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L’hydrogène décarboné, une priorité pour la recherche française

Le gouvernement mise sur l’hydrogène propre pour atteindre la neutralité carbone. Le CNRS a officialisé le lancement de sa Fédération de recherche hydrogène, qui devra irriguer notre industrie.

Avec la cybersécurité et les technologies quantiques, l’hydrogène décarboné figure parmi les stratégies d’accélération annoncées par le gouvernement au mois de septembre dernier. Un budget de 7 milliards d’euros est consacré au développement de cette filière jusqu’en 2030. Sur ce total, 80 millions seront alloués au PEPR (Programme et équipements prioritaires de recherche) piloté par le CEA et le CNRS.

C’est dans ce cadre que le Centre national de la recherche scientifique a officialisé hier le lancement de sa Fédération de recherche hydrogène. « L’hydrogène présente des potentialités très importantes pour la décarbonation de l’industrie et la mobilité de demain. Il était important de structurer la communauté académique », a déclaré en préambule d’une conférence le PDG du CNRS Antoine Petit. 270 scientifiques permanents et 28 laboratoires sont donc à pied d’œuvre pour s’attaquer aux nombreux défis que soulève l’hydrogène décarboné.

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Réduire les émissions de gaz à effets de serre

« L’hydrogène (H) est l’atome le plus abondant dans l’Univers. Mais c’est un vecteur d’énergie, pas une source d’énergie primaire. Il faut le transformer en dihydrogène (H2) pour pouvoir l’utiliser », a rappelé le directeur adjoint de la Fédération Daniel Hissel. Le dihydrogène est obtenu en brûlant l’hydrogène dans des turbines ou grâce à des piles à combustible qui consistent à faire réagir le dihydrogène avec de l’oxygène. 

Le gros avantage de ces procédés, c’est qu’ils ne rejettent que de l’eau. En y faisant davantage appel plutôt qu’aux hydrocarbures, nous pourrions réduire les émissions de gaz à effet de serre qui sont en grande partie responsable du réchauffement climatique.

Une partie des réserves d'hydrocarbures de Saudi Aramco
Saudi Aramco – Une partie des réserves d’hydrocarbures de Saudi Aramco

C’est quoi l’hydrogène décarboné ?

Le problème, c’est que la production d’hydrogène est réalisée actuellement à 96% à partir de ressources fossiles comme le gaz, le pétrole ou le charbon. Le grand défi est donc de parvenir à l’obtenir de façon plus propre. L’hydrogène décarboné désigne différentes méthodes de production plus ou moins vertueuses pour l’environnement.

On peut s’appuyer sur des énergies fossiles, mais en capturant le CO2. Réaliser une l’électrolyse de l’eau en utilisant de l’électricité d’origine nucléaire. Ou aller encore plus loin avec de l’électricité issue des énergies renouvelables ou de ressources renouvelables comme la biomasse : c’est ce que l’on appelle de l‘hydrogène vert.

Quels obstacles ?

Pour rendre l’hydrogène décarboné compétitif, il va falloir résoudre plusieurs problèmes identifiés depuis quelques années par la filière industrielle. « Il faut réduire les coûts, augmenter les performances, la durabilité des systèmes, leur sûreté mais aussi la soutenabilité environnementale des composants et des matériaux », a énuméré Philippe Boucly, Président de France Hydrogène, qui fédère les acteurs de l’hydrogène et des piles à combustible en France. Le nerf de la guerre, ce sera de parvenir à un coût de production équivalent à celui des hydrocarbures. 

Le CNRS a identifié quatre axes techniques : la production, le stockage, la conversion en électricité pour les usages en mobilité et celle pour les usages stationnaires. Le tout en lien avec un réseau de PME, mais aussi de grands acteurs comme Engie, Air liquide, Total, Michelin, PSA ou Areva. Cela n’exclut pas la participation à des projets internationaux ou européens comme GiantLeap, qui a abouti à la mise en service d’une ligne de bus à hydrogène aux Pays-Bas. 

Des pistes prometteuses apparaissent, comme la réduction du recours au platine, qui coûte extrêmement cher, dans les électrodes des piles à combustible. Ou encore le stockage de l’hydrogène sous forme solide en le compactant.

Quelles applications futures ?

Le petit avion à hydrogène Piper M de ZeroAvia.
ZeroAvia – Le petit avion à hydrogène Piper M de ZeroAvia.

Aujourd’hui, 75 millions de tonnes d’h2 sont produits par an dans le monde et 99% de ce total est utilisé pour des applications industrielles. Les chercheurs estiment qu’en parvenant à produire de l’hydrogène propre, les usages seraient décuplés. « On pourrait réduire la consommation d’énergie fossile pour la mobilité lourde en remplaçant les moteurs thermiques traditionnels par une pile à combustible pour les avions, les cars, les trains ou les bateaux », a expliqué Jacques Maddaluno, directeur de l’Institut de chimie du CNRS. « Cela pourrait aussi contribuer à décarboner les grands processus industriels comme la pétrochimie, la métallurgie, l’électronique, l’ammoniac, les engrais et les industries chimiques », a-t-il ajouté. Même la fourniture énergétique des bâtiments pourrait être assurée en partie avec de l’hydrogène. « Il ne s’agit pas d’en mettre partout et tout le temps mais d’identifier et de comprendre les potentialités hydrogène », promet Daniel Hissel.

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Amélie CHARNAY