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99 francs au rabais

Faire un bêtisier des start-up. L’idée est amusante. Mais le recueil publié aux éditions Stratégies relève de l'” antistart-upisme ” primaire.

” Fellini est mort. Tant mieux, ils vont nous repasser Il était une fois dans l’Ouest. ” Drôles sans être méchantes, les Brèves de comptoir de Jean-Marie Gourio sont surtout d’une tendresse implacable. Mais, quoi qu’on en dise, ” l’exploitation de la bêtise n’est pas à la portée du premier imbécile venu “. Et, malheureusement, cette phrase de Yann Audouard prend tout son sens lorsque l’on compare les brèves de comptoir de Gourio avec Le Bêtisier des start-up, publié aux éditions Stratégies.La quatrième de couverture nous promet “les confidences des opportunistes qui ont participé à la première vague de l’Internet”. La première ” bêtise “, citée sur cette quatrième de couverture, déçoit déjà : “Une fondatrice de société :“3 millions, ça me paraît un peu exagéré comme devis.”Le directeur technique d’une Web agency lui répond :“Bon, allez les filles y’a pas beaucoup de nanas dans les start-up. Vous êtes mignonnes, on va vous faire une fleur. Pour vous ce sera 1 million.” ” Bon, c’est loin d’être drôle, et question tendresse, on repassera.Le seul problème, c’est que tout l’ouvrage est du même tonneau. Les propos relatés ne traduisent aucune finesse ; ils manquent cruellement de saveur. Certes, le lecteur aurait pu trouver son plaisir si les auteurs de ces quelques bêtises avaient été identifiés. Et, sur le fond, qu’y a-t-il de si drôle à se moquer, surtout aujourd’hui, de ces créateurs un peu naïfs ? Tout le monde ne peut pas être avant-gardiste, mais se gausser aujourd’hui de propos devant lesquels on était béat d’admiration il y a un an, c’est limite.C’est là que ce bêtisier est choquant. Dans sa construction, il se pose en tribunal populaire de l'” antistart-upisme ” primaire. Que reproche-t-on aux patrons de start-up ? D’y avoir cru, pour une fois ? De s’être endettés, jusqu’à hypothéquer leur maison pour un projet qui leur tenait à c?”ur ? Pour une seule fois depuis la reconstruction qui a suivi la Seconde Guerre mondiale, des entrepreneurs français ont cru à leur projet. C’est si drôle que ça ?Et qui a fait des bêtises ? Les entrepreneurs ou les médias qui, tout en ne comprenant rien à ce qu’ils faisaient, les ont portés aux nues ? Entre 1998 et 2000, les technologies ont vécu leur plus belle aventure depuis la conquête spatiale. Bien sûr, au passage, il s’en est dit des bêtises. On aurait pu en rire à l’époque, on pourrait en rire aujourd’hui. Mais pas s’en moquer, parce que cest trop facile. Décidément, ce 99 francs à la sauce start-up est bien raté. Mais pour 59 francs, il ne faut pas trop en demander.Prochaine chronique vendredi 13 avril

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Alain Steinmann, grand reporter