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E-santé : comment bien choisir votre plate-forme de téléconsultation

La téléconsultation fête sa première année de remboursement par la sécurité sociale. Voici un comparatif -non-exhaustif- des solutions proposées pour éviter les arnaques et les charlatans.

Le 15 septembre 2019 a marqué le premier anniversaire du remboursement de la téléconsultation. Après un an, la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) a remboursé plus de 60 000 consultations à distance partout en France. Même si le chiffre est bien loin de l’objectif de 500 000 fixé par le gouvernement en 2018, le rythme s’accélère. Depuis janvier 2019, le nombre de téléconsultations a été multiplié par cinq. Et pour le seul mois d’août, ce sont 10 000 téléconsultations qui ont été recensées. Les patients augmentent, certes, mais cette pratique reste encore assez confidentielle. En janvier 2019, 87% des Français déclaraient avoir déjà entendu parler de téléconsultation. Mais seuls 37% estimaient qu’ils sont globalement bien informés sur le sujet. 

Pour rappel, la téléconsultation est « une consultation réalisée à distance au cours de laquelle un patient et un médecin (généraliste ou spécialiste) se parlent et se voient par vidéo transmission » selon la Cnam. Lors de la consultation, le patient peut être -ou non- accompagné par un autre personnel de santé (infirmier, pharmacien, etc.). Les tarifs suivent la grille des rendez-vous en face-à-face (de 23 € à 58,50 €). Le remboursement est régi par des règles strictes établies par l’avenant 6 de la convention signée par la Cnam (2016). Il faut au préalable avoir déjà eu un rendez-vous physique avec le médecin au cours des douze derniers mois, que la téléconsultation respecte le « parcours de soin » comme une consultation classique et que les moyens techniques utilisés soient sécurisés. 

« C’est le patient qui a la responsabilité du choix de la solution de la téléconsultation », explique Annelore Coury, directrice déléguée à la gestion et l’organisation des soins de la Cnam. « Pour notre part, nous vérifions que ces actes s’effectuent selon les règles de l’accord pour les rembourser, via des contrôles a posteriori. Concernant une  labellisation des solutions techniques, des travaux sont en cours avec l’ASIP ( Agence française de la santé numérique). »

Surfant sur la vague, de nombreuses offres fleurissent sur le Net. Dans la jungle des sites spécialisés, il est parfois difficile de s’y retrouver. Pour y voir plus clair, nous avons testé cinq solutions de téléconsultation : Doctolib, Consulib, Livi, Qare et Télémedical. Nous vous livrons ici notre diagnostic sur cette nouvelle pratique médicale qui a le vent en poupe.

« 2 téléconsultations sur 3 ont été réalisées sur Doctolib. » Le chiffre revendiqué par la licorne française signifie que 40 000 des 60 000 téléconsultations remboursées se sont déroulées via leur plate-forme. Ce volume a d’abord été permis par les 1 500 médecins qui utilisent cette interface, mais aussi grâce à sa popularité chez les patients et son omniprésence dans le secteur de la e-santé. L’entreprise a simplement ajouté cette option à leur palette déjà bien rodée à la prise de rendez-vous. Le service de téléconsultation est disponible à la fois sur ordinateur, smartphone et tablette. L’initiative vient du patient. 
Avantage : l’option de vidéo-consultation n’apparaît que si et seulement si vous avez déjà consulté avec le médecin en question. Ce système de filtrage permet d’assurer le remboursement de la consultation à distance et donc d’éviter les mauvaises surprises.

01net.com – Sur l’appli Doctolib, un médecins que vous avez déjà consulté peut vous proposer une consultation par vidéo.
  • La plus commerciale : Livi

Fondée en 2015, la plate-forme suédoise appartenant au groupe Kry s’est implantée en France il y a un an. Livi s’est surtout fait connaître parce qu’elle a perdu une bataille juridique entamée face à la Sécu. Depuis janvier 2019, la Cnam a arrêté de rembourser les téléconsultations réalisées via cette plate-forme pour non-conformité à l’avenant 6. C’est pourquoi, sur les plus de 33.000 téléconsultations revendiquées par l’entreprise suédoise, seulement 10 à 15% ont fait l’objet d’un remboursement. Elles correspondent aux téléconsultations réalisées dans le centre de soin de Créteil. Dans le reste de la France, ce sont une quarantaine de médecins généralistes qui ont adopté cette plate-forme. Avant de prendre rendez-vous, il faut faire particulièrement attention, puisqu’il n’y a pas de filtre. Vous serez néanmoins avertis que la téléconsultation sera à vos frais. L’initiative vient du patient. 
À noter : Livi n’est disponible que sur mobile (Android et iOS).

Cette plate-forme « pensée par des médecins pour des médecins », comme aime à le rappeler le Dr Dagher, chirurgien et fondateur du site, permet elle-aussi à la fois la prise de rendez-vous, la téléconsultation et le partage de document des « tiroirs » plutôt très complets -une sorte de Dossier médical partagé (DMP) maison. La téléconsultation est à l’initiative de l’un des 400 médecins qui utilisent ce service. Résultat : plus de 90% des actes sont remboursées par l’Assurance maladie. L’initiative est à la charge du médecin.
Avantage : grâce à une fonction de sécurisation des données, il est possible de décider si on veut partager ou non ses données avec le docteur. Il faut simplement cliquer sur le cadenas.
Inconvénient : Sur le site, le service de vidéo fonctionne seulement sur Chrome -à moins de télécharger une extension sur les autres navigateurs.

01net.com – Capture d’écran interface de Consulib, côté patient.
  • La plus diversifiée : Qare

La plate-forme auto-proclamée « numéro 1 de la télémédecine » dénombre 40 000 téléconsultations depuis un an. Mais la majorité n’ont pas été remboursées. Qare revendique une centaine de praticiens actifs par jour, sans communiquer de nombre exact sur le nombre de médecins utilisateurs.
L’espace échange médecin-patient est complet. Parmi les solutions testées, c’est la seule qui propose au patient un système d’identification à double vérification (adresse mail + code envoyé par sms). L’initiative vient du patient.
Avantage : sur Qare, vous pouvez prendre également rendez-vous avec d’autres professionnels de santé que des médecins (sage-femme, kiné, psychologue, etc.).
Inconvénient :  si remboursement il y a, il se fait avec une feuille de soins physique à remplir et non pas directement avec la carte vitale.

Qare – La majorité des téléconsultations ne sont pas remboursées sur Qare.

La dernière solution que nous avons testée diffère structurellement des quatre autres. Télémedical est l’une des huit organisations territoriales reconnues par la Cnam qui proposent des services en téléconsultation dans des locaux « en dur ». Cette solution a vocation à couvrir le Grand Est, et non à se généraliser dans toute la France. Télémedical est déployée pour l’instant dans huit salles régionales, dont plusieurs télécabines. Ces téléconsultations s’effectuent à l’aide de professionnels de santé et sont uniquement à l’initiative du médecin.

Cette solution a été fondée par deux urgentistes de l’hôpital de Troyes, dans l’Aube, pour décongestionner les urgences dans lesquelles ils travaillent. À partir de l’ouverture du centre en décembre 2018, les téléconsultations n’ont fait qu’affluer. Le Dr Goudour, un des fondateurs estiment que 1 600 téléconsultations ont été réalisées en seulement un mois. De fait, avec cette solution toutes les consultations sont remboursées. L’initiative ne peut venir du patient, elle est forcément initiée par le médecin.

Bien se préparer

« Le passage à la téléconsultation est nécessaire, estime le Dr Goudour. Sinon, nous, les médecins, nous allons être remplacés par des “médecins de plates-formes” travaillant pour des sites dont l’objectif n’est que marchand. »

Selon l’urgentiste, l’enjeu est crucial. Patients comme médecins, il faut savoir distinguer les différentes offres pour ne pas tomber dans l’ubérisation de la santé. D’autant que la téléconsultation va se généraliser. Selon la dernière étude de la Mutuelle d’assurance des professionnels de la santé (MACSF) publiée en 2018, 73% soit 3 sur 4 des médecins estiment que la télémédecine fera partie de leur quotidien en 2030.

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Marion Simon-Rainaud