Passer au contenu

Dominique Burger (BrailleNet)

‘ Plus on retarde le chantier de l’accessibilité Web, plus il coûtera cher. ‘

Dominique Burger, ingénieur de recherche à l’Insermest, eet président de BrailleNet, une association qui fait campagne depuis 1997 pour rendre les sites Web accessibles aux handicapés. La bataille ne fait que commencer.Décision informatique : Il y a un an, le Parlement adoptait la loi sur l’égalité des droits et des chances, qui précise que tous les sites Web publics disposent d’un délai de trois ans pour se
rendre accessibles aux handicapés. Où en est-on aujourd’hui ?



Dominique Burger : Nous sommes en plein flou, car le décret d’application de la loi n’a toujours pas été publié, et personne n’est capable de nous dire quand il le sera. C’est décevant. Cela
montre en effet l’absence de volonté politique de rendre le Web accessible aux handicapés. On peut probablement expliquer ce retard par la craintedes coûts que l’application de cette loi engendrerait.


Aujourd’hui, du côté des pouvoirs publics, l’heure est aux économies. Mais, à mon avis, c’est un mauvais calcul. Plus on retarde le chantier de l’accessibilité Web, plus il coûtera cher. Le jour où l’on
réalisera que l’ouverture du Web à tous est une nécessité absolue, il faudra alors reconstruire tous les sites.Justement, combien coûte un site Web accessible aux handicapés ?


D ‘après quelques cas pratiques de sites ayant reçu le label AccessiWeb, le surcoût au moment de la conception est d’environ 25 %. Mais, si une dynamique est lancée, ces coûts vont s’effondrer car les processus
seront industrialisés par les agences Web et par les développeurs de sites Web formés à cette problématique.Concrètement, quels sont les outils ou les produits techniques à acquérir pour rendre son site Web accessible ?


Il n’y a aucun outil supplémentaire à intégrer. En revanche, il faut concevoir le contenu Web afin de le rendre indépendant de toute plate-forme technique. Autrement dit, il faut séparer le fond de la forme, ce qui permet, entre
autres, la lecture des pages Web à l’aide d’un afficheur braille ou d’une synthèse vocale.


Rendre son site Web accessible, c’est respecter toute une série de règles en matière de graphisme, de construction de pages et de navigation. C’est, par exemple, ne pas oublier d’accompagner les photos de légendes
explicatives et de bannir les frames. En fait, ces bonnes pratiques profitent à tous, et pas seulement aux handicapés.Un jour ou l’autre, les sites Web publics devront probablement respecter ces règles. Qu’en est-il de tous les autres ?


En dehors du fait que rendre le Web accessible à tous est un acte citoyen, il ne faut pas oublier que, d’après l’Insee, 10 % de la population souffre d’un handicap plus ou moins lourd. En France,
aujourd’hui, on recense 70 000 aveugles et entre 1 et 1,5 million de mal voyants. Sans compter qu’avec le vieillissement de la population, ces chiffres devraient évidemment augmenter. Plus que d’autres encore, ces
personnes sont avides de pouvoir communiquer, échanger ou acheter sur Internet.


Enfin, n’oublions pas que les entreprises comptent des handicapés dans leurs effectifs, comme la loi les y oblige. On comprend aisément l’intérêt d’avoir des intranets d’entreprise accessibles à tous.Quelle est la valeur du label de qualité AccessiWeb, élaboré par Braille Net et déjà attribué à une quinzaine de sites ?


Ce label qualifie l’accessibilité d’un site Web dans son concept général. Il reprend les recommandations internationales du W3C/WAI [Web Accessibility Initiative, NDLR]. Il se compose d’une méthode
d’évaluation et d’une liste de 92 critères qui ont été intégrées depuis 2003 dans le référentiel de l’ex-ADAE [Agence pour le développement de l’administration électronique, NDLR], comme base de
travail de l’administration en matière d’accessibilité.

🔴 Pour ne manquer aucune actualité de 01net, suivez-nous sur Google Actualités et WhatsApp.


Didier Géneau