directeur général de T-Log.Ce dernier estime que le marché de la traçabilité alimentaire croîtra de 20 à 40 % par an selon les filières, sachant que certains secteurs, comme ceux de la viande bovine ou du poisson, sont plus avancés que d’autres.Les opportunités ne manquent donc pas.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Eliane Kan