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Chronique : Il ne faut pas confondre l’utilisateur et le client

En résumé : le principal défi à relever pour l’informatique sera de donner au PC la capacité de communiquer naturellement et avec fiabilité avec lhomme.

Quelque vingt ans après sa consécration officielle par IBM, nous ressentons bien que certaines ” incompréhensions ” deviennent de plus en plus irritantes entre le monde de l’informatique et l’ensemble de ses utilisateurs. Pour la première fois de son histoire, nous pourrions constater, à la fin 2001, qu’il s’est vendu dans le monde moins de PC que l’année précédente.Avant que ces incompréhensions ne se transforment en divorce, il est nécessaire que nous dégagions une ligne d’horizon pour mieux comprendre ce que pourrait être notre monde dans vingt ans, dans ce domaine majeur des nouvelles technologies de l’information et de la communication.L’histoire du PC est avant tout une aventure technologique extraordinaire. L’ensemble de ses caractéristiques techniques ont vu leur vitesse, leurs capacités être multipliées par dix mille, sinon plus. Mais, dans toute cette démarche un personnage pourtant central a été frustré : c’est l’utilisateur.Dans ce domaine plus que dans tout autre, il ne faut pas confondre l’utilisateur et le client. Ce dernier, bien servi par la loi de Moore, n’a pas à se plaindre. L’utilisateur, lui, alors que de nouveaux systèmes d’exploitation annoncés ne sont pas encore sortis, constate toujours d’aussi nombreux plantages avec ” écran bleu ” et, surtout, que ses échanges avec son PC, qui passent encore par le clavier et la souris, ne s’est pas améliorée en vingt ans !Je suis convaincu que la principale innovation portera sur les usages. Comme le moteur l’a fait dans la première moitié du XXe siècle, l’ordinateur individuel devrait profondément se transformer pour disparaître dans l’ensemble des objets les plus usuels.Pour réussir, il est condamné à perdre sa place bien visible (trop ?) pour se fondre dans notre environnement, afin de se substituer à une partie de notre mémoire et nous aider dans le déroulement des process trop complexes. Cela est nécessaire pour que le PC, comme ses illustres prédécesseurs que sont le moteur, la radio, la télévision ou le téléphone, conquière toute l’humanité.C’est là le principal défi pour ces vingt prochaines années. Mais, pour atteindre cet objectif, qui va d’ailleurs mener à une fusion entre l’ordinateur et tous les illustres prédécesseurs que je viens de citer, ce nouveau monde technologique devra acquérir la capacité de communiquer ” naturellement ” et avec une grande fiabilité avec l’homme.Cette interface naturelle, qui s’appuiera essentiellement sur la reconnaissance vocale et sur une reconnaissance intelligente de l’écriture, est la première des priorités. Tant qu’il faudra un clavier et une souris pour échanger avec ces machines, elles ne pourront relever le défi qui leur est lancé.Il devient urgent, pour répondre à la morosité qui s’étend actuellement sur l’ensemble du monde des technologies de l’information et de la communication, que les managers des principaux groupes d’informatique ou de télécommunications nous fassent bien comprendre que la priorité des priorités devient, pour eux, l’acquisition des usages pour chaque nouvelle technologie, et non pas la prouesse technique en elle-même. Cela est d’autant plus important que le rapport entre l’homme et la technique a été profondément bouleversé dans ces dernières décennies.Depuis un siècle, l’électricité, le téléphone et même la télévision ont été à peu près synchrones avec la vie de l’homme. Par contre, l’accélération des techniques va être telle que nos enfants et petits enfants auront à absorber quatre à cinq révolutions technologies majeures dans leur vie, tout au long de ce XXIe siècle. Si les leaders technologiques, qui sont devenus les décideurs essentiels du cours de notre vie, ne prennent pas conscience que l’appropriation des usages par l’homme devient la première de leur priorité, il serait à craindre que n’apparaisse une profonde fracture culturelle entre l’humanité et les technologies.Après que nous ayons pris conscience depuis un quart de siècle qu’il nous fallait avoir plus de considération pour la nature, il est indéniable que le principal défi de ce prochain quart de siècle est de voir la technologie accepter de s’effacer devant l’homme en le comprenant mieux pour qu’il soit plus heureux.

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Par René Trégouët, sénateur du Rhône, président du groupe de prospective du Sénat.