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La tempête Napster va tout balayer…

Flash-back, années 20, aux Etats-Unis. La radiodiffusion sans fil est inventée. Des industriels commencent à fabriquer des radiorécepteurs. Un marché de masse naît. Des entrepreneurs lancent…

Flash-back, années 20, aux Etats-Unis. La radiodiffusion sans fil est inventée. Des industriels commencent à fabriquer des radiorécepteurs. Un marché de masse naît. Des entrepreneurs lancent les premières chaînes de radio indépendantes et diffusent des enregistrements sans payer de royalties aux artistes. Les maisons de disques lancent des procès retentissants contre les nouveaux “flibustiers” des ondes et annoncent la fin prochaine des stations de radio.L’histoire, semble-t-il, se répète aujourd’hui avec la révolution MP3. Ces dernières semaines, les grandes maisons de disques ont croisé le fer avec MP3.com ou Napster et déclaré que ces nouveaux pirates du web étaient condamnés. Erreur ! Ces jeunes hackers du monde MP3 ont ouvert une brèche définitive dans le business de la musique, mais aussi dans celui du film. Le public et même certains acteurs de l’industrie n’ont pas encore saisi l’ampleur du choc.

En ADSL, une minute suffit déjà pour télécharger un fichier MP3

Les chiffres sont frappants. Il y a aujourd’hui, dans le monde, plus de 200 millions d’ordinateurs personnels (PC) multimédia, c’est-à-dire capables de lire et de rejouer de la musique enregistrée sous forme numérique. Cette musique a déjà été diffusée de façon légale (hors contrefaçons) sur 17 milliards de CD. Et chacun d’eux peut facilement être enregistré dans le disque dur des 200 millions de PC…
Jusqu’à cette année, certes, la capacité de stockage d’un ordinateur et la vitesse de transmission des données via l’internet rendaient l’échange de fichiers musicaux entre individus pratiquement impossible. En effet, la taille moyenne d’un fichier MP3 contenant une chanson est de 4 mégaoctets (10% d’un disque dur) ; et son transfert prend de sept à dix minutes avec un modem et une ligne téléphonique normaux. On comprend qu’un consommateur moyen, qui possède un PC acheté avant 1998 et 30 disques, souffre. Ne parlons pas de l’audiophile qui, lui, possède 200 disques et peut, potentiellement, échanger jusqu’à 5 000 titres avec ses amis.Tous ces freins tendent à disparaître. Déjà, si vous êtes connectés au web avec une liaison ADSL, le temps de chargement d’un fichier MP3 descend à une minute. Dans le domaine des semi-conducteurs ?” les composants des disques durs de nos ordinateurs ?”, la loi, dite de Gordon Moore (le fondateur d’Intel), continue de se vérifier : à prix et dimension égaux, la mémoire est multipliée par deux tous les dix-huit mois. On peut déjà acheter pour 150 dollars un nouveau disque dur de 30,7 gigaoctets de mémoire ?” de quoi contenir 614 CD au format MP3. Bill Gurley, l’un de mes associés chez Benchmark Capital, s’est récemment amusé à calculer que, dans cinq ans, le disque dur de base à 150 dollars pourra contenir jusqu’à 6 000 disques. Et 150 000 en 2012, soit l’ensemble des albums produits par l’industrie de la musique ! Idem pour la vitesse de transmission. D’ici à six ans, la connexion à haut débit disponible pour tous les foyers permettra de transmettre un titre en quatre secondes et un album en moins d’une minute.

La révolution va s’étendre au business des films

Les conséquences industrielles sont gigantesques. Aucun tribunal ne les empêchera. Personne ne pourra entièrement enrayer l’échange de fichiers numériques entre particuliers (sauf à surveiller tous les PC de la planète). Un ordre nouveau entre les auteurs, les éditeurs, les distributeurs et les consommateurs va donc se créer. En clair, les consommateurs achèteront de la musique depuis un PC ou un objet nomade connecté en s’abonnant par exemple à la production d’un artiste ou en payant les royalties sur les morceaux choisis (avec leur carte de crédit ou en l’ajoutant d’un clic sur leur facture de téléphone ou d’accès au Net).De nouvelles entreprises vont émerger de ce raz-de-marée. Les pionniers sont de jeunes sociétés américaines comme MP3.com et Liquid Audio ou européennes comme Vitaminic, Peoplesound, iCrunch, BeSonic, WebListen et les francais HyperTuner et FranceMP3. Les leaders de demain seront issus de fusions entre ces start-up et des majors du disque, de l’accès au Net (type AOL) ou les pionniers du web (Amazon, Yahoo!, etc.).Les bouleversements s’étendront au business des films, comme le montre le projet de fusion Vivendi-Seagram. En effet, l’augmentation de la bande passante accessible à l’internaute amènera les gens à échanger entre eux des images animées ou des vidéos. Il y a là de fantastiques opportunités pour les entrepreneurs… et les avocats.

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Eric Archambeau, general partner de Benchmark Capital