Avec son projet Maelstrom, son navigateur pour un Web distribué, BitTorrent a déjà rapproché sa technologie P2P du Web. Tout en étant légèrement différent, WebTorrent va plus loin. En cours de développement depuis deux ans et toujours en bêta, WebTorrent est en effet un « client » BitTorrent pour navigateur Web. Il fonctionne avec tous les browsers « modernes », n’a pas besoin qu’on installe un plugiciel et permet de partager des fichiers directement depuis le navigateur, sans qu’aucune configuration ne soit requise.
Tout à y gagner
Autrement dit, après deux ans de développement, WebTorrent ouvre le P2P à tous les sites Web qui souhaiteraient distribuer leurs contenus de manière décentralisée et économiser également de la bande passante. Imaginez un site comme YouTube qui hébergerait des vidéos sur un serveur et qui, pour les plus populaires, déporterait tout ou partie de l’hébergement sur un réseau P2P. Même chose pour des services à but non lucratif comme Wikipedia, qui « pourraient réduire les coûts de bande passante et d’hébergement en laissant les visiteurs participer. Les contenus populaires seraient servis de navigateur à navigateur, rapidement et à peu de frais. Les contenus sollicités plus rarement seraient servis de manière fiable en HTTP par le serveur d’origine », met en perspective le site du projet.
Le gain en bande passante pourrait être colossal, les économies également. Pour les utilisateurs, le changement pourrait être transparent, voire bénéfique.
Pas étonnant dès lors que de nombreux acteurs du Web s’intéressent à sa technologie. C’est le cas de Netflix, qui mentionnait WebTorrent dans une offre d’emploi il y a quelques mois. Aux Etats-Unis, selon la dernière étude Sandvine, Netflix représente 34,7% de la bande passante consommée en Amérique du Nord. Une technologie qui permettrait d’alléger la charge des serveurs du géant de la SVoD ne peut qu’être bienvenue.
Tous y gagner
Elle éviterait également les ralentissements que les utilisateurs peuvent rencontrer aux heures de pointe. « Si Netflix utilise WebTorrent, les utilisateurs verraient une meilleure qualité vidéo pendant les heures de forte demande. WebTorrent permettrait aux clients d’un même fournisseur d’accès de partager des morceaux de la vidéo entre eux sans avoir à quitter le réseau du FAI », a expliqué Feross Aboukhadijeh à TorrentFreak.
S’il n’est pas encore dit que Netflix sautera le pas, d’autres acteurs du Web ont manifesté leur intérêt. L’Internet Archive aimerait l’utiliser pour la diffusion de ses vidéos. D’autres projets plus anecdotiques utilisent déjà cette technologie. Outre la page d’accueil de WebTorrent, qui donne une bonne idée de son fonctionnement, un site comme File.pizza permet de copier-coller le lien magnet de n’importe quel fichier torrent pour le lire ensuite dans un navigateur, à l’exclusion d’Internet Explorer, évidemment, qui n’est pas compatible avec WebRTC.
Cauchemar ou miracle
Le créateur de ce projet n’en est pas à son premier coup. Tout juste diplômé de la prestigieuse université de Stanford, Feross Aboukhadijeh, avait créé avec deux comparses PeerCDN, une solution de distribution de contenus assistée par un réseau pair à pair, rachetée par Yahoo! en 2013. Avec cette première aventure, Feross Aboukhadijeh avait montré son goût pour les technologies du Web ouvertes qu’on retrouve au cœur de WebTorrent : WebRTC, pour établir « une vraie connexion pair à pair », expliquait le jeune inventeur à TorrentFreak, et Javascript, langage incontournable du Web.
La simplicité d’utilisation et l’implémentation facile de WebTorrent pourraient en faire un outil parfait pour la distribution de contenus légaux par des plates-formes comme Netflix. Elle pourrait aussi en faire le pire cauchemar des ayants-droit, alors qu’on croyait ce rôle réservé à Popcorn Time… qui n’en finit pas de renaître de ses cendres.
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