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Reconnaissance faciale, sécurité, vie privée : cherchez l’intrus

On le sait, les événements tragiques du 11 septembre ont renforcé les velléités sécuritaires. Les partisans cryptophiles de la défense de la vie privée ” à tout prix ” en sont pour leur compte, et devront sans doute s’habituer à la généralisation des écoutes sur le Réseau.

Mais ce qui est vrai des échanges sur Internet pourrait bien l’être également dans la vraie vie.La vision par ordinateur, discipline rattachée à l’intelligence artificielle, fait ?” de longue date ?” l’objet de nombreux travaux. Une de ses applications, la reconnaissance faciale, est parmi les voies les plus prometteuses de la biométrie. L’enjeu est de pouvoir identifier un visage ” capturé ” par une caméra ou une photo numérisée et le comparer à des visages ” à risque “, de voleurs ou terroristes.Le MIT a donné ses lettres de noblesse à la reconnaissance faciale. A travers des travaux débutés dans les années 80, l’institut a conceptualisé une méthode, basée sur les “eigenfaces”(terme allemand signifiant ” son propre visage “). De façon surprenante, le MIT a en effet démontré que les visages de la totalité des individus de la planète pouvaient être différenciés par seulement une centaine de caractéristiques distinctes, les fameux“eigenfaces “. La recherche ne s’arrête pas là, et vise à concevoir des systèmes intelligents capables de décoder les expressions humaines d’un visage (colère, tristesse…) ou ses caractéristiques intrinsèques (sexe, âge, etc.).Mais les bases du concept sont posées. Depuis peu, plusieurs entreprises, utilisant la technologie développée au MIT, proposent des services commerciaux basés sur la reconnaissance faciale.La technologie est simple : on entre les visages, on en extrait les” eigenfaces “, et on les compare avec ceux déjà présents dans la base. S’agissant d’une centaine d’informations élémentaires codées, le système est particulièrement efficace. Viisage Technology, l’un des leaders du domaine, assure pouvoir scanner 10 millions d’images en 6 secondes… Et le taux d’échec est inférieur à 1 %.Du reste, la technologie présente d’autres avantages. Notamment le fait d’être ” non-intrusive “. Car, contrairement à la prise d’empreintes digitales, la capture d’un visage peut se faire à l’insu de la personne. Et c’est d’ailleurs tout le problème.Faisons une petite crise de paranoïa. Imaginons que l’on généralise l’installation de caméras de vidéosurveillance. Et que ces caméras soient reliées à de puissants ordinateurs, eux-mêmes équipés de dispositifs de reconnaissance faciale, capables d’extraire les visages des séquences filmées. Nous avons là les bases d’un système orwellien, à côté duquel Echelon ou Carnivore font figures de gadgets… Il devient tout simplement possible de tracer les moindres faits et gestes de tout un chacun. Savoir où vous allez, ce que vous achetez ou mangez, ou encore qui vous rencontrez.Bien sûr, cette traçabilité encore hypothétique possède des vertus sécuritaires certaines. Facile à coupler à la base de données des personnes recherchées par toutes les polices, on crée un dispositif imparable d’alerte en temps réel. Mais pour ce qui est de la vie privée, c’est moins bien. D’un côté, mon visage, bien qu’il m’appartienne, devient ” public ” dès lors que je sors de chez moi. De l’autre, je n’ai pas forcément envie d’être épié, et encore moins pisté tout au long de mes déplacements. D’ailleurs, si en France la loi Informatique et libertés encadre (un peu) l’utilisation de nos données personnelles nominatives, qu’en est-il des caractéristiques de nos visages ?Mais tout cela n’est sans doute qu’un excès paranoïaque. Les industriels de la reconnaissance faciale, qui multiplient ?” curieusement ?” les communiqués de presse depuis le mois dernier, assurent que les visages enregistrés ne correspondant pas à ceux de délinquants notoires sont immédiatement effacés des bases de données. Nous voilà rassurés.Prochaine chronique mardi 30 octobre

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Cyril Fiévet