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Jean-Pierre Brulard (Syntec informatique)

‘ Nous observons un début de surchauffe sur certaines expertises en PGI, en sécurité, ou sur les compétences métier. ‘

Jean-Pierre Brulard est le directeur général de la filiale française de Business Objects et le président du comité éditeurs du Syntec informatique.01 informatique : Quels sont les prochains enjeux pour l’industrie logicielle ?


Jean-Pierre Brulard : il faut que nos métiers s’engagent davantage dans l’industrialisation de nos processus. Qu’il s’agisse de qualité logicielle, de tests ou de documentation, notre secteur est de plus en plus normé.
L’autre enjeu concerne l’offshore. Les éditeurs ont débuté le mouvement bien avant les SSII. Et le phénomène s’accélère. Nous devons avoir des emplois délocalisés, ne serait-ce que pour nous adresser aux marchés locaux. Le gouvernement chinois
exige, par exemple, de siniser nos logiciels, avec prise en compte des caractères chinois et facturation en yuans.


Si le marché reste dominé par les Etats-Unis, l’Inde et la Chine seront bientôt des poids lourds. Au-delà de l’Asie, on observe une répartition mondiale du travail, qui favorisera l’Europe de l’Est et le Maghreb. Par ailleurs, on
assiste à une remontée de la chaîne de valeur. Après le code, les tests de performance ou la documentation technique, l’offshore gagne l’architecture et les développements nobles, voire le pilotage.Cela signifie-t-il un recul de l’emploi en France ?


Non. Un éditeur n’externalisera pas toute la R&D, c?”ur de son métier. La flexibilité passe aussi par les centres de production situés en province. Le cadre de vie y est plus agréable, ce qui renforce la fidélité des
collaborateurs. Un point essentiel, car, avec la reprise, nous observons déjà un début de surchauffe sur certaines expertises en PGI, en sécurité, ou sur les compétences métier. L’augmentation du turnover et des salaires le confirme.


Une guerre des talents est même à prévoir sous le double effet de la désaffection des étudiants pour les filières scientifiques et du papy-boom. Si moins de 10 % de nos collaborateurs ont plus de 50 ans, les départs massifs
en retraite toucheront, en revanche, nos clients. Une concurrence à l’embauche va donc se produire sur des profils communs. Début 2006, une campagne de communication visant à renforcer l’attrait de notre secteur sera lancée à destination des
jeunes.Les informaticiens français sont-ils en mesure de relever les défis de demain ?


Oui, mais ils doivent gagner en compétences. Lors du séminaire paritaire des 19 et 20 septembre dernier, nous avons travaillé sur le devenir de nos métiers à l’horizon 2010. Le plan d’action qui en découle porte principalement sur
la formation initiale et continue. Entre autres mesures : la valorisation de l’apprentissage, l’adaptation du contrat de professionnalisation à la branche, et le lancement, d’ici à la fin de l’année, d’un club des grandes écoles informatiques
pour adapter les cursus aux attentes des recruteurs.En quoi l’Etat peut-il soutenir les efforts de R&D du secteur ?


L’industrie française dispose d’un tissu de PME innovantes. Le statut avantageux de jeune entreprise innovante ou le crédit d’impôt recherche vont dans le bon sens. Mais il convient également de travailler en aval. Les deux premières
années d’existence d’un éditeur s’avèrent vitales. Même s’il envisage de s’internationaliser, il doit être en mesure de s’appuyer sur un marché domestique vivace. C’est pourquoi, en liaison avec le Comité Richelieu, Syntec Informatique plaide pour
un Pacte PME, soit un Small Business Act à la française, afin que la commande publique soutienne les jeunes pousses.


D’autant que si les usages se sont propagés dans le grand public avec 8 millions de foyers connectés, l’e-transformation des entreprises publiques reste à venir. Elle aura peut-être aussi un effet d’entraînement sur le privé.
80 % des budgets informatiques sont encore alloués à des tâches récurrentes pour maintenir l’existant. Un gros travail de consolidation et de standardisation des applications reste à fournir afin de dégager des marges de man?”uvre nécessaires
à la conduite des projets innovants de transformation.Que pensez-vous de la création de l’European Software Association (ESA), association européenne d’éditeurs de logiciels ?


Toute initiative visant à coordonner nos actions à l’échelle de l’Europe est bonne. Nous allons étudier les statuts de cette association, et voir comment y participer. Il existe des sujets transnationaux forts, telle la brevetabilité
logicielle, qui nécessitent d’avoir un discours commun auprès de la Commission européenne. Syntec Informatique constituera un groupe de travail pour apporter toute sa contribution à ce débat important. En revanche, je reste plus réservé sur la
création d’une antenne française.

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Clarisse Burger, Sylvie Blanc et Xavier Biseul