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Icann : la légitimité du ” gouvernement de l’Internet ” remise en cause

La publication de deux rapports sur l’organisation de l’Icann relance le débat sur la représentativité des usagers et remet en cause ” l’hégémonisme américain ” au sein de l’organisation chargée, entre autres, de la gestion des noms de domaine.

Avec les cafouillages qui président à la mise en place des nouveaux suffixes de noms de domaine ( .info, .biz) et l’échec relatif de l’élection de son comité AtLarge, censé représenter les usagers de l’Internet, l’Icann (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) voit sa légitimité contestée.Deux rapports proposent simultanément de modifier les modes de représentativité au sein de ce ” gouvernement virtuel de l’Internet “.Créée en 1998 pour succéder à l’Iana, l’Icann se veut le régulateur de l’Internet. Malgré ses prétentions universelles, cette société à but non lucratif de droit californien reste placée sous la tutelle du gouvernement américain qui dispose d’un droit de veto sur ses décisions.

Les arcanes de l’Icann

Dans la pratique, l’Icann présente tous les symptômes d’une usine à gaz.Sa structure dirigeante regroupe dix-neuf directeurs (élus et/ou cooptés). Neuf d’entre eux proviennent du comité AtLarge, tandis que neuf autres émanent des différents collèges (supporting organizations) traitant respectivement de l’adressage, des noms de domaine et des protocoles Internet. Un dernier directeur fait office de président.Au mois de janvier 2001, l’ ALSC (AtLargeStudyCommittee), une commission indépendante, était créée à l’instigation de l’Icann.Composée de neuf membres et présidée par l’ancien Premier ministre suédois Carl Bildt, l’ALSC doit notamment réfléchir à la composition future du comité AtLarge.Les conclusions temporaires de ses travaux sont disponibles en ligne depuis le 27 août. Le rapport définitif sera publié à l’automne.Après moult consultations, l’ALSC recommande que la communauté des usagers de l’Internet voit son périmètre réduit à tout détenteur d’un nom de domaine sur le Réseau.Regroupés en une nouvelle supporting organization baptisée ” Also “, ces usagers éliraient sur une base géographique six directeurs à l’Icann, contre cinq dans l’actuelle organisation.

Démocratie censitaire

Constatant l’échec financier de la dernière élection du comité AtLarge, qui a coûté à l’Icann entre 10 et 15 dollars par suffrage exprimé, les membres de la commission suggèrent maintenant de faire payer les scrutins à venir… par les détenteurs de noms de domaine eux-mêmes.Chacun s’acquiterait de 5 à 10 dollars, prélevés au moment du renouvellement de l’URL. Si l’on considère qu’il existe à ce jour près de 41 millions de noms de domaine enregistrés… cette nouvelle participation constituerait une manne finacière de tout premier ordre.A contrario, un second rapport publié par la Nais (NGO & Academic Icann Study) préconise, pour sa part, des directeurs élus au suffrage universel direct, à partir d’un collège électoral ouvert “à tous ceux qui expriment un intérêt pour la démarche en remplissant un processus d’inscription en ligne relativement simple, en association avec une confirmation en retour par voie postale”…Ces arguties démocratico-financières viennent s’ajouter à la levée de boucliers des CCTLD en décembre 2000.Ces prestataires ?” à l’instar de l’Afnic en France ?” sont au nombre de 242 sur l’ensemble de la planète. Ils sont chargés de gérer et de commercialiser les noms de domaine de premier niveau pour les pays. Représentant 35 % des cotisations de l’Icann, ils revendiquaient six postes de directeurs, mais, depuis, la fronde a fait long feu.Ces querelles de chapelles et le côté ubuesque de l’Icann prêteraient à sourire si la régulation actuelle des noms de domaine Internet ne remettait pas en cause, dans toutes ses dérives, la sécurité des transactions et des échanges sur Ie Réseau…

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Philippe Crouzillacq