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Les États-Unis veulent créer un «crypto-dollar», une opération risquée ?

Deux prototypes d’un dollar numérique sont actuellement en préparation et devraient être présentés en juillet prochain. Mais le secteur bancaire ne voit pas cela d’un bon œil, car il a peur d’être court-circuité.

Les établissements bancaires des États-Unis sont en alerte. Selon Bloomberg, le Massachusetts Institute of Technology (MIT) et la Banque fédérale de Boston comptent présenter, en juillet prochain, deux prototypes d’un futur dollar numérique.
Personne ne sait sur quelles technologies ils s’appuieront, mais le but est bien de créer un équivalent numérique du billet vert, qui pourra s’échanger directement comme de l’argent liquide, sans intermédiaire bancaire.

Évidemment, les banques et les réseaux de paiement ne voient pas cela d’un bon œil. L’association des banquiers américains (American Bankers Association, ABA) estime que le dollar numérique est « un projet coûteux pour résoudre un problème qui n’existe pas ». En réalité, les banquiers ont surtout peur de voir disparaître certaines de leurs activités de base, à savoir la distribution, le stockage et l’échange de la monnaie.

Risque d’effondrement

L’argent que procure une banque sous forme de crédit, par exemple, provient en fait de la banque centrale. L’intermédiaire bancaire le distribue à ses clients moyennant un taux d’intérêt. Avec un dollar numérique, la Fed pourrait distribuer directement cet argent aux citoyens. C’est d’ailleurs l’un des buts revendiqués ouvertement par la secrétaire au Trésor Janet Yellen, qui espère qu’un tel crypto-dollar permettra d’aider les Américains qui n’ont pas accès au système bancaire.

Le risque, c’est que ce nouveau système phagocyte l’ancien. Les citoyens pourraient avoir envie de vider leurs dépôts bancaires au profit d’un ou plusieurs wallets en crypto-dollar. Ce serait assez logique, car cela supprimerait le risque que fait peser l’intermédiaire. Le dollar numérique est une véritable monnaie de banque centrale alors qu’un dépôt n’est qu’une créance de monnaie centrale, pour laquelle l’établissement bancaire doit garantir la convertibilité.

Or, on voit mal comment l’activité commerciale d’une banque pourrait survivre si elle n’a plus de dépôts. Par ailleurs, une banque centrale ne pourrait que difficilement remplir le rôle des  banques commerciales, dans l’attribution des crédits et le conseil aux investissements.
Enfin, comment une banque centrale va-t-elle pouvoir piloter sa politique monétaire si ses principaux rouages, les banques, sont défaillants?

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La création d’un dollar numérique peut donc sembler simple en apparence, mais suscite en réalité beaucoup de questions, et sans que l’on sache vraiment quels sont les bénéfices à l’arrivée.
Certains mettent en avant la rapidité et le faible coût de transaction, compte tenu de la disparition de certains intermédiaires. Mais cette rapidité reste à être prouvée. Le bitcoin a montré que la blockchain n’était pas forcément la bonne technologie pour traiter rapidement un grand nombre de transactions, en raison de sa lourdeur.

Mais force est de constater que les États-Unis ne sont pas les seuls à s’engouffrer dans la numérisation de leur monnaie. L’Europe y réfléchit aussi et la Chine a d’ores et déjà déployé son crypto-yuan dans certaines régions à titre expérimental.
Ces initiatives semblent avant tout défensives. Les banques centrales craignent que la montée en puissance du bitcoin et de toutes les autres cryptomonnaies puisse menacer leur souveraineté.

Source : Bloomberg

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Gilbert KALLENBORN