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(Mise à jour) Tariq Krim : ‘ Le piratage pourrait être compensé par la licence légale ‘

Editeur du site Génération MP3, Tariq Krim a étudié la viabilité du peer-to-peer comme modèle économique pour la musique en ligne. Des réflexions qui se heurtent aux réticences de l’industrie du disque.

C’est pour l’Adami, société civile de gestion de droits pour les artistes, musiciens et interprètes, que Tariq Krim a présenté mardi 15 juin au cours d’un colloque à la Mutualité, à Paris, ses travaux censés démontrer que le
peer-to-peer peut devenir le nouveau générateur de croissance pour l’industrie du disque. Ces travaux intègrent la proposition de l’Adami d’une licence légale prévue pour compenser le préjudice subi par les artistes à cause du
piratage.Autant d’idées qui passent mal, comme l’ont démontré les discussions houleuses lors du colloque entre les divers participants au débat, de la Sacem aux labels indépendants, en passant par l’UFC-Que Choisir ou les organisations
syndicales (CGT, CFDT).01net. : Qu’est-ce qui a amené l’Adami à commander cette étude sur le peer-to-peer ?Tariq Krim : Il existe des gens, dans les maisons de disques, qui ne savent absolument pas ce qu’est le peer-to-peer. Ils l’ont idéalisé et ne voient pas ses défauts qui,
justement, pourraient être exploités pour en faire quelque chose de valable.Quel serait le mécanisme de la licence légale ?L’idée de la licence légale c’est de dire : il y a un phénomène [le peer-to-peer, NDLR], on ne peut pas l’arrêter. Mais il existe un système qui s’appelle la copie privée, on pourrait l’étendre. Le problème
de la copie privée, c’est qu’il faut identifier ce qui est copié. Ce ne sera pas parfait, mais ça peut se faire.Cela revient quand même à légitimer quelque chose d’illégal ?Non, ça ne légaliserait rien, ça compenserait. Car ce à quoi il faut parvenir, c’est faire migrer les gens qui téléchargent illégalement, sur Kazaa par exemple, vers des services de peer-to-peer payants et légaux.
Même si on avait 60 % d’internautes sur ces services légaux, il resterait toujours un pourcentage sur les services sauvages. La licence légale servirait à compenser ce chiffre.Vous parlez de développer un peer-to-peer légal en corrigeant les défauts actuels de ce genre de plate-forme. Cela donnerait quoi, concrètement ?Des contenus homogènes en qualité. Aujourd’hui, 60 % des requêtes pour obtenir un album complet avec la même qualité sur tous les titres se soldent par un échec. Le MP3 n’est pas un très bon format, contrairement à des formats,
comme Flac (Free Lossless Audio Codec) par exemple, qui permettent une écoute en qualité CD.Le dispositif de la licence légale prévoit d’impliquer les FAI. Comment ?Ils représentent un outil de collecte formidable. Quand vous payez votre abonnement télé au câble, vous envoyez votre chèque à Noos, pas à Paris Première. Là, ce serait la même chose, une partie de l’abonnement servirait à la
rémunération des ayants droits.Mais qu’en pensent-ils ? Ils n’étaient pas au colloque de l’Adami.Il y a de très bonnes discussions avec les FAI. Mais ils craignent de faire office de boucs émissaires. Ainsi, si une maison de disques fait fermer votre compte, vous n’allez pas vous dire que ça vient de Universal, mais de Wanadoo.
Du coup, vous partez vous inscrire chez Free. Les FAI sont une quinzaine aujourd’hui, mais dans quelques années, ils seront trois. Forcément, leur problématique est ailleurs.Et du côté des maisons de disques, quels sont les blocages ?Il faut passer d’un mode de gestion label par label à une gestion collective des rémunérations. Seule la Sacem est déjà capable de le faire. Excepté pour les sonneries de mobiles, les producteurs ne veulent pas gérer collectivement,
car c’est une atteinte à leurs droits exclusifs.Cette manière de vendre de la musique nécessite aussi un changement d’état d’esprit ?C’est vrai que c’est difficile à admettre, mais ce ne serait plus le contenu le plus important mais le service. L’industrie s’est tellement focalisée sur les pirates quelle en a oublié ses clients.

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Arnaud Devillard