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Des mémoires qui durent

La DRam a la mémoire qui flanche : dès qu’on la prive de courant électrique, elle oublie toutes les informations qu’elle contient ! Pour la remplacer, des chercheurs veulent exploiter les propriétés intrinsèques de la matière et créer, enfin, des mémoires rapides, de grande capacité et non volatiles.

Il n’y a rien de plus frustrant : à chaque démarrage d’un ordinateur, il faut attendre des dizaines de secondes, quand ce n’est pas des minutes, avant de pouvoir utiliser ses logiciels. Pourquoi ? Simplement parce que les différents composants du système d’exploitation doivent être chargés en mémoire vive à chaque démarrage. C’est cette mémoire volatile appelée Ram (Random Access Memory), qui stocke de manière temporaire les informations nécessaires au bon fonctionnement des logiciels. Malheureusement, la DRam (Dynamic Ram) utilisée aujourd’hui dans tous les ordinateurs est un panier percé : elle n’est capable de conserver ses informations que quand elle est alimentée par un courant électrique. Dès qu’on lui ôte cette précieuse énergie, lors d’un simple redémarrage par exemple, elle oublie tout ! Une sacrée contrainte, que les laboratoires de recherche des constructeurs essaient de dépasser.

Trouver un successeur à la DRam

L’objectif est de trouver un remplaçant aux nombreuses générations de Ram qui se sont succédé depuis des années, la plus utilisée aujourd’hui étant la DRam et ses dérivés. Certes, la génération de DRam actuelle est plus rapide et de plus grande capacité que les mémoires employées il y a cinq ans. Mais la technologie n’a guère évolué. Physiquement, la mémoire se présente toujours de la même façon : une grille extrêmement fine de fils entrecroisés. A chaque intersection est stocké un bit d’information, un 0 ou un 1 selon le potentiel électrique présent. En modifiant les algorithmes ou la manière d’indexer les bits sur la grille, on a pu améliorer de façon significative les performances de la mémoire. Mais elle reste volatile, c’est-à-dire qu’elle nécessite toujours une alimentation continue en courant électrique pour conserver ses informations. Pour la remplacer, les industriels parient sur la MRam (Magnetoresistive Ram). Celle-ci repose toujours sur une grille de fils entrecroisés; mais à chaque croisement est placé un bipôle constitué d’empilements de métaux ferromagnétiques. Chaque bipôle est polarisé par les courants qui circulent dans les fils de la grille pour stocker un 0 ou un 1, grâce à une propriété essentielle de la matière, découverte dans les années 1980 : l’effet tunnel. Celui-ci repose sur la possibilité qu’un courant électrique circule entre deux couches métalliques séparées par un isolant, comme si les électrons parvenaient à passer à travers un ‘ tunnel invisible ‘.La mémoire magnétique est donc le résultat d’un pan important de la recherche fondamentale, regroupé sous le vocable ‘ électronique de spin ‘, qui tente d’utiliser le sens de rotation des électrons (la polarité) dans la matière élémentaire pour stocker l’information. Une fois le bipôle polarisé, il conserve ses informations même sans courant électrique.

L’irrésistible attraction de la mémoire magnétique

Pour beaucoup, la MRam est la mémoire idéale qui va remplacer toutes les autres, notamment la DRam et les mémoires flash qui équipent les appareils nomades. On ne s’étonnera donc pas qu’elle suscite depuis plusieurs années un intérêt phénoménal dans l’industrie électronique. IBM, Infineon, Motorola, STMicroelectronics, HP, Nec, NVE ou Samsung ont tous déjà présenté des prototypes opérationnels, et travaillent à l’industrialisation du processus de fabrication. La MRam devrait être commercialisée dès l’année prochaine, et se généraliser en 2005. Selon toute vraisemblance, elle accaparerait rapidement une part significative du marché des mémoires électroniques, estimé à plus de 40 milliards d’euros (262 milliards de francs).Une autre candidate à la succession de la DRam est également en cours d’élaboration : la NRam, ou NanoRam. Elle est directement basée sur l’utilisation de nano tubes de carbone, des tubes pouvant être mille fois plus longs que larges, fermés aux extrémités, d’un diamètre de l’ordre du nanomètre (c’est-à-dire d’un millionième de millimètre). Cette fois, c’est la position dans l’espace des tubes les uns par rapport aux autres qui permettrait de stocker les bits. En déplaçant un tube, on changerait sa ‘ valeur ‘. Un changement technologique et structurel majeur dans la création des mémoires : également non volatile, la NRam pourrait donner naissance à des puces ultra rapides, capables de stocker jusqu’à 10 Go de données. Nantero, la société la plus avancée dans ce domaine, a annoncé en mai dernier la fabrication d’une grille comportant 10 milliards de nanotubes. Selon l’entreprise, la NRam pourrait être opérationnelle dès 2005.

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Cyril Fiévet