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L. Belkhir (Kirtas Technologies) : ‘ C’est la fin des bibliothèques telles qu’on les connaît ‘

Cette start-up commercialise des systèmes de numérisation des livres. Elle prétend pouvoir traiter 1200 pages en une heure.

Fondé en 2001, Kirtas Technologies propose une solution matérielle et logicielle de numérisation de livres, utilisable pour les archives ou les ?”uvres entrant dans le patrimoine culturel. La société américaine cible les
professionnels, bibliothèques nationales ou universitaires, ainsi que les administrations. Plus d’une vingtaine de machines, l’APT Bookscan 1200, ont déjà été vendues. Une nouvelle version est attendue pour le début de l’année prochaine. Lofti
Belhir, PDG et fondateur de l’entreprise, nous en parle.01net. : La numérisation de livres n’est pas nouvelle. Quelles sont les spécificités de votre technologie ?



Lotfi Belkhir :
Il existe deux méthodes pour scanner les livres. Soit vous utilisez un scanner plan, et une personne traite les pages une à une. Vous numérisez alors 100 pages à l’heure maximum. La qualité n’est pas au
rendez-vous, puisque vous avez des difficultés à scanner la partie des pages proche de la reliure. Soit vous guillotinez les livres [en coupant au niveau de la reliure, NDLR]. La numérisation est alors faite mécaniquement. Il va
sans dire que vous ne pouvez utiliser cette technique pour les ouvrages de valeur.


Avec notre technologie, l’ouvrage est placé dans un berceau. La machine se charge de tourner les pages. Un système de miroir permet de scanner les pages de droite et de gauche sans avoir à bouger la caméra digitale. Nous pouvons ainsi
traiter 1200 pages en une heure.Est-ce la fin des bibliothèques ?


C’est la fin des bibliothèques telles qu’on les connaît aujourd’hui. L’ère numérique les oblige à se remettre en question. Leur mission est de préserver le patrimoine culturel et de le mettre à disposition du public. Le livre physique
n’est que le contenant. Ce qui compte, c’est le contenu. Il peut être disponible sous forme de fichier électronique.


Internet permet de diffuser ce savoir au plus grand nombre. Prenez la bibliothèque de Shanghai où les lecteurs sont obligés de faire des queues interminables pour obtenir des ouvrages. Numériser les 25 millions de livres dont elle
dispose lui coûte moins cher que de construire une nouvelle structure capable d’accueillir la foule.C’est la fin du livre papier, alors ?


Non, mais la numérisation va changer nos habitudes de lecture. Nous accéderons au savoir plus rapidement et pourrons le partager avec les autres.Mais, pour beaucoup, lire un livre est plus agréable qu’une lecture à l’écran, non ?


Pour l’ancienne génération, oui. Mais la nouvelle génération est capable de lire des dizaines de pages sur un écran de téléphone. Il faut distinguer la lecture plaisir de la lecture active, où l’on a besoin d’analyser, de prendre des
notes. Dans ce cas, un livre sur écran est idéal. Déjà, les étudiants ont pris le pli au grand dam des professeurs. Dans leurs bibliographies, certains élèves n’hésitent pas à remplacer les noms des ?”uvres et de leurs auteurs par des liens
hypertextes.Pourquoi la numérisation de livre fonctionnerait-elle alors que les e-books ont été un échec ?


J’avais monté une autre start-up, Xinko, dont l’objectif était de numériser les livres universitaires afin que les étudiants puissent les transporter sur un seul support. Cela diminuait le poids des sacs et le coût des livres. L’opération
n’a pas marché parce qu’il n’existait pas assez de contenu disponible électroniquement. La numérisation du savoir n’avait alors pas été entreprise à grande échelle.Vous considérez-vous comme un concurrent de Google ?


Pas du tout. Nous sommes complémentaires. Google ne commercialise pas une technologie. Il a entrepris de numériser les livres présents dans certaines bibliothèques dans un premier temps. L’internaute n’aura pas accès à la totalité des
livres sous copyright, mais à quelques pages pertinentes par rapport à sa recherche.


Ce modèle est valable pour Google, en aucun cas pour une bibliothèque. Mais Google n’est pas le seul sur ce créneau, Amazon s’y est engouffré le premier. Yahoo! et Microsoft ont également des projets similaires dans les cartons.Pourquoi êtes-vous en France ?


Nous sommes venus à l’invitation de la BNF pour ICHIM 2005 [Les neuvièmes rencontres sur la numérisation du patrimoine et l’émergence de cultures numériques ont lieu actuellement à Paris, NDLR]. La France est à
l’initiative de la bibliothèque universelle européenne. La numérisation et la conservation du savoir correspondent ici à une réelle volonté politique. Nous sommes également venus nous implanter au travers de distributeurs nationaux. Les négociations
sont en cours.

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Propos recueillis par Hélène Puel