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Au secours, le téléphone sur IP arrive

Lorsque le réseau informatique plante, on empoigne le téléphone pour avertir le service de maintenance. Et demain, lorsque le téléphone empruntera aussi le réseau informatique, que fera-t-on en cas de panne? Par Jean-Pierre Soulès

On peut reprocher tout ce que l’on veut au réseau téléphonique actuel : lent, mal adapté au transport des données, cher à exploiter, propriétaire. Mais il est d’une fiabilité à toute épreuve. Et lorsque, d’aventure, une fois tous les deux ou trois ans, il cafouille un peu, cela devient une affaire d’Etat et l’événement a droit à sa place aux journaux télévisés.Les constructeurs de réseaux informatiques ?” Cisco en tête ?” veulent raser tout cela, arguant que les télécoms d’aujourd’hui ressemblent aux grands systèmes IBM d’antan : propriétaires et chers. Sans doute, mais il étaient aussi très fiables. Aujourd’hui, lorsqu’il faut appeler le 17 ou le 18, on prend son téléphone, sans imaginer une seconde qu’on n’aura pas la tonalité. Si, demain, il faut attendre que le serveur informatique soit prêt pour acheminer l’appel, on pourrait bien avoir de mauvaises surprises. Il y a du pain sur la planche avant d’atteindre les fameux 99,999 % de disponibilité des systèmes téléphoniques actuels.Certes, mais l’enjeu est tout autre, rétorquent les tenants d’IP (Internet Protocol). Car il s’agit de passer d’un monde propriétaire à un monde ouvert ; d’une technologie conçue pour la voix (commutation de circuits) à celle développée pour les données (commutation de paquets), puisque ce sont celles-ci qui vont désormais largement dominer.Sans doute, mais lorsque, derrière mon petit modem à 56K, j’attends interminablement de voir une page Web s’afficher, le compteur des octets envoyés et reçus figé, seulement animé d’un soubresaut de temps en temps, je me dis que le compteur téléphonique de mon opérateur local tourne, lui. Et que la facture va être salée.Dans le monde des ” Nouvelles Télécommunications ” de demain, il n’y aura plus de taxation à la durée, comme aujourd’hui, mais au volume, proclament les évangélistes d’IP.Sans doute, mais avant que chaque abonné dispose d’une connexion ADSL ou câble, il va couler de l’eau sous les ponts. Et pendant ce temps, derrière mon petit modem à 56K, j’attends toujours l’affichage de la page. Et le compteur tourne toujours.Oui, mais des mécanismes de qualité de service vont permettre de mettre un peu d’ordre dans le trafic sur les réseaux IP et de donner la priorité à des trafics sensibles, comme la voix. On obtiendra ?” et beaucoup plus économiquement ?” la même qualité qu’aujourd’hui, affirment toujours les prophètes des télécoms de demain.Sans doute, mais pour le moment, c’est un peu la foire d’empoigne, chacun y va de sa solution plus ou moins propriétaire, anticipant largement sur la normalisation. Espérant prendre ses rivaux de vitesse et les mettre devant le fait accompli.Et pendant que ces messieurs s’étripent, derrière mon petit modem à 56K, j’attends toujours ma page. Et le compteur de lopérateur tourne, tourne, tourne…Prochaine chronique le vendredi 9 juin

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Jean-Pierre Soulès, grand reporter