Passer au contenu

Comment le gouvernement veut imposer des quotas sur les plates-formes de streaming musical

Franck Riester souhaiterait établir des quotas de titres francophones sur les plates-formes de streaming, à l’instar des radios. C’est une des pistes du gouvernement dans le cadre du projet de loi sur l’audiovisuel présenté à la rentrée. 

Le ministre de la Culture Franck Riester a déclaré vendredi 8 novembre réfléchir à un dispositif qui obligerait les plates-formes de musique en streaming, comme Deezer ou Spotify, à mieux mettre en avant les artistes francophones. L’objectif invoqué serait que les plates-formes se plient aux mêmes règles que les radios.

Au nom de l’équité 

« Ce n’est pas logique […] qu’il y ait une rupture d’égalité, d’équité, entre les radios et les plates-formes de streaming, donc nous sommes en train de travailler à des dispositifs qui obligent les plates-formes de streaming aussi à exposer mieux les contenus francophones », a affirmé le ministre de la Culture au micro d’Europe 1.

C’est une des revendications des groupes radiophoniques depuis l’annonce du projet de réforme de l’audiovisuel par le gouvernement. Jusqu’à présent, les plates-formes échappent totalement aux règles en matière de quotas d’artistes francophones créées en 1994. Cette réglementation oblige les radios à diffuser aux heures d’écoute significative un minimum de 40% de chansons d’expression française, dont la moitié au moins provenant de nouveaux talents ou de nouvelles productions.

Vers la fin du « plafonnement des rotations » ? 

De manière générale, les radios souhaiteraient que ces quotas soient assouplis et réclament notamment la suppression de la règle dite de « plafonnement des rotations », apparue en 2016, qui les contraint à diversifier leur liste de titres francophones. Cette disposition précise ainsi que si plus de la moitié du total des diffusions des chansons françaises se concentre sur les dix chansons françaises les plus programmées par une radio, leur diffusion intervenant au-delà de ce seuil de 50% ou n’intervenant pas à des heures d’écoute significative ne sont pas prises en compte pour le respect des quotas.

Mais, de con côté, le gouvernement ne semble pas remettre en cause cette mesure de discrimination positive.

« Les quotas de musique francophones sont très pertinents, ils ont des résultats, puisqu’on voit bien qu’il y a une émergence très importante de nouveaux artistes français », a estimé Franck Riester, sur l’antenne d’Europe 1, fermant ainsi la porte à un abandon des quotas francophones.

Une des pistes évoquées par les professionnels du secteur serait d’obliger les plateformes de streaming à augmenter la part des titres d’artistes francophones dans leurs « playlists ».

Risque d’« asymétrie »

Interrogé par l’AFP, Ludovic Pouilly, président du Syndicat des éditeurs de services de musique en ligne (ESML, organisme qui défend les intérêts des plates-formes), a estimé en substance qu’une telle mesure serait injustifiée et affaiblirait tout un pan de l’industrie musicale.

« La comparaison des services musicaux en ligne avec les radios n’est pas justifiée » et « un dispositif similaire à celui des quotas radios, créerait une asymétrie avec les autres canaux de distribution musicaux tels que les distributeurs physiques, bien plus comparables à nos plates-formes », a-t-il plaidé.

En outre, le président de l’ESML a assuré qu’il n’y a aujourd’hui « aucune indication d’une anomalie de marché qui justifierait ou nécessiterait l’intervention du législateur ». Il estime aussi que le streaming musical, « principale source de croissance de l’industrie musicale en France », forme encore « un secteur fragile, qui doit être soutenu par les pouvoirs publics ». 

Cette piste de réflexion fait écho aux débats qui se posent également pour les plates-formes de streaming vidéo, telles que Netflix, Apple Tv+ ou Disney+, qui chamboulent le cadre télévisuel français. 

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Marion Simon-Rainaud avec AFP