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CES 2013 : Technicolor analyse les sentiments des spectateurs

L’analyse des signaux biologiques permet d’établir des profils émotionnels. Et de trouver les programmes qui nous conviennent.

Demain, vous ne taperez peut-être plus de mots clés pour trouver un film qui vous plaise : vous demanderez au logiciel de votre téléviseur de trouver un film qui colle à votre profil émotionnel ! L’idée, pas si saugrenue que ça, est de caractériser notre empreinte émotionnelle, d’établir un profil de nos réactions afin de déterminer le programme auquel nous serons le plus sensible.

« Quand on interroge les gens sur ce qu’ils ont aimé dans un film, c’est d’abord une restitution intellectuelle, un rapport cérébral où ils peuvent être tentés de répondre ce que leur interlocuteur veut entendre », explique Gary Donnan, responsable de la technologie et de la recherche chez Technicolor. « Mais quand on s’intéresse à vos signaux biologiques, la réponse est animale, il est plus difficile de mentir ».

Ce projet d’analyse des signaux biologiques n’est qu’un des nombreux projets de recherche du champion français de la production cinématographique, mais il est suffisamment au point pour s’exposer au CES.

La première transposition de ce projet dans le monde réel touche logiquement le cinéma : les équipes de Technicolor ont utilisé des capteurs sensitifs qu’ils ont placés dans les mains de spectateurs volontaires. Le petit capteur doit être en contact avec la peau et analyse de manière fine l’évolution des tensions à sa surface. Le signal brut passe ensuite dans une moulinette d’algorithmes secrets ce qui conduit à un graphique synthétisant vos réactions.

Dans le film “De rouille et d’os”, la scène finale, dure et chargée d’émotions, fait réagir fortement l’ensemble des spectateurs. Mais si « Les réactions face à certaines situations types sont souvent les mêmes, leur intensité varie », continue Gary. « Par exemple, les personnes plus âgées réagissent de manière moins intense, sans doute le résultat de leur expérience de vie. » Outre les différences générationnelles, il y a aussi des différences entre les sexes. Le sourire aux lèvres, Gary explique « que dès qu’une jolie fille ou une voiture apparaît à l’écran, les hommes réagissent de suite, mais pas les femmes ! ».

A quoi ce type de technologie peut-elle servir ? A quoi et surtout à qui ? « Pour l’instant, nous sommes en phase de prospection, mais nous pensons bien sûr au cinéma. On peut imaginer des solutions qui permettent aux studios d’avoir des retours émotionnels sur leur film, pour les aider à analyser et améliorer le contenu », détaille Gary. « Du côté des utilisateurs, on imagine qu’on pourrait choisir nos films non seulement en fonction de nos envies -envie d’avoir peur, d’aventure, de romance- mais aussi de notre profil biologique. La base de données appliquerait notre profil à ceux des films pour trouver le bon programme ».

Mais ne risque-t-on pas de voir les studios calibrer les films uniquement pour nous faire réagir ? A cette question, Gary explique que « le fait qu’on réagisse ne fait pas forcément d’un film qu’il soit un bon film ! Ce n’est que la mesure de l’intensité d’une réaction. De plus ce système permettrait peut-être à des productions indépendantes de remonter dans les requêtes de recherche puisqu’il ne s’agit pas ici de note, de mots clés, etc. mais d’une compatibilité de profil émotionnel », ajoute-t-il.

Concernant les inquiétudes liées à un fichage de notre identité émotionnelle, le ton est ferme. « Le système ne peut marcher que s’il est basé sur la confiance. Nous mettons tout en œuvre pour que la vie privée soit protégée », garantit Gary. « Nous appliquons des algorithmes d’obfuscation (protection de la vie privée) pour rendre les données illisibles par d’éventuels pirates. De plus, nous n’avons pas le détail des émotions réelles des gens : nous sommes capables de connaître, au bout d’un certain temps, quelles sont les scènes qui vous font réagir et de trouver un programme adapté », ajoute-t-il.

L’idée est séduisante puisque si l’émotion n’est pas la garantie d’un bon scénario, le système d’analyse offre une autre porte d’entrée dans le choix des programmes. Et de nombreuses autres applications sont même envisageables : pourquoi pas un profil émotionnel partageable sur les réseaux sociaux pour voir qui a les mêmes goûts que vous. Mais attendez, l’analyse des émotions -du langage du corps en somme- ça pourrait parfaitement s’appliquer aux sites de rencontre, non ? « Les applications sont multiples et nous sommes pour l’heure très prudents », tempère Gary. Mais le potentiel de la technologie est énorme. »

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Adrian Branco