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La délicate digestion des start-up par les grands groupes

L’union entre les entreprises de la net économie et leurs aînées de l’économie traditionnelle repose sur nombre de compromis.

Après les rachats et fusions, dans l’univers des jeunes pousses, l’heure est à l’absorption par les grands groupes. Trois tendances se dégagent : l’autonomie complète, une version de compromis entre les exigences de rentabilité et de créativité, et l’intégration.Le parcours des frères Charle symbolise à lui seul la première tendance. Fondateurs de start-up, ils se sont adossés à un grand groupe pour assurer le financement de leur entreprise. Pour autant, devenir gestionnaires de filiale internet ne leur a pas enlevé le goût de l’indépendance. Face à Casino, les créateurs du cybermarchand Cdiscount ont su valoriser leurs compétences pour se négocier une bonne marge de man?”uvre.En vendant 60 % de leur société au géant de la distribution, ils n’ont pas cédé un iota de leur autonomie. ” Avec nous, Casino a joué cartes sur table “, expliquent-ils. Et le groupe a mis toutes ses directions à la disposition de ces nouveaux barons, installés dans la région bordelaise : ” Libre à nous de les consulter et de les utiliser pour externaliser des fonctions ou mettre à profit des synergies avec leur réseau de distribution. “ Une union libre qui est toutefois risquée : ” C’est un lien de confiance fragile “, reconnaissent-ils.

La dilution d’une identité

Les deux fondateurs d’Allociné, Jean-David Blanc et Patrick Holzman, l’ont appris à leurs dépens. L’acquisition du portail cinéma par Canal Numedia s’est soldée par la démission des compères, le 7 février. Motif invoqué par les deux patrons ? Ils ne voulaient pas cautionner une dilution de leur société au sein de la filiale internet de Canal Plus. “Cette intégration a créé un nouveau moule dans lequel nous ne reconnaissons plus notre entreprise “, ont-ils expliqué à leur troupe pour sauver la face.Le contrôle financier est la méthode la plus éprouvée pour tenir les rênes d’une filiale internet. Et surtout pour implanter, parfois sans ménagement, une culture des coûts et de la rentabilité. À l’instar des jeunes pousses déjà absorbées par Vivendi Universal, le portail communautaire Ifrance est donc soumis au sacro-saint reporting du groupe. Un exercice effectué selon les normes en vigueur outre-Atlantique, et à fréquence accélérée. “C’est un peu démesuré pour une société de cinquante personnes “, avoue-t-on chez Ifrance.Dans les faits, le rattachement capitalistique s’est concrétisé par le recrutement de Sandrine Leonardi, au poste de directeur administratif et financier. “Il a fallu structurer la société et instaurer des procédures de délégation de signature pour garantir la séparation des pouvoirs opérationnels et financiers “, explique-t-elle.

Une politique de groupe

Reste que, pour un industriel, l’indépendance d’une filiale internet, qui peut être turbulente, n’est pas une fin en soi. Selon le mot du patron de Wanadoo, Nicolas Dufourcq : “Le banc
de poissons doit suivre un même mouvement

. Avec cinq métiers et 6 000 collaborateurs, la filiale internet de France Telecom vise une cohérence industrielle. “Il n’est pas question d’aligner toutes les sociétés acquises par Wanadoo sur le même modèle. Mais il est important de leur faire sentir qu’il y a une politique de groupe “, explique la direction des ressources humaines.Ce qui peut-être aussi un pari gagnant. Que ce soit pour Nicolas Gagnez, le fondateur de la société d’imagerie SNV, ou pour Vivian Girel, qui a créé la place de marché B to B Andtrade, leur rachat par Wanadoo s’est traduit par l’intégration de leurs compétences au sein d’une unité d’affaires plus large. Sans pour autant qu’il leur faille quitter les commandes de leur entreprise.

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Sébastien Fumaroli