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Accord parental, vérification de l’âge… Pourquoi la loi sur la majorité numérique sera difficilement applicable

Les moins de 15 ans ne pourront plus s’inscrire sur les réseaux sociaux sans accord parental, selon une proposition de loi qui vient d’être adoptée au Parlement. Problème : cette règle nécessite un système de vérification de l’âge qui n’est pour l’instant pas arrêté.

Instagram, Snapchat, TikTok et tous les autres réseaux sociaux auront bientôt l’obligation de vérifier l’âge de tous leurs utilisateurs. S’ils ont moins de 15 ans, ils devront s’assurer que l’un des titulaires de l’autorité parentale a bien donné son accord. Ces deux nouvelles obligations font partie de la proposition de loi « visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne » qui vient d’être adoptée au Parlement, jeudi 29 juin. Le texte a l’ambition de davantage protéger les mineurs dont la toute première inscription à un réseau social a lieu vers 8 ans et demi, selon la Cnil.

Le consentement des parents : sous quelle forme ?

Il existe déjà des règles censées protéger les enfants des dangers des plateformes, mais elles sont peu efficaces. Les réseaux sociaux imposent par exemple un âge minimum de 13 ans pour ouvrir un compte, mais les enfants parviendraient facilement à contourner cette mesure. Selon Génération Numérique, 63 % des moins de 13 ans sont actifs sur au moins un réseau social. Et c’est justement pour s’attaquer à ce problème que la loi instaure l’obligation, pour tous les mineurs de moins de 15 ans, d’obtenir le consentement d’un de leurs parents avant de s’inscrire sur un réseau social. Problème : on ne sait pas sous quelle forme ce consentement pourra être recueilli : faudra-t-il fournir une déclaration sur l’honneur facilement imitable et contournable ? Remplir un formulaire en ligne ? Si on comprend l’idée de garde-fou qui impose d’inclure un adulte lorsqu’un enfant s’inscrit, la mise en pratique de la mesure pose question.

La vérification de l’âge de l’utilisateur : selon quelle solution technique ?

Autre zone d’ombre de la nouvelle loi : la question de la vérification de l’âge en elle-même. Comme cela a déjà été débattu lors de la mise en place de la vérification de l’âge pour les sites pornographiques, il n’existe pas actuellement de consensus sur la technologie à utiliser qui pourrait permettre de satisfaire à la fois la sécurisation de nos données personnelles, et l’exclusion des mineurs qui n’auraient pas reçu l’accord de leurs parents. La solution parfaite n’existe pas, reconnaissait la Cnil en mars dernier. Mais il existe plusieurs options sur la table, comme le processus de double anonymat via un tiers de confiance actuellement testé pour les sites pornographiques. Si ce test est concluant, il sera généralisé en septembre prochain. L’idée serait de passer par un tiers de confiance qui contrôlerait l’âge et délivrerait une attestation de majorité, ensuite envoyée au site en question.

La proposition de loi ne reprend pas directement cette idée, mais précise que « les solutions techniques (devront être) conformes à un référentiel » élaboré par l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). Reste à savoir lequel – l’option de la double authentification par un tiers pourrait être choisie, parmi d’autres méthodes.

Une date d’entrée en vigueur à préciser

A côté de la technologie en elle-même, la question de la date d’entrée en vigueur du texte reste à préciser. Il faudra d’abord que la loi reçoive le feu vert de la Commission européenne qui rendra un avis sur la conformité de ce texte au droit européen. Une fois reçu, un décret définira la date d’entrée en vigueur de la loi. Et les plateformes auront alors 12 mois pour se conformer à ces nouvelles obligations qui concerneront les nouvelles inscriptions. Pour les utilisateurs déjà inscrits, les plateformes auront deux années pour se mettre à jour et obtenir l’accord parental des moins de 15 ans. A contrario, à partir de cet âge considéré comme une majorité numérique, le mineur n’aura plus besoin de l’accord parental pour s’inscrire sur un réseau social. 

Une nouvelle obligation de mesurer le temps passé sur les réseaux sociaux

Les plateformes devront se conformer à d’autres obligations. Elles devront par exemple « activer un dispositif permettant de contrôler le temps d’utilisation de leur service et informer régulièrement l’usager de cette durée par des notifications », souligne le projet de loi, sans donner plus de précision.

Une amende salée

Si les réseaux sociaux ne respectent pas ces nouvelles obligations, ils s’exposeront à une amende salée qui peut aller jusqu’à 1% du chiffre d’affaires mondial de la société. L’autorité parentale pourra, elle, demander que le compte d’un mineur de moins de 15 ans soit suspendu.

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Source : Proposition de loi adoptée le 29 juin 2023