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Données personnelles : le projet à double tranchant de Bruxelles

La Commission européenne veut imposer aux services en ligne tels que Gmail, WhatsApp ou Facebook Messenger qu’ils obtiennent le consentement préalable de leurs utilisateurs pour exploiter leurs données personnelles et qu’ils soient soumis aux mêmes règles que les opérateurs.  

50% des citoyens européens utiliseraient au moins une fois par semaine des messageries directes et 41% passeraient des appels audio ou vidéo via Internet, selon la Commission européenne. C’est ce qu’on appelle des services par contournement ou OTT (over the top) en anglais. Jusqu’à présent, ils n’étaient pas soumis aux mêmes règles que les opérateurs traditionnels, contraints de garantir la confidentialité des communications en vertu de la première directive ePrivacy de 2002. Eh bien, c’est terminé ! Face aux nouveaux usages des Européens, la Commission européenne a concocté un nouveau projet de règlement ePrivacy qui englobe pour la première fois tous les Skype, WhatsApp, Facebook, Messenger, Gmail, iMessage et autres Viber.

Les utilisateurs auront davantage de contrôle sur leurs informations

La première conséquence, c’est que ces services ne pourront plus exploiter les données personnelles de leurs utilisateurs aussi facilement qu’avant. Déplacements, nombre de messages envoyés et reçus, photos et vidéos partagées, appels émis, etc.. Google, Facebook et Microsoft accumulent quantités d’informations sur chacun d’entre nous, en plus de nos données personnelles, qui permettent de mieux qualifier notre profil et de nous cibler. Une mine d’or commerciale qu’ils exploitent sans vergogne à partir du moment où vous avez simplement accepté leurs conditions d’utilisation.

Et impossible de refuser ce partage d’informations si vous désirez bénéficier du service. Avec ces nouvelles règles, il faudra désormais qu’ils obtiennent également votre consentement préalable pour réaliser tout cela. Et même si vous refusez, vous aurez tout de même accès au service.      

D’autres obligations incomberont aux acteurs du net, comme l’accès gratuit à des numéros d’urgence, l’accessibilité des services aux personnes handicapées, ou encore la communication des rapports aux autorités en cas d’intrusion dans leur système. 

L’application de ce texte, qui doit encore être discuté, est prévue pour le mois de mai 2018. On doute cependant de la bonne volonté des géants du Web d’appliquer un tel texte, à priori très contraignant pour eux.

C’est en tout cas une bonne nouvelle pour leurs utilisateurs, qui récupéreront ainsi davantage de contrôle sur leurs données personnelles. Et une victoire pour les opérateurs traditionnels qui ont obtenu de haute lutte cet égalité de traitement. 

Les opérateurs traditionnels vont-ils exploiter le contenu de nos données ?

Ce n’est pas leur seul sujet de contentement d’ailleurs. Car la Commission européenne prévoit de leur accorder un sacré cadeau : davantage de souplesse pour exploiter à la fois « le contenu des données et les métadonnées des communications », afin de « fournir des services supplémentaires ». Toujours à condition d’avoir obtenu le consentement préalable de l’utilisateur.

La Commission européenne ne donne pour le moment qu’un vague exemple de service de géolocalisation pour déterminer la fréquentation d’un lieu sous forme de cartographie. Une pratique qui existe déjà en France, par exemple, via les dispositifs Flux Vision Orange ou Geostatisctics de SFR. Mais la CNIL n’autorisait jusqu’alors que deux cas de figure. Sans consentement préalable, il était possible d’exploiter des métadonnées anonymisées pour analyser la fréquentation de zones géographiques et les déplacements de population dans le domaine du tourisme, de l’aménagement du territoire ou du trafic routier.

Avec consentement préalable, ces mêmes données servaient à envoyer des SMS et MMS ciblés. Les opérateurs seront-il autorisés à l’avenir à lire nos mails et écouter nos conversations à des fins publicitaires ? Le projet a de quoi effrayer et demande à être explicité.

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Amélie Charnay