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Final Fantasy XV : cet épisode pourrait bien relancer la licence

Après 10 ans d’attente, Final Fantasy XV débarque enfin le 29 novembre prochain sur PS4 et Xbox One. Entre recettes du passé et une demande plus présente, et pressante, de jeu en temps réel, cet opus réussit-il à renouveler le genre ?

Projetez-vous dans votre moi d’il y a quelques années, dans celui de 2006, 2011, 2013. Et souvenez-vous… Chaque annonce de Final Fantasy Versus XIII/XV rendait extatique un public proclamant pourtant son rejet continuel d’une franchise autrefois culte. Il faut dire que les derniers épisodes en date n’ont pas brillé par leurs ventes, et ce même s’ils exploraient des voies inattendues, audacieuses. Si, si. Lightning Returns et son cycle de jours recommençant sans fin, XIII-2, son Noel charismatique et ses voyages dans le temps et les dimensions ; malgré leurs ambitions respectives, ces deux volets ont à peine dépassé respectivement les 3,5 millions et 1 million d’exemplaires écoulés. C’est peu, dangereusement peu, pour un survivant des années 80. 

Avec son temps réel et son absence de séparation entre les combats et l’exploration, Final Fantasy XV se veut pour sa part une nouvelle étape dans la série, comme une rupture avec ce cercle vicieux, cette dégringolade continue des ventes. Paradoxalement, dixit ses développeurs, c’est aussi l’épisode qui s’inspire le plus du passé, de ses créatures, de ses personnages. Si bien qu’on serait presque tenté de voir FFXV comme un pont entre plusieurs générations, respectueux de la franchise tout en étant bien décidé à l’accommoder à des exigences actuelles. Explications.

We are the Champions

On l’a dit, Final Fantasy XV se veut en rupture, principalement mécanique, avec toute la série. Fini, oublié l’Active Time Battle (ATB). Le système avant-­gardiste déployé sur Final Fantasy IV a beau avoir été de la plupart des épisodes-clés, il laisse désormais la place à du pur “temps réel”. Pensé originellement comme une réponse de Nomura (l’un des développeurs) aux épisodes traditionnels de la franchise, Final Fantasy XV ne reprend par ailleurs aucun des marqueurs mécaniques des précédents volets : pas d’ATB donc, pas de jobs, pas de classes, pas de magicien ou de soigneur à proprement-parlé, le jeu de Tabata ne fait rien comme personne.

De même, ici, les MP (Magic Points) ne servent plus à lancer des sorts, mais à se téléporter, à esquiver magiquement ou à utiliser les treize armes royales à dénicher dans les tombes des rois. A trop frapper, on perd tous ses MP et on se retrouve en mode Stase, incapable de répondre à un assaut pendant quelques secondes. Et toute la partie combat est de ce tonneau, du temps réel pur, mécaniques et statistiques cachées, avec cependant des conséquences sur l’action immédiate.

L’interface utilisateur de Final Fantasy XV tend d’ailleurs à se faire oublier et notamment pendant les affrontements. Il y a bien quelques jauges visibles (HP et MP de Noctis, des compagnons), comme le lien avec ses équipiers qui permet de lancer des attaques combinées, effets de caméra en sus, mais rien de comparable à n’importe quel FF précédent. Et si l’action s’affole, il est toujours possible de mettre le jeu en pause pendant un temps limité et ainsi préparer sa stratégie.
Côté armement, si les héros Prompto, Gladiolus et Ignis ne disposent que de deux emplacements pour leurs armes, Noctis peut -lui- en tenir quatre en même temps : épée longue, épée à deux mains, lances, oui, mais aussi pistolets, armes de jet, bouclier ou tronçonneuses, certains dérivant de grands classiques de la franchise.  

A kind of Magic

Toujours en rupture avec les précédents épisodes, Final Fantasy XV ne propose aucun sort prédéfini. C’est en combinant des éléments (Feu, Glace, éclairs), ainsi que des objets (potions de vie, queue de phénix, etc.) qu’on les crée dans un menu dédié. Ainsi, associer une certaine quantité de feu et une queue de phénix donnera un sort de feu qui se déclenchera trois fois successivement sur la zone visée. Il est aussi possible d’utiliser les éléments seuls, pour des effets moindres.

Cet « artisanat » magique simplifié devrait permettre d’expérimenter la plupart des objets trouvés, et s’avérer finalement aussi profond que les précédents épisodes tout en impliquant plus le joueur. Ainsi qu’il a déjà été signalé, ces sortilèges se disposent sur les emplacements des armes, s’utilisent comme des grenades et sont donc exploitables par n’importe quel personnage de l’équipe. 

Par ailleurs, à la manière de Divinity : Original Sin, lancer un sort a des conséquences sur l’environnement : une boule de feu dans l’herbe, et l’incendie se propage sur une zone infligeant des dégâts aux adversaires situés dans celle-ci. Si le système de magie repose sur des sorts élémentaires, l’anneau de Noctis lui permettra, visiblement en fin de parcours, de dérober les âmes des adversaires rencontrés, après quelques secondes de concentration.

Le héros n’étant pas immortel, il faudra être suffisamment en retrait de l’action, et ce d’autant plus que le temps nécessaire à la procédure semble être lié à la puissance de l’ennemi. La rupture avec le passé est donc totale, franche. Mais pas sur tous les points.

I want it all 

S’il s’amuse avec certains concepts-clés de la série pour proposer du neuf, Final Fantasy XV n’oublie pas son héritage, son genre. Aussi, s’il tend plus vers l’action qu’en direction des statistiques, le dernier-né de Square Enix n’est cependant pas avare en menus, arbres de compétences et autres.

Pour l’évolution de ses protagonistes, Final Fantasy XV se repose ainsi sur un système nommé Ascension, assez proche du Sphérier de FFX (ou de n’importe quel arbre de compétences d’un RPG actuel en fait). On y débloque des capacités, grâce à des points AP (Ability Points) que l’on gagne à chaque niveau. A ce sujet, il semblerait que les combats ne soient plus la seule et unique manière d’engranger de l’expérience puisque, à l’instar des RPG occidentaux – encore une fois ! –, réussir une quête annexe, parler avec un personnage ou faire tel ou tel choix pendant un dialogue, en fait gagner.

Dans ce menu Ascension, pour accéder à la compétence « esquiver les attaques ennemies en plein air », il en coûtera 20 PA ; « scanner les faiblesses ennemies alors qu’on est derrière une couverture », 12 PA ; « Esquiver automatiquement un ennemi en consommant des MP », 4 PA, etc. En soi, l’arbre propose autant de compétences passives qu’actives, chacun des membres de l’équipe disposant de son Ascension personnelle.

Don’t stop me now

Un système de combat façon Final Fantasy ne serait pas possible sans invocations de monstres spectaculaires. Le volet dirigé par Tabata ne déroge pas à la règle. Outre le système de magie, Noctis peut, en effet, demander à des Archaeans, des puissances qui existent depuis la création du monde de FFXV, de l’aider. Mais ces Archaeans ne se laisseront pas invoquer par le premier venu. Avant d’avoir recours à eux, il sera nécessaire de les combattre, et de les vaincre, parfois avec l’aide de l’armée locale.

Mieux, d’après les développeurs, si ces invocations sont en nombre très limité (sept), chacune se veut un véritable personnage, avec son identité, ses objectifs, son histoire. Ainsi, en fonction du contexte (distance de Noctis, par exemple), Titan frappe, lance un rocher ou s’en va sans combattre. 

Chacun de ces Archaeans disposera de plusieurs comportements. Jusqu’il y a peu, seuls des classiques de la mythologie FF que sont Ramuh, Titan, Leviathan et Carbuncle avaient été officiellement annoncés. Dernièrement, c’est Shiva qui a été dévoilée. Ifrit a de même été évoqué par Tabata lors d’une récente présentation. D’ailleurs, il semblerait que l’introduction du jeu mette en scène cette invocation de feu, ainsi qu’une équipe de personnages vieillissante. Est-ce à dire que cet Archaean ne sera débloqué que vers la toute fin du périple de Noctis, lui qui est souvent parmi les premiers à accompagner le joueur ? Ou alors Tabata et son équipe nous préparent-ils une surprise ? 

Who wants to live forever ? 

À parler règles de jeu, mécaniques, on en oublierait presque l’histoire, le scénario. Et pour cause, on n’en sait pas beaucoup plus aujourd’hui qu’il y a quelques mois. Evidemment, avec un Kingsglaive, le long métrage qui raconte ce qu’il advient du père de Noctis, le roi Régis, et avec un Brotherhood, la série animée en ligne qui revient sur le passé des personnages, il y a déjà de quoi anticiper les premières heures de jeu ou comprendre comment s’est constituée l’équipe qui accompagne le Prince déchu. Mais rien qui ne change drastiquement cette reconquête du trône par Noctis. Reste alors une véritable inconnue.

Dans une interview datant de septembre dernier, Tabata expliquait cette fameuse séquence qui débute le jeu, avec des héros plus vieux combattant une créature de feu (Ifrit donc). Selon ses dires, le scénario s’étendra sur une dizaine d’années (et une quarantaine d’heures), la volonté de l’équipe étant de mettre en scène des personnages plus mûrs, de montrer un Noctis, barbu, ressemblant un peu plus à son père. Point, selon lui, assez rare dans le JRPG.

Toujours est-il qu’on ignore encore comment se déroulera cette (ou ces) transition(s). Par avance rapide ? Par saut d’année en année ? D’un seul saut de dix ans ? Ou alors est-ce l’anneau de la famille royale, celui-là même qui a accéléré le vieillissement de son père, qui le fera lui aussi vieillir plus rapidement ainsi que ses camarades ? Noctis et ses compagnons vont-ils, comme le héros de Dragon Quest V, passer plusieurs années en prison ? Jouera-t-on longtemps avec cette version « adulte » ? Et si, à l’instar de Metal Gear Solid 2 : Sons of Liberty, la campagne promotionnelle autour de Final Fantasy XV s’était volontairement concentrée sur les premières heures (donc Noctis jeune) pour délaisser tout le gros de l’aventure, où l’on guiderait en fait un Prince et ses camarades trentenaires ?

L’hypothèse est séduisante. Très séduisante. Tellement séduisante qu’on serait presque déçu de ne contrôler ce Noctis plus âgé que pendant quelques heures, durant cette longue séquence de fin que l’on sait plus linéaire. 

The miracle 

Alors, la résurrection/révolution est-elle en marche ? Oui, mais… En communiquant à tout-va sur ce quinzième volet, Square Enix a voulu jouer la transparence, montrant son jeu tel qu’il est/était à chaque moment de son développement. Un choix courageux. Très courageux même en cette période où les éditeurs multiplient les trailers mensongers et les captures plus photoshoppées que jamais.

Et pourtant, cette stratégie n’est pas sans répercussions négatives sur les joueurs. Un jeu non fini, encore en alpha, en bêta, c’est le quotidien des journalistes, de l’équipe de développement ou des bêta testeurs. Une caméra qui déraille, c’est usuel. De même qu’une séquence ou une entrée qui ne fonctionne pas. Tout ça peut être réparé, patché durant la production, ou en Day One, maintenant que c’est devenu une pratique de l’industrie. Mais, montrer un jeu encore en développement à des joueurs qui n’ont pas tous le recul nécessaire, c’est s’exposer assez rapidement à la vindicte, au troll facile ou, en tout cas, à une inquiétude réelle, persistante, avec probable annulation de la précommande pour certains joueurs qui « attendent de voir ». 

Bref, suicidaire. Et ce d’autant plus que les problèmes de lisibilité ou de placement caméra aperçus lors des démonstrations à l’E3 ou lors des diverses présentations du jeu semblent toujours d’actualité. Quant au report, à quelques semaines de la sortie, s’il a été bien pris par les joueurs, il n’en continue pas moins de colporter l’idée que FFXV est actuellement buggé jusqu’à la moelle. Las ! Ce qui dérivait d’une volonté d’être aussi ouvert que possible pourrait finalement se retourner contre Final Fantasy XV. Portée par une ambition démesurée, par un désir de bien faire, attendue au tournant par des fans déjà équipés de goudron et de plumes virtuels, l’équipe de FFXV n’a pas le droit de se louper.

Rater FFXV, ce serait entériner l’idée que la franchise n’a plus sa place aujourd’hui, qu’elle est définitivement morte, incapable de s’aligner sur les mastodontes occidentaux. Bref, que ce Final Fantasy XV ne méritait pas autant de souffrance, d’énergie et de moyens déployés. À l’inverse, s’il étonne et prend tout le monde de court (notre hypothèse MGS2 ou toute autre surprise inattendue), ce serait potentiellement un véritable sursaut pour la franchise. Oui, une nouvelle étape. Peut-être cette résurrection que nous appelons tous de nos vœux.

Dix ans de galère 

D’E3 en TGS, de Final Fantasy Versus XIII à Final Fantasy XV, retour sur dix années d’annonces, de silences gênés et de trailers pas du tout bidonnés.

  • E3 2006 – 8 mai

Le projet Fabula Nova Crystallis est annoncé. Il s’agit alors de trois titres (Final Fantasy XIII, Agito XIII et Versus XIII) qui partagent une même mythologie. La toute première vidéo FF Versus XIII montre Noctis assis sur un trône. Sortant de son palais, il se fait tirer dessus et déploie une roue d’armes blanches fantomatiques qui tourne autour de lui. Aux commandes de cet épisode visiblement plus sombre que le XIII, Tetsuya Nomura est alors en pleine ascension depuis le succès des Kingdom Hearts sur PS2.

Comme son nom l’indique, Versus XIII se veut l’antithèse de FFXIII, tout en étant développé avec le même outil, le fameux Crystal Tool. On peut aussi comprendre ce titre comme une première manifestation publique de la relation conflictuelle entre Nomura et Kitase qui, de son côté, produit Final Fantasy XIII. À l’époque, aucune date n’est annoncée, mais une certitude : Versus sortira après l’épisode principal.

  • Juin 2008

Après deux années d’attente, de photos et vidéos livrées au compte-gouttes par l’éditeur à chaque événement, Final Fantasy Versus XIII est mis en pause, le temps qu’un Final Fantasy XIII au développement chaotique soit lui-même achevé et placé dans les rayonnages. Après tout, le bébé de Tetsuya Nomura n’est alors qu’un projet secondaire qui vient en support de l’épisode classique, et prioritaire, dirigé par Yoshinori Kitase. Mais, en août 2008, Square Enix se fend d’une nouvelle vidéo où l’on voit apparaître les trois autres membres de l’équipe, ainsi que Stella Nox Fleuret, le personnage féminin du jeu. Il faudra attendre octobre 2010 pour qu’une vraie vidéo de gameplay sorte.

  • TGS 2011 – 15 et 16 septembre

Après de nombreuses années de préproduction, des changements de gameplay et de représentations, le scénario est prêt, les personnages designés – mais toujours sujets à des changements – et la production enfin lancée à plein régime, comme le déclare un Yoshinori Kitase qui montre déjà Final Fantasy XIII-2. Cependant les progrès de l’équipe sont lents. Certaines fonctionnalités montrées dans les vidéos (verticalité, etc.) s’avèrent terriblement difficiles à intégrer. Le trailer sorti en janvier 2011 montre surtout un système de combat en temps réel, où Noctis se téléporte déjà et est accompagné de Gladiolus et Prompto. Quelques passages dévoilent un monde très ouvert.

  • E3 2012 – 5 au 7 juin

Alors que des rumeurs d’annulation courent depuis plusieurs années, Square Enix se sent obligé de répondre aux internautes : s’il n’est plus montré depuis longtemps et si son nom est souvent oublié pour mettre en avant d’autres jeux ou rattraper un échec industriel en cours (FFXIV Online), Versus XIII est pourtant toujours en développement, ainsi que le déclare Yoichi Wada, P.-D.G. de Square Enix, sur Twitter.

Plutôt que de montrer son jeu, Square Enix se concentre sur le Luminous Engine, son nouveau moteur graphique, qui sera utilisé, on l’apprend alors, sur les prochaines productions de l’éditeur. Comprendre, sur Versus XIII. La démo en temps réel Agni’s Philosophy permet aux journalistes de se rendre compte de la puissance de cette solution.

  • E3 2013 – 11 au 13 juin

Durant la conférence du salon de l’E3 2013, Final Fantasy Versus XIII devient Final Fantasy XV. Tetsuya Nomura est toujours aux commandes, du moins officiellement, et ses équipes travaillent désormais en collaboration avec celles de Hajime Tabata qui est connu pour des jeux PSP très ambitieux, Final Fantasy Type-0 et The 3rd Birthday.

Une grosse portion de la mythologie Fabula Nova Crystallis est alors mise de côté ou retravaillée pour s’intégrer plus naturellement dans cette histoire désormais indépendante. Prévu pour PlayStation 4 et Xbox One, Final Fantasy XV, n’est alors fini qu’à 20 ou 25 %. A partir de là, s’engage, pour l’équipe, une véritable course contre le temps.

  • TGS 2014  – 20 et 21 septembre

Hajime Tabata est enfin officialisé seul et unique maître à bord de Final Fantasy XV. Sa tâche est simple, rattraper le temps perdu. Kingdom Hearts III accumulant des retards tout aussi problématiques, Tetsuya Nomura est renvoyé à son jeu phare qui n’est à ce jour pas terminé… Les personnages sont modifiés, Stella laisse la place à une Luna plus rentre-dedans, et la voiture fait son apparition. L’empreinte de Hajime Tabata et de son équipe est désormais évidente, même si la patte Nomura est toujours là, dans le look général des personnages.

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Raphaël Lucas - The Game